1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler la décision de la CNCCFP du 22 juillet 2015.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code électoral ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. François Monteagle, maître des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de M. Vincent Daumas, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
1. Par décision du 22 juillet 2015, la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP) a rejeté le compte de campagne de M. A... et MmeB..., candidats aux élections départementales des 22 et 29 mars 2015 dans le canton de Marignane (Bouches-du-Rhône), qui ont obtenu 3,54 % des suffrages exprimés lors du premier tour de scrutin. Saisi par cette commission, le tribunal administratif de Marseille, par un jugement du 26 octobre 2015 dont M. A...et Mme B...relèvent appel, les ont déclaré inéligibles pour une durée d'un an.
Sur le rejet du compte de campagne :
2. Aux termes de l'article L. 52-4 du code électoral : " Tout candidat à une élection déclare un mandataire (...). / Le mandataire recueille, pendant l'année précédant le premier jour du mois de l'élection et jusqu'à la date du dépôt du compte de campagne du candidat, les fonds destinés au financement de la campagne./ Il règle les dépenses engagées en vue de l'élection et antérieures à la date du tour de scrutin où elle a été acquise, à l'exception des dépenses prises en charge par un parti ou groupement politique (...) ". Le deuxième alinéa de l'article L. 52-6 du même code précise que le mandataire financier est tenu d'ouvrir un compte bancaire ou postal unique retraçant la totalité de ses opérations financières. Aux termes de l'article L. 52-12 du même code : " Chaque candidat ou candidat tête de liste soumis au plafonnement prévu à l'article L. 52-11 et qui a obtenu au moins 1 % des suffrages exprimés est tenu d'établir un compte de campagne retraçant, selon leur origine, l'ensemble des recettes perçues et, selon leur nature, l'ensemble des dépenses engagées ou effectuées en vue de l'élection, hors celles de la campagne officielle par lui-même ou pour son compte, au cours de la période mentionnée à l'article L. 52-4. (...) / (...) Le compte de campagne est présenté par un membre de l'ordre des experts-comptables et des comptables agréés ; celui-ci met le compte de campagne en état d'examen et s'assure de la présence des pièces justificatives requises. Cette présentation n'est pas nécessaire lorsqu'aucune dépense ou recette ne figure au compte de campagne. Dans ce cas, le mandataire établit une attestation d'absence de dépense et de recette. Cette présentation n'est pas non plus nécessaire lorsque le candidat ou la liste dont il est tête de liste a obtenu moins de 1 % des suffrages exprimés et qu'il n'a pas bénéficié de dons de personnes physiques selon les modalités prévues à l'article 200 du code général des impôts (...) ".
3. Eu égard à la finalité poursuivie par ces dispositions, l'obligation de recourir à un expert-comptable ou un comptable agréé pour la présentation du compte de campagne du candidat, comme celle de financer toute dépense effectuée en vue de la campagne exclusivement à partir du compte unique ouvert à cette seule fin par le mandataire financier désigné par le candidat, constituent des formalités substantielles auxquelles il ne peut, en principe, pas être dérogé.
4. Il résulte de l'instruction, d'une part, que le compte de campagne de M. A...et Mme B...qui s'établit à 8 338 euros en dépenses et en recettes n'a pas été présenté par un expert-comptable ou un comptable agréé et, d'autre part, que la totalité des dépenses déclarées, représentant 18,52% du plafond des dépenses fixé à 45 008 dans le canton de Marignane, ont été réglées par des tiers ou par les requérants eux-mêmes et non par le mandataire qu'ils avaient désigné le 17 février 2015. La circonstance, à la supposer établie, que les comptes de campagne d'autres candidats auraient été validés par la CNCCFP, alors qu'ils n'auraient pas été présentés par un expert-comptable et que les dépenses engagées par ces candidats auraient également été réglées par des tiers, est, en tout état de cause, sans incidence sur la réalité des manquements affectant le compte de campagne de M. A...et MmeB.... Il est, en outre, établi que trois factures concernant l'impression de 1050 affiches, pour un montant total de 1 144,60 , n'ont pas été comptabilisées dans le compte de campagne, alors que ne pouvait être regardé comme relevant de la campagne officielle que le coût d'impression et d'affichage de 224 affiches pour le canton de Marignane. Le défaut d'inscription au compte de campagne des dépenses afférentes aux quelques 800 affiches supplémentaires ne saurait être justifié par l'arrachage d'affiches apposées sur les panneaux officiels ou par la disparition de certains tracts, dont les requérants allèguent avoir été victimes. Dès lors, c'est à bon droit que la CNCCFP a rejeté le compte de campagne de M. A...et MmeB....
Sur l'inéligibilité :
5. Aux termes de l'article L. 118-3 du code électoral : " Saisi par la commission instituée par l'article L. 52-14, le juge de l'élection peut déclarer inéligible le candidat dont le compte de campagne, le cas échéant après réformation, fait apparaître un dépassement du plafond des dépenses électorales (...). / Saisi dans les mêmes conditions, le juge de l'élection peut déclarer inéligible le candidat qui n'a pas déposé son compte de campagne dans les conditions et le délai prescrits à l'article L. 52-12. / Il prononce également l'inéligibilité du candidat ou des membres du binôme de candidats dont le compte de campagne a été rejeté à bon droit en cas de volonté de fraude ou de manquement d'une particulière gravité aux règles relatives au financement des campagnes électorales./ L'inéligibilité déclarée sur le fondement des premier à troisième alinéas est prononcée pour une durée maximale de trois ans et s'applique à toutes les élections. Toutefois, elle n'a pas d'effet sur les mandats acquis antérieurement à la date de la décision (...) ".
6. En vertu des dispositions précitées de l'article L. 118-3 du code électoral et en dehors des cas de fraude, le juge de l'élection prononce l'inéligibilité d'un candidat s'il constate un manquement d'une particulière gravité aux règles de financement des campagnes électorales. Pour déterminer si un manquement est d'une particulière gravité au sens de ces dispositions, il incombe au juge de l'élection d'apprécier, d'une part, s'il s'agit d'un manquement caractérisé à une règle substantielle relative au financement des campagnes électorales et, d'autre part, s'il présente un caractère délibéré. En cas de manquement aux dispositions des articles L. 52-4 et L. 52-12 du code électoral, il incombe au juge de tenir compte de la nature de la règle méconnue, du caractère délibéré ou non du manquement, de l'existence éventuelle d'autres motifs d'irrégularité du compte, du montant des sommes en cause ainsi que de l'ensemble des circonstances de l'espèce.
7. Il résulte de ce qui précède que, compte-tenu des circonstances de l'espèce rappelées au point 4 et des montants en cause, M. A...et Mme B...doivent être regardés comme ayant commis des manquements d'une particulière gravité aux règles relatives au financement des campagnes électorales, définies par les articles L. 52-4 et L. 52-12 du code électoral. M. A...et Mme B...ne sont dès lors pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille les a déclarés inéligibles pour une durée d'un an.
D E C I D E :
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Article 1er : La requête de M. A...et de Mme B...est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. D...A...et à Mme C...B..., à la commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques et au ministre de l'intérieur.