Résumé de la décision
M. A... a été recruté par contrat à durée déterminée dans le ministère de la Défense et a exercé des fonctions d’ingénieur cadre. À l'échéance de son contrat en 2013, il a été radié, mais a contesté cette radiation en invoquant le non-respect de ses droits au contrat à durée indéterminée, au motif qu'il avait acquis une ancienneté suffisante. Le tribunal administratif a d'abord annulé la radiation, mais cette décision a été infirmée par la cour administrative d’appel de Versailles. M. A... a alors formé un pourvoi en cassation. Le Conseil d'État a annulé l'arrêt de la cour administrative d'appel, considérant que celle-ci avait commis une erreur de droit en ne vérifiant pas si M. A... avait effectué des fonctions identiques malgré le changement d'appellation de son emploi. Le Conseil d'État a également condamné l'État à lui verser 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Arguments pertinents
La décision repose sur les arguments suivants :
1. Sur l'ancienneté et le droit au contrat à durée indéterminée : Selon l'article 6 bis de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984, un agent contractuel qui justifie de six ans de services effectifs peut prétendre à un contrat à durée indéterminée. Le Conseil d'État a noté que la cour d'appel n'a pas évalué si les fonctions exercées par M. A... étaient identiques durant cette période, une omission considérée comme une "erreur de droit".
2. Responsabilité de l'État : En raison de cette erreur, M. A... est fondé à demander l'annulation de l'arrêt de la cour, ce qui entraîne la mise à la charge de l'État des frais de justice.
Interprétations et citations légales
1. Article 6 bis de la loi n° 84-16 (loi du 11 janvier 1984) :
- "Tout contrat conclu ou renouvelé en application des articles 4 et 6 avec un agent qui justifie d'une durée de services publics de six ans [...] est conclu pour une durée indéterminée." Ce texte établit le droit des agents publics à un contrat indéfini sous certaines conditions de durée et de continuité dans un même ministère.
2. Création d’un précédent :
- Le Conseil d'État souligne que même s'il y a eu changement d'appellation de l'emploi, cela ne doit pas automatically entraîner la perte du droit au CDI si les fonctions sont demeurées identiques. Cela garantit une interprétation favorable pour les agents dans la mesure où leurs rôles et responsabilités effectives devraient primer sur la nommée hiérarchique, comme établi dans le jugement : "il peut néanmoins bénéficier d'un contrat à durée indéterminée s'il est établi qu'il a en réalité exercé, en dépit des indications figurant sur les contrats, des fonctions identiques".
Conclusion
La décision du Conseil d'État clarifie que pour l'application de l'article 6 bis de la loi sur les agents contractuels de l’État, l'identité des fonctions doit primer sur les changements d'appellation dans la rédaction des contrats. Par conséquent, cette interprétation des textes de loi renforce les droits des agents contractuels sur leur statut et tempère les effets d'éventuels changements administratifs.