Résumé de la décision
La décision traite d'une demande de la société hôtelière Paris Eiffel Suffren, qui a sollicité réparation pour des préjudices subis en raison de l'application d'une disposition législative déclarée inconstitutionnelle par le Conseil constitutionnel. Cette demande portait sur l'indemnisation pour la nullité d'une loi relative à l'intéressement des salariés. Le Conseil d'État a décidé qu'il n'était pas nécessaire de renvoyer la question prioritaire de constitutionnalité relative à l'article L. 141-1 du code de l'organisation judiciaire, étant donné qu'il n'était pas applicable dans le cadre du litige.
Arguments pertinents
1. Applicabilité des dispositions législatives : Le Conseil d'État a souligné que, selon l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958, une question prioritaire de constitutionnalité ne peut être soulevée que si la disposition contestée est applicable au litige. En l'espèce, les dispositions de l'article L. 141-1 du code de l'organisation judiciaire n'ont pas été invoquées et ne s'appliquent pas au cas présent.
> "Les dispositions de l'article L. 141-1 du code de l'organisation judiciaire n'ont pas été invoquées par les parties devant la cour ni appliquées par elle."
2. Nature des fautes à invoquer : La responsabilité de l'État ne peut être engagée que pour faute lourde ou déni de justice, ce qui n'était pas le fondement de la demande de la société, qui visait uniquement la réparation d'un préjudice en lien avec une loi déclarée inconstitutionnelle.
> "Cette action a pour objet d'engager la responsabilité de l'État du fait d'une loi déclarée contraire à la Constitution par le Conseil constitutionnel et non pour faute lourde du service public de la justice."
Interprétations et citations légales
1. Article L. 141-1 du code de l'organisation judiciaire : Cet article stipule la responsabilité de l'État en cas de dysfonctionnement du service public de la justice, précisant que cette responsabilité n'est engagée que pour faute lourde ou déni de justice. Le Conseil d'État a jugé que ces conditions ne s'appliquaient pas au litige :
> "L'Etat est tenu de réparer le dommage causé par le fonctionnement défectueux du service public de la justice. / Sauf dispositions particulières, cette responsabilité n'est engagée que par une faute lourde ou par un déni de justice." (Code de l'organisation judiciaire - Article L. 141-1)
2. Article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 : Cet article régit les conditions de saisine du Conseil constitutionnel pour une question prioritaire de constitutionnalité. Le Conseil d'État a appliqué ces conditions pour décider que la question ne devait pas être renvoyée, insistant sur le fait que la disposition contestée ne se rapportait pas au litige en question.
> "Le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé... à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'Etat." (Ordonnance du 7 novembre 1958 - Article 23-5)
En conclusion, la décision du Conseil d'État se fonde sur des principes précis de droit administratif et constitutionnel, permettant de clarifier les conditions dans lesquelles une question prioritaire de constitutionnalité peut être soulevée, tout en affirmant que la responsabilité de l'État ne peut être engagée dans le cadre d'une simple application d'une loi déclarée inconstitutionnelle.