2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à ses demandes ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Géraud Sajust de Bergues, conseiller d'Etat,
- les conclusions de Mme Marie-Gabrielle Merloz, rapporteure publique;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Sevaux, Mathonnet, avocat de la société Marché de Phalempin ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que la société coopérative agricole (SCA) Marché de Phalempin, qui regroupe plus de 300 producteurs de fruits et légumes de la région Hauts-de-France, est propriétaire d'un ensemble immobilier de près de 10 000 m² situé dans la zone industrielle Le Paradis sur le territoire de la commune de Phalempin (Nord). A l'issue d'un contrôle sur place, l'administration fiscale lui a indiqué qu'elle entendait, d'une part, ne maintenir l'exonération dont elle bénéficiait sur le fondement du 6° de l'article 1382 du code général des impôts que pour 39 % de la superficie de ces locaux, le reste de l'immeuble ne pouvant être regardé comme un bâtiment agricole au sens de ces dispositions, et, d'autre part, rectifier la valeur locative du surplus des locaux, précédemment appréciée selon la méthode par comparaison de l'article 1498 du code général des impôts en l'évaluant selon la méthode comptable de l'article 1499 du même code. La SCA Marché de Phalempin se pourvoit en cassation contre le jugement du 14 octobre 2019 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande en décharge des cotisations supplémentaires de taxe foncière sur les propriétés bâties qui lui ont été notifiées à raison de cette rectification de ses bases imposables au titre des années 2015 et 2016, d'une part, et des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2017 au titre de cet immeuble, d'autre part.
Sur les conclusions tendant au bénéfice de l'exonération prévue au 6° de l'article 1382 du code général des impôts
2. Aux termes de l'article 1382 du code général des impôts : " Sont exonérés de la taxe foncière sur les propriétés bâties : / (...) / 6° a. Les bâtiments qui servent aux exploitations rurales tels que granges, écuries, greniers, caves, celliers, pressoirs et autres, destinés, soit à loger les bestiaux des fermes et métairies ainsi que le gardien de ces bestiaux, soit à serrer les récoltes. / (...) / b. Dans les mêmes conditions qu'au premier alinéa du a., les bâtiments affectés à un usage agricole par les sociétés coopératives agricoles, (...) constituées et fonctionnant conformément aux dispositions légales qui les régissent (...) ".
3. Pour juger que les locaux en litige n'étaient pas au nombre des bâtiments affectés à un usage agricole par une société coopérative agricole exonérés de la taxe foncière sur les propriétés bâties en vertu du b du 6° de l'article 1382 du code général des impôts, le tribunal administratif a souverainement constaté que les locaux en cause avaient été, jusqu'en juillet 2015, mis par la société coopérative agricole (SCA) Marché de Phalempin à la disposition de la société en participation (SEP) M2P, que la SCA avait créée avec la société par actions simplifiée (SAS) Prymex, la SEP se chargeant de réceptionner les fruits et légumes produits par les agriculteurs adhérents de la SCA, de les stocker, de les conditionner et de préparer les commandes passées par la SAS Prymex en vue de leur expédition aux clients de celle-ci. En jugeant que, quand bien même la société en participation était dépourvue de personnalité juridique et de moyens propres, ces opérations n'étaient pas réalisées de façon exclusive par la SCA mais utilisaient aussi les moyens de la SAS Prymex et satisfaisaient aussi bien les besoins de cette dernière que ceux de la SCA, le tribunal administratif s'est livré à une appréciation souveraine des faits de l'espèce exempte de dénaturation. Le tribunal administratif n'a pas davantage dénaturé les pièces du dossier en retenant qu'à compter de la dissolution de la société en participation en juillet 2015 les locaux en litige avaient été exploités conjointement par la SCA et la SAS Prymex, en faisant appel à des moyens partagés servant aussi bien à l'activité de la SCA qu'à celle de la SAS Prymex. C'est sans erreur de droit que le tribunal administratif, qui a suffisamment motivé son jugement, en a déduit que l'activité exercée dans les locaux en litige n'était pas exploitée de façon exclusive par la SCA et que cet ensemble immobilier ne pouvait dès lors bénéficier, au cours des années en litige, de l'exonération prévue par les dispositions du 6° de l'article 1382 du code général des impôts.
Sur les conclusions relatives à la méthode d'évaluation de la valeur locative de l'immeuble en litige :
4. Aux termes de l'article 1499 du code général des impôts : " La valeur locative des immobilisations industrielles passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties est déterminée en appliquant au prix de revient de leurs différents éléments, revalorisé à l'aide des coefficients qui avaient été prévus pour la révision des bilans, des taux d'intérêt fixés par décret en Conseil d'Etat. / (...) ".
5. Il résulte de ces dispositions que revêtent un caractère industriel, au sens de cet article, les établissements dont l'activité nécessite d'importants moyens techniques, non seulement lorsque cette activité consiste dans la fabrication ou la transformation de biens corporels mobiliers, mais aussi lorsque le rôle des installations techniques, matériels et outillages mis en oeuvre, fût-ce pour les besoins d'une autre activité, est prépondérant.
6. En se bornant à juger que les opérations de conditionnement, de stockage et de préparation de commandes effectuées dans les locaux litigieux nécessitaient la mise en oeuvre d'importants moyens techniques destinés au maintien de la chaîne du froid, et que ces moyens techniques, dont la mise en oeuvre était indispensable pour la fraîcheur des fruits et légumes et l'allongement de leur durée de conservation, jouaient un rôle prépondérant dans l'activité ainsi exercée, sans rechercher quel était le poids respectif des différents facteurs de production dans le processus d'exploitation mis en oeuvre dans l'établissement, alors que la SCA Marché de Phalempin soutenait que les moyens humains déployés constituaient le principal facteur de l'activité en cause, le tribunal administratif a commis une erreur de droit. Sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, la SCA Marché de Phalempin est, par suite, fondée à demander, dans cette mesure, l'annulation du jugement qu'elle attaque.
7. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à la SCA Marché de Phalempin au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
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Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Lille du 14 octobre 2019 est annulé en tant qu'il se prononce sur les conclusions de la SCA Marché de Phalempin relatives à la méthode d'évaluation de la valeur locative de l'immeuble situé rue JB Lebas, ZI le Paradis, à Phalempin.
Article 2 : L'affaire est renvoyée, dans cette mesure, au tribunal administratif de Lille.
Article 3 : L'Etat versera à la SCA Marché de Phalempin une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la SCA Marché de Phalempin est rejeté.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à la société coopérative agricole Marché de Phalempin et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.