2°) d'enjoindre au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur de le réintégrer immédiatement dans ses fonctions, avec effet rétroactif en ce qui concerne son traitement et son régime indemnitaire ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
2° Sous le n° 426363, par une requête et un nouveau mémoire, enregistrés les 18 décembre 2018 et 9 mai 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B...A...demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le décret du 12 novembre 2018 par lequel le Président de la République lui a infligé la sanction disciplinaire de révocation ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
....................................................................................
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- le décret n° 81-241 du 12 mars 1981 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Sophie-Caroline de Margerie, conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Guillaume Odinet, rapporteur public,
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Meier-Bourdeau, Lecuyer, avocat de M. A...;
1. Il ressort des pièces du dossier que M. B...A...a été nommé inspecteur de l'administration de 1ère classe stagiaire, puis titularisé le 1er janvier 2016 par décret du Président de la République du 31 décembre 2015. Le chef de service de l'inspection générale de l'administration a pris, le 11 juillet 2018, sur le fondement de l'article 30 de la loi du 13 juillet 1983, un arrêté suspendant M. A...de ses fonctions en vue de poursuites disciplinaires, en raison d'incidents qui s'étaient produits, dans le cours d'une mission effectuée pour le compte de l'inspection générale de l'administration, en Guyane et à la Réunion en juin 2018. La procédure disciplinaire engagée à son encontre a abouti au prononcé de la sanction de révocation par décret du Président de la République le 12 novembre 2018. M. A...demande l'annulation de l'arrêté du 11 juillet 2018 et du décret du 12 novembre 2018.
2. Les requêtes présentent à juger les mêmes questions. Il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision.
Sur les conclusions dirigées contre l'arrêté de suspension du 11 juillet 2018 :
3. Aux termes de l'article 30 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " En cas de faute grave commise par un fonctionnaire, qu'il s'agisse d'un manquement à ses obligations professionnelles ou d'une infraction de droit commun, l'auteur de cette faute peut être suspendu par l'autorité ayant pouvoir disciplinaire qui saisit, sans délai, le conseil de discipline. (...) ". Aux termes de l'article 67 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat : " Le pouvoir disciplinaire appartient à l'autorité investie du pouvoir de nomination (...) ". En vertu des dispositions de l'article 6 du décret du 12 mars 1981 portant statut de l'inspection générale de l'administration au ministère de l'intérieur, la titularisation des inspecteurs de l'administration de 1ère classe est prononcée par décret du Président de la République.
4. Il résulte de la combinaison de ces dispositions qu'en l'absence de toute délégation de nomination des inspecteurs de l'administration donnée par le Président de la République au ministre de l'intérieur, le pouvoir de prononcer à leur encontre une mesure de suspension ressortit à la compétence du Président de la République. Toutefois, lorsqu'il y a urgence à écarter provisoirement du service un membre du corps, le chef du service de l'inspection générale de l'administration, responsable de la gestion des membres du corps en vertu de l'article 3 du même décret, est compétent pour prendre une telle mesure.
5. La suspension de M. A...était motivée par l'état d'ébriété dans lequel il s'est trouvé lors de son arrivée en Guyane et par son comportement lors de son séjour à la Réunion, durant lequel, alors qu'il était hébergé dans la résidence préfectorale, il a été vu deux soirs successifs en état d'ébriété manifeste, a reçu des visiteurs extérieurs au service sans prévenir et sans autorisation du préfet, et, à son départ, a laissé dans un état de très grande saleté la chambre mise à sa disposition dans laquelle du mobilier cassé a été retrouvé. Ces faits, dont les préfets de la région Guyane et de la Réunion ont informé le chef du service de l'inspection et qui ont été corroborés par des témoignages écrits et circonstanciés, présentaient un caractère suffisant de vraisemblance et de gravité pour justifier la mesure de suspension prise dans l'intérêt du service. En ne prenant pas cette mesure dès le retour de M. A...en métropole afin notamment de procéder aux vérifications qui lui apparaissaient nécessaires ainsi qu'à l'audition de l'intéressé, reportée d'une semaine à la demande de celui-ci, le chef du service de l'inspection générale de l'administration n'a pas méconnu la compétence qu'il tenait de la situation d'urgence à écarter l'intéressé du service.
6. Il suit de là que les moyens tirés de ce que le chef du service de l'inspection générale de l'administration n'aurait pas été compétent pour prendre la décision attaquée et de ce que cette décision serait disproportionnée et entachée d'erreurs de fait doivent être écartés.
7. Le détournement de procédure allégué n'est pas établi.
8. M. A...n'est ainsi pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté qu'il attaque. Les autres conclusions de sa requête ne peuvent qu'être rejetée.
Sur les conclusions dirigées contre le décret du 12 novembre 2018 :
9. La sanction de révocation contestée prononcée à l'encontre de M. A...est motivée par les agissements rappelés ci-dessus qui se sont produits en Guyane et à La Réunion, par le fait qu'il a été vu en état d'ébriété une fois à Paris dans les locaux de l'inspection peu de temps après son retour, et qu'à la suite de la mesure de suspension, il a mis en cause, dans des courriers internes, sa hiérarchie et les membres du corps préfectoral qui avaient rendu compte des incidents, et a également sollicité par voie de courrier circulaire le témoignage en sa faveur du personnel du service de l'inspection.
10. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes.
11. D'une part, l'état d'ébriété constaté à plusieurs reprises en mission ainsi que la dégradation des locaux et du mobilier à La Réunion constituent de graves manquements au devoir d'exemplarité et de tempérance, particulièrement exigeant dans un corps tel que le corps d'inspection auquel appartient M.A.... Ni la circonstance qu'à La Réunion, M. A...ait fait passer ses visiteurs par le poste de garde et ait demandé à pouvoir lui-même ranger et nettoyer sa chambre et que l'état des lieux n'ait été connu que parce que cette consigne a été enfreinte, ni celle que la parution d'un article dans un journal local ne lui est pas imputable, ne sauraient l'exonérer de sa responsabilité pour les fautes commises. Si M. A...se prévaut de l'état dépressif sérieux pour lequel il est en traitement, il ne ressort pas des pièces du dossier, et notamment pas des attestations médicales fournies, qu'au moment des faits commis lors de la mission en outre-mer, M.A..., qui exécutait normalement son travail dans la journée, ait été dans un état psychique tel qu'il ne pouvait être regardé comme responsable de ses actes, ni que cet état ait été de nature à justifier la gravité des manquements constatés. D'autre part, sans davantage pouvoir être justifiées par son état de santé, les violentes critiques qu'il a formulées à plusieurs reprises et pendant une longue période à l'égard de sa hiérarchie et d'autres fonctionnaires dans le cadre de l'organisation de sa défense dans la procédure disciplinaire engagée contre lui ont méconnu le devoir de réserve et de loyauté.
12. Dans ces conditions, compte tenu de l'emploi, des fonctions de l'intéressé et des responsabilités qui s'attachent à l'exercice de celles-ci, et de la gravité des fautes commises, le Président de la République, en révoquant M. A...alors même que ce dernier faisait état de sa maladie ainsi que d'une carrière marquée par d'excellents états de service, n'a pas commis d'erreur de droit en ne le considérant pas irresponsable pour raison médicale et n'a pas prononcé à son encontre une sanction disproportionnée. Il suit de là que M. A... n'est pas fondé à demander l'annulation du décret attaqué, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par le ministre.
13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas la partie perdante, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : Les requêtes de M. A...sont rejetées.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. B...A...et au ministre de l'intérieur.