Résumé de la décision
M. A... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Paris la prescription d'une expertise pour évaluer les désordres acoustiques dans son logement, qui appartient à un immeuble géré par le ministre de la défense. Le juge des référés a fait droit à cette demande, mais la cour administrative d'appel de Paris a annulé cette ordonnance et a rejeté la demande d'expertise. M. A... s'est pourvu en cassation. La décision de la Cour suprême administrative a annulé l'arrêt de la cour d'appel, concluant que M. A... avait droit à l'expertise, et a condamné l'État à lui verser 3 000 euros pour couvrir les frais non compris dans les dépens.
Arguments pertinents
La décision repose sur plusieurs erreurs de droit commises par la cour administrative d'appel :
1. Droit à l'expertise : Le juge des référés n’était pas habilité à rejeter la demande d'expertise sur la base de l'irrecevabilité d'un recours contentieux ultérieur. En effet, comme le stipule l'article R. 532-1 du Code de justice administrative, le juge peut prescrire toute mesure utile d'expertise, sans se prononcer sur les chances de succès des prétentions sous-jacentes.
> « le juge des référés peut, sur simple requête et même en l'absence de décision administrative préalable, prescrire toute mesure utile d'expertise ou d'instruction. »
2. Engagement de la responsabilité de l'État : La cour a jugé que le fait que M. A... n’ait aucun droit à un logement attribué par le ministre de la défense ne retirait pas la possibilité d'engager la responsabilité de l'État à cause des désordres. La décision a donc erronément appliqué le principe de la responsabilité administrative, en omettant de considérer que des désordres peuvent engager la responsabilité de l'État même en l'absence de droit à un logement.
> « la seule circonstance que le ministre de la défense n'ait pas été tenu d'attribuer un logement à M. A... ne faisait pas obstacle à ce que la responsabilité de l'Etat pût être engagée. »
Interprétations et citations légales
L'analyse des textes juridiques applicables révèle plusieurs points d'interprétation cruciaux :
- Code de justice administrative - Article L. 511-1 : Ce texte établit que le juge des référés agit dans un cadre provisoire et indique que les décisions se prennent rapidement, ce qui justifie son aptitude à statuer, même en l'absence de décision administrative préalable.
- Code de justice administrative - Article R. 532-1 : La portée de cette disposition est fondamentale pour permettre au juge des référés de prescrire des expertises nécessaires à la compréhension d’un litige, sans préjuger de l’issue du contentieux principal. Cette distinction est essentielle pour le bon fonctionnement des mesures provisoires dans le cadre de la justice administrative.
Ces interprétations soulignent que le rôle du juge des référés est de garantir les droits des requérants en matière de protection temporaire, indépendamment de l'existence d'une reconnaissance formelle de droits à la charge de l'État. En conclusion, la décision a rectifié des erreurs de droit et réaffirmé la fonction des mesures préventives dans la jurisprudence administrative.