1°) d'annuler cette ordonnance ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la loi n° 91-73 du 18 janvier 1991 ;
- le décret n° 93-522 du 26 mars 1993 ;
- le décret n° 2001-1061 du 14 novembre 2001 ;
- l'arrêté du 14 novembre 2001 fixant les conditions d'attribution de la nouvelle bonification indiciaire au titre de la mise en oeuvre de la politique de la ville dans les services du ministère de la justice ;
- l'arrêté du 4 décembre 2001 fixant par département les emplois éligibles à la nouvelle bonification indiciaire au titre de la mise en oeuvre de la politique de la ville dans les services du ministère de la justice ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme B... C..., maître des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de M. Olivier Fuchs, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano, avocat de Mme D... ;
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l'article 27 de la loi du 18 janvier 1991 portant dispositions relatives à la santé publique et aux assurances sociales : " I. - La nouvelle bonification indiciaire des fonctionnaires et des militaires instituée à compter du 1er août 1990 est attribuée pour certains emplois comportant une responsabilité ou une technicité particulières dans des conditions fixées par décret. / II. - Elle est prise en compte pour le calcul de la pension de retraite dans les conditions fixées ci-après, et elle est soumise à une cotisation pour la vieillesse. (...) ". L'article 1er du décret du 26 mars 1993 relatif aux conditions de mise en oeuvre de la nouvelle bonification indiciaire dans la fonction publique de l'Etat précise que " la nouvelle bonification indiciaire est attachée à certains emplois comportant l'exercice d'une responsabilité ou d'une technicité particulière. Elle cesse d'être versée lorsque l'agent n'exerce plus les fonctions y ouvrant droit ". L'article 1er du décret du 14 novembre 2001 relatif à la nouvelle bonification indiciaire au titre de la mise en oeuvre de la politique de la ville dans les services du ministère de la justice dispose qu'" une nouvelle bonification indiciaire au titre de la mise en oeuvre de la politique de la ville, prise en compte et soumise à cotisation pour le calcul de la pension de retraite, peut être versée mensuellement, dans la limite des crédits disponibles, aux fonctionnaires titulaires du ministère de la justice exerçant, dans le cadre de la politique de la ville, une des fonctions figurant en annexe au présent décret ". Aux termes de l'annexe à ce décret, dans sa version applicable au litige, parmi les fonctions pouvant donner lieu au versement d'une nouvelle bonification indiciaire au titre de la politique de la ville aux fonctionnaires du ministère de la justice figurent notamment les fonctions suivantes : " Fonctions de catégories A, B ou C de la protection judiciaire de la jeunesse : / 1. En centre de placement immédiat, en centre éducatif renforcé ou en foyer accueillant principalement des jeunes issus des quartiers prioritaires de la politique de la ville ; / 2. En centre d'action éducative situé dans un quartier prioritaire de la politique de la ville ; / 3. Intervenant dans le ressort territorial d'un contrat local de sécurité. ". Par ailleurs, l'arrêté du 14 novembre 2001 fixant les conditions d'attribution de la nouvelle bonification indiciaire au titre de la mise en oeuvre de la politique de la ville dans les services du ministère de la justice ouvre notamment à 36 emplois d'adjoint administratif relevant de la direction de la protection judiciaire de la jeunesse le bénéfice de la nouvelle bonification indiciaire. Enfin, l'arrêté du 4 décembre 2001 fixant par département les emplois éligibles à la nouvelle bonification indiciaire au titre de la mise en oeuvre de la politique de la ville dans les services du ministère de la justice prévoit qu'aucun emploi d'adjoint administratif n'y a droit dans le département de la Haute-Garonne.
2. Il ressort des pièces du dossier que Mme A... D... a été intégrée dans le corps des adjoints administratifs et affectée au foyer d'action éducative, devenu par la suite unité éducative d'hébergement diversifié renforcé, de Toulouse Mercadier à compter du 1er octobre 2007. Par un courrier du 22 septembre 2017, elle a sollicité du directeur interrégional sud de la protection judiciaire de la jeunesse le bénéfice de la nouvelle bonification indiciaire avec effet rétroactif à compter du 1er octobre 2007. Par un jugement du 21 décembre 2018, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 2 octobre 2017 par laquelle le directeur interrégional a refusé de faire droit à sa demande. Par une ordonnance du 15 mars 2019 contre laquelle elle se pourvoit en cassation, le président de la sixième chambre de la cour administrative d'appel de Bordeaux, statuant sur le fondement de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, a rejeté l'appel formé par Mme D... contre ce jugement.
3. Les dispositions des textes cités au point 1, selon lesquelles la nouvelle bonification indiciaire peut être versée mensuellement " dans la limite des crédits disponibles " et qui fixent un plafond maximal d'emplois susceptibles d'en bénéficier, ventilé par cadres et par départements, ne sauraient avoir ni pour objet ni pour effet de dispenser l'administration du respect du principe d'égalité. En ce qui concerne la nouvelle bonification indiciaire, ce principe exige que les agents qui occupent effectivement des emplois correspondant aux fonctions ouvrant droit à la nouvelle bonification indiciaire et qui comportent la même responsabilité ou la même technicité particulières bénéficient de la même bonification.
4. Pour rejeter le moyen soulevé par Mme D... tiré de ce que le refus de lui verser la nouvelle bonification indiciaire était fondé sur l'arrêté interministériel du 14 novembre 2001, pris en application du décret du même jour précité, qui méconnaissait le principe d'égalité, le président de la sixième chambre s'est borné à relever que cet arrêté interministériel n'avait pas fixé d'emplois d'adjoint administratif susceptibles de bénéficier de la nouvelle bonification indiciaire s'agissant du département de la Haute-Garonne. En statuant ainsi, sans rechercher si ce refus était justifié par une différence objective dans l'exercice des fonctions, en termes de responsabilité ou de technicité particulières, avec les autres agents occupant un emploi comparable dans d'autres départements, le président de la sixième chambre a entaché son ordonnance d'une erreur de droit.
5. Si la garde des sceaux, ministre de la justice, soutient en défense que la décision de refus attaquée peut trouver un fondement légal dans les dispositions du décret du 14 novembre 2001 précité, au motif que Mme D... n'établit pas qu'elle exerce ses fonctions dans un des établissements visés par l'annexe à ce décret, il ressort toutefois des pièces du dossier que Mme D... avait soutenu devant la cour qu'elle exerçait ses fonctions dans un établissement accueillant des jeunes issus des quartiers prioritaires de la politique de la ville. Le motif invoqué par la garde des sceaux, ministre de la justice, exige donc l'appréciation d'une circonstance de fait sur laquelle le juge du fond ne s'est pas prononcé, ce qui fait obstacle à ce que le juge de cassation puisse accueillir la demande de substitution de base légale.
6. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, que Mme D... est fondée à demander l'annulation de l'ordonnance qu'elle attaque.
7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
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Article 1er : L'ordonnance du 15 mars 2019 du président de la sixième chambre de la cour administrative d'appel de Bordeaux est annulée.
Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Bordeaux.
Article 3 : L'Etat versera à Mme D... la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme A... D... et au garde des sceaux, ministre de la justice