Résumé de la décision
Cette décision concerne un recours pour excès de pouvoir introduit par M. C... D... à l'encontre d'un permis de construire délivré par la commune de Suresnes pour la réhabilitation et la surélévation d’un atelier situé au 6 rue de la Cerisaie. M. D..., voisin immédiat situé au 7 rue de la Cerisaie, a contesté le jugement d'un tribunal administratif qui avait partiellement rejeté sa requête pour irrecevabilité, considérant qu'il ne justifiait pas d'un intérêt à agir. Le Conseil d'État a annulé le jugement du tribunal administratif, considérant que M. D... avait bien établi son intérêt à agir contre le permis en raison de l'impact potentiel de la construction sur sa jouissance de propriété.
Arguments pertinents
1. Caractère de voisin immédiat : M. D... est qualifié de voisin immédiat, étant donné que sa propriété se trouve de l'autre côté d'une route étroite, ce qui lui confère un intérêt à agir. Le juge a souligné que la proximité géographique est cruciale :
> "Eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d'un intérêt à agir lorsqu'il fait état devant le juge [...] d'éléments relatifs à la nature, à l'importance ou à la localisation du projet de construction."
2. Atteinte aux conditions de jouissance : M. D... a fait valoir que la construction entraînerait une vue directe sur sa terrasse, affectant ainsi ses conditions de jouissance :
> "Il apportait des éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir son intérêt pour agir contre le permis de construire litigieux."
3. Erreur de qualification des faits : Le tribunal administratif a été critiqué pour avoir inexactement qualifié les faits, en rejetant la demande sans prendre en compte les éléments présentés par M. D... :
> "Par suite, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'autre moyen du pourvoi, son jugement doit être annulé."
Interprétations et citations légales
L’affaire met en lumière l’article L. 600-1-2 du Code de l’urbanisme, qui précise les conditions d'admissibilité pour un recours contre un permis de construire. Ce texte stipule que :
- Code de l'urbanisme - Article L. 600-1-2 : "Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire [...] que si la construction [...] est de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient."
L'interprétation du Conseil d'État confirme l'importante présomption d'intérêt à agir accordée aux voisins immédiats par rapport aux atteintes potentielles à leur jouissance. En l'occurrence, la distance minimale entre les propriétés et la nature de la construction sont des critères décisifs dans l'évaluation de l'intérêt à agir. Le jugement du tribunal administratif a été annulé tout en réaffirmant la nécessité pour le tribunal d’apprécier les preuves et les éléments présentés par le requérant avec soin.
La décision ordonne la responsabilité de la commune de Suresnes pour les frais de justice, le montant étant fixé à 3000 euros conformément à l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
- Code de justice administrative - Article L. 761-1 : "Dans toutes les instances, le conseil d'Etat, les cours administratives d'appel ou les tribunaux administratifs peuvent, dans leurs décisions, mettre à la charge de l'une des parties une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens."
Ainsi, cette décision réaffirme la protection des intérêts des particuliers dans les recours portant sur des permis de construire, en posant un cadre clair pour déterminer l’intérêt à agir des voisins dans des situations similaires.