- la condition d'urgence est remplie dès lors que le décret litigieux, d'une part, compromet l'intérêt public tenant à la promotion de solutions alternatives aux biocides de synthèse et, d'autre part, porte gravement atteinte à leur activité et à leurs intérêts économiques ;
- il existe un doute sérieux quant à la légalité du décret attaqué ;
- le pouvoir réglementaire a méconnu l'étendue de la compétence qui lui est dévolue par l'article L. 522-5-3 du code de l'environnement dès lors que l'interdiction de publicité introduite par le décret est trop générale ;
- le décret est dépourvu de base légale dès lors qu'il a été pris en méconnaissance du règlement européen n° 528/2012 du 22 mai 2012 relatif à la mise à disposition sur le marché et l'utilisation des produits biocides ;
- il est entaché d'une erreur de droit dès lors que l'interdiction de la publicité des produits biocides auprès du public constitue une atteinte illégitime à leur droit au respect des biens et à leur droit de propriété ;
- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation en ce qu'il méconnaît les objectifs de la loi n° 2018-938 du 30 octobre 2018.
2° Sous le n° 434466, par une requête, enregistrée le 9 septembre 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le Comité interprofessionnel des huiles essentielles françaises (CIHEF), la société Florame, la société Hyteck Aroma-Zone, la société Laboratoires Gilbert, la société Laboratoire Léa Nature, la société Laboratoires Oméga Pharma France, la société Pierre Fabre médicaments, la société Pranarom France et la société Puressentiel France demandent au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :
1°) de suspendre le décret n° 2019-642 du 26 juin 2019 relatif aux pratiques commerciales prohibées pour certaines catégories de produits biocides ;
2°) de saisir, le cas échéant, la Cour de justice de l'Union européenne d'une question préjudicielle relative à l'harmonisation exhaustive réalisée par le règlement européen n° 528/2012 concernant la mise à disposition sur le marché et l'utilisation des produits biocides ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- la condition d'urgence est remplie dès lors que le décret litigieux, d'une part, compromet l'intérêt public tenant à la promotion de solutions alternatives aux biocides de synthèse et, d'autre part, porte gravement atteinte à leur activité et à leurs intérêts économiques ;
- il existe un doute sérieux quant à la légalité du décret attaqué :
- le pouvoir réglementaire a méconnu l'étendue de la compétence qui lui est dévolue par l'article L. 522-18 du code de l'environnement dès lors que l'interdiction de certaines pratiques commerciales introduites par le décret est trop générale ;
- le décret est dépourvu de base légale dès lors qu'il a été pris en méconnaissance du règlement européen n° 528/2012 du 22 mai 2012 ;
- il est entaché d'une erreur de droit dès lors que l'interdiction de certaines pratiques commerciales constitue une atteinte illégitime à leur droit au respect des biens et à leur droit de propriété ;
- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation en ce qu'il méconnaît les objectifs de la loi n° 2018-938 du 30 octobre 2018.
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le règlement européen n° 528/2012 du 22 mai 2012 ;
- le code de l'environnement ;
- la loi n° 2018-938 du 30 octobre 2018 ;
- le décret n° 2019-643 du 26 juin 2019 ;
- le code de justice administrative ;
Considérant ce qui suit :
1. Les requêtes visées ci-dessus tendent à la suspension de l'exécution de deux décrets d'application de la même loi portant sur une même catégorie de produits et sont présentées par les mêmes requérants. Il y a donc lieu de les joindre pour statuer par une seule ordonnance.
2. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ". En vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut, par une ordonnance motivée, rejeter une requête sans instruction ni audience lorsque la condition d'urgence n'est pas remplie ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée.
3. Les deux décrets dont la suspension est demandée ont pour objet d'interdire, pour certaines catégories de produits dont les entreprises requérantes, unies dans une organisation professionnelle qui est également requérante, assurent la production ou la commercialisation, des pratiques commerciales ou la publicité commerciale.
4. Pour établir l'urgence qui s'attacherait aux suspensions demandées, les requérants soutiennent que l'interdiction de publicité pour les produits comportant des huiles essentielles qu'ils commercialisent aboutirait, dans un délai qu'ils ne précisent pas, à une chute de 30 à 40 % du volume de leurs ventes ; en l'absence de toute précision, qu'il leur aurait été loisible de fournir, en dépit des obligations que le respect du secret des affaires entre concurrents, qu'ils invoquent pour justifier leur carence sur ce point, notamment quant au volume de ces ventes, aux coûts et bénéfices qui en résultent, à leur part dans leurs chiffres d'affaire, et dans leurs résultats, aux mécanismes de marché qui expliqueraient en quoi une corrélation aussi étroite entre les pratiques commerciales prohibées et le volume des ventes serait établie et pourrait avoir un effet aussi direct et important, le tort causé par le décret attaqué aux intérêts des requérants ne peut être regardé comme établi, devant le juge des référés. Ni l'absence alléguée de toute urgence à l'application des décrets attaqués, ni la circonstance que l'interdiction de publicité aurait pour effet d'empêcher de promouvoir des produits moins nocifs que d'autres, ne sauraient non plus contribuer à regarder l'urgence, au regard des dispositions précédemment rappelées, comme établie.
5. Faute que l'urgence soit établie, il y a donc lieu, sans examiner le sérieux des moyens avancés, de rejeter l'ensemble des conclusions à fin de suspension des deux requêtes, et pour chacune d'elles, celles à fin de versement d'une somme d'argent par l'Etat, les dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative y faisant obstacle dès lors que l'Etat n'est pas la partie perdante. Il y a donc lieu de rejeter sa requête selon la procédure prévue par l'article L. 522-3 de ce code.
O R D O N N E :
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Article 1er : Les requêtes du Comité interprofessionnel des huiles essentielles françaises de la société Florame, de la société Hyteck Aroma-Zone, de la société Laboratoires Gilbert, de la société Laboratoire Léa Nature, de la société Laboratoires Oméga Pharma France, de la société Pierre Fabre médicaments, de la société Pranarom France et de la société Puressentiel France sont rejetées.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée au Comité interprofessionnel des huiles essentielles françaises, premier requérant dénommé, pour l'ensemble des requérants.