Résumé de la décision
La décision concerne une requête déposée par la Fédération experts-comptables et commissaires aux comptes de France contre un décret du 8 octobre 2018, qui prorogeait de dix-huit mois les mandats des commissaires aux comptes élus. La demande a été rejetée par le tribunal, qui a jugé que la prorogation ne méconnaissait pas les principes constitutionnels applicables, notamment en ce qui concerne la périodicité du suffrage et le principe d'égalité.
Arguments pertinents
1. Absence de consultation nécessaire : Le tribunal a considéré que l'argument selon lequel le décret aurait dû faire l'objet d'une consultation préalable des organisations syndicales n'était pas suffisamment étayé pour être pris en compte.
2. Suffrage et élections professionnelles : Le tribunal a estimé que la prorogation des mandats ne méconnaissait pas le principe de périodicité raisonnable du suffrage, précisant que ce principe s'applique aux élections à caractère politique et non aux élections d'ordre professionnel.
> "Le principe régissant les élections à caractère politique [...] alors que les élections en cause présentent un caractère professionnel."
3. Différence de traitement justifiée : Bien que le décret ait créé une différence de traitement entre les membres ayant des mandats de durées différentes, le tribunal a souligné que cette différence était justifiée par des raisons d'intérêt général et ne constituait pas une violation du principe d'égalité.
> "La différence de traitement entre élus [...] n'est pas manifestement disproportionnée au regard de la différence de situation susceptible de la justifier."
4. Disours de la garde des sceaux : Le tribunal a conclu que les propos de la garde des sceaux lors d'un discours ne suffisaient pas à établir une erreur de droit ou un détournement de pouvoir.
Interprétations et citations légales
1. Le décret n° 2018-857 du 8 octobre 2018 est fondamental dans cette décision, notamment son article 1er qui stipule que les mandats des commissaires aux comptes élus peuvent être prorogés pour une période de dix-huit mois.
> "Les mandats, en cours au jour de l'entrée en vigueur du présent décret, [sont] prorogés pour une période de dix-huit mois."
2. Code de commerce - Article L. 821-6 : Cet article institue la Compagnie nationale des commissaires aux comptes et fixe le cadre de leur fonctionnement. Le tribunal a cité cet article à plusieurs reprises pour insister sur le caractère professionnel des élections en question.
> "Il est institué auprès du garde des sceaux, ministre de la justice une Compagnie nationale des commissaires aux comptes [...] chargée de représenter la profession [...]".
3. Code de commerce - Article R. 821-54 : Sur les modalités d'élection des membres des conseils régionaux, cet article est évoqué pour montrer que la prorogation des mandats a un fondement légal.
> "Les membres du conseil régional sont élus au scrutin secret, pour une durée de quatre ans."
Cette décision repose sur une analyse rigoureuse du cadre juridique applicable et souligne l'intérêt général qui peut justifier des dérives vis-à-vis des principes constitutionnels dans le cadre d’élections professionnelles.