Résumé de la décision
La décision annulée par le Conseil d'État concerne un arrêté du 5 mars 2010 du préfet du Val-d'Oise qui a établi un périmètre d'usage de consommation exceptionnel à Cormeilles-en-Parisis, permettant aux établissements de vente au détail d'ouvrir le dimanche. Le tribunal administratif de Cergy-Pontoise avait rejeté la demande d'annulation de cet arrêté formée par des syndicats, et la cour administrative d'appel de Versailles a confirmé ce jugement. Les organisations syndicales ont formé un pourvoi en cassation. Après examen, le Conseil d'État a annulé l'arrêt d'appel, concluant que la cour avait commis des erreurs de droit dans son évaluation des habitudes de consommation dominicale et dans l'appréciation des principes d'égalité et de libre concurrence. En conséquence, l'affaire a été renvoyée à la cour administrative d'appel, et l'État a été condamné à verser 3 000 euros aux syndicats.
Arguments pertinents
1. Existence d'habitudes de consommation dominicale :
Le Conseil d'État souligne que pour établir un périmètre d'usage de consommation exceptionnel, il est nécessaire de démontrer l'existence d'usages de consommation dominicale "suffisamment anciens, durables et réguliers". La cour avait échoué à apprécier ces éléments : "la cour a commis une erreur de droit en ne vérifiant pas le caractère durable et régulier des pratiques de consommation dominicale préexistantes".
2. Principe d'égalité et libre concurrence :
Le Conseil a également pointé que la cour a erré en écartant les moyens relatifs à la méconnaissance du principe d'égalité et de libre concurrence, en réduisant l'impact de l'arrêté à une simple création de périmètre, sans prendre en compte les conséquences sur la concurrence entre établissements. Il est noté que "la création de ce périmètre a pour objet de délimiter la zone au sein de laquelle les établissements de vente au détail pourront [...] bénéficier de plein droit d'une telle dérogation".
Interprétations et citations légales
1. Article L. 3132-25-1 du Code du travail :
Cet article stipule que, dans le cadre de dérogations au repos dominical pour les établissements de vente au détail dans des unités urbaines de plus d'un million d'habitants, il est nécessaire de déterminer "des habitudes de consommation dominicale" pour créer un périmètre d'usage. Le texte indique que "le repos hebdomadaire peut être donné, après autorisation administrative, par roulement", ce qui implique une attention particulière aux pratiques existantes.
2. Article L. 3132-25-3 du Code du travail :
Ce texte précise que la dérogation au repos dominical est subordonnée à une autorisation administrative. Ainsi, la création d'un périmètre ne doit pas seulement faciliter ces dérogations, mais doit également respecter les principes sous-jacents de libre concurrence et d'égalité, qui étaient négligés par la cour d'appel.
3. Valeur des pratiques de consommation :
La décision du Conseil d'État renvoie à la nécessité de "vérifier le caractère durable et régulier des pratiques" pour établir la légitimité des dérogations, confirmant que l’évaluation des habitudes de consommation doit être fondée sur des données solides et historiques.
Ces réflexions mettent en lumière les enjeux juridiques liés aux dérogations au repos dominical et leur impact sur la concurrence commerciale, tout en soulignant l'importance d'une analyse rigoureuse des pratiques locales au regard du droit du travail.