Résumé de la décision
Dans cette décision, le Conseil d'Etat statue sur la demande de M. B..., réserviste, visant à l'annulation d'une décision implicite du Premier ministre qui refusait de prendre un décret pour appliquer la prime de fidélité prévue par la loi n° 99-894 du 22 octobre 1999 portant organisation de la réserve militaire et du service de défense. Le Conseil d'Etat annule la décision implicite, enjoint le Premier ministre de prendre le décret requis dans un délai de six mois, et accorde à M. B... la somme de 3.000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Arguments pertinents
1. Obligation réglementaire : Le Conseil d'Etat souligne que, conformément à l'article 21 de la Constitution, le Premier ministre a l'obligation de prendre les mesures nécessaires à l'application de la loi dans un délai raisonnable. En l'espèce, il a méconnu cette obligation en ne prenant pas le décret d'application prévu pour la prime de fidélité des réservistes.
> "L'exercice du pouvoir réglementaire comporte [...] l'obligation de prendre dans un délai raisonnable les mesures qu'implique nécessairement l'application de la loi."
2. Nature des dispositions légales : Le Conseil d'Etat rappelle que l'article L. 4251-1 du code de la défense impose explicitement la prise d'un décret pour définir les conditions d'attribution de la prime de fidélité, et ne laisse pas au pouvoir réglementaire le soin de décider si une telle mesure doit être adoptée. La décision de refus implicite du Premier ministre est ainsi illégale.
> "Ces dispositions [...] impliquent nécessairement que soit pris, pour l'application du second alinéa, un décret fixant les conditions et modalités d'attribution de la prime."
3. Injonction de mise en œuvre : Statuant sur l'annulation de la décision implicite, le Conseil d'Etat enjoint le Premier ministre à agir, ce qui est conforme à l'article L. 911-1 du code de justice administrative stipulant que la juridiction peut prescrire la mesure d'exécution dans un sens déterminé.
> "Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public [...] prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution."
Interprétations et citations légales
Les textes de loi appliqués dans cette décision sont interprétés comme créant une obligation pour le pouvoir exécutif d'agir, et non pas comme une simple faculté :
1. Code de la défense - Article L. 4251-1 : Cet article stipule que les réservistes bénéficieront de la solde et de la prime de fidélité, conditionnant ainsi le décret à une obligation d'exécution de la part du Premier ministre. La mise en œuvre de la prime de fidélité dépend d'un acte réglementaire qui doit être pris sans délai.
2. Code de justice administrative - Article L. 761-1 : Cet article prévoit la possibilité de condamner l'Etat à verser une somme pour les frais de procédure. Dans ce cas, le Conseil d'Etat a jugé que les circonstances justifiaient l'octroi de 3 000 euros à M. B... pour couvrir ses frais juridiques.
La décision du Conseil d'Etat sert ainsi d'exemple de la manière dont les obligations réglementaires du gouvernement peuvent être imposées par voie judiciaire, et souligne l'importance de la diligence dans l'exécution des lois.