1°) d'annuler ce jugement, y compris en tant qu'il porte sur sa condamnation au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
2°) de faire droit à sa protestation ;
3°) de condamner la liste #KO2020 à une amende de 3 600 euros pour injure publique ;
4°) de rappeler à l'ordre la liste #KO2020 pour comportement illégal.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code électoral ;
- la loi du 29 juillet 1881 ;
- la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 ;
- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020,
- le décret n° 2020-267 du 17 mars 2020 ;
- la décision du Conseil constitutionnel n° 2020-849 QPC du 17 juin 2020 ;
- le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Jonathan Bosredon, conseiller d'Etat,
- les conclusions de Mme Karin Ciavaldini, rapporteure publique ;
Considérant ce qui suit :
1. M. C... relève appel du jugement du 16 novembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa protestation tendant à l'annulation des opérations électorales qui se sont déroulées le 15 mars 2020 pour l'élection des conseillers municipaux et communautaires de la commune de Poissy (Yvelines) au terme desquelles la liste conduite par M. B... a recueilli 6 774 voix, soit 75,6 % des suffrages exprimés, la liste conduite par Mme D... 1 535 voix, soit 17,13 % des suffrages exprimés, la liste conduite par Mme F... 358 voix, soit 3,99 % des suffrages exprimés, et la liste conduite par M. G... 293 voix, soit 3,27 % des suffrages exprimés.
Sur la régularité du jugement :
2. Il ressort du jugement attaqué qu'il répond, en énonçant les considérations de droit et de fait sur lesquelles il se fonde, à l'ensemble des griefs soulevés par M. C... devant le tribunal administratif au soutien de ses conclusions. Ainsi, ce jugement est suffisamment motivé, contrairement à ce qui est soutenu.
Sur les conclusions tendant à l'annulation du scrutin :
3. L'émergence d'un nouveau coronavirus, responsable de la maladie à coronavirus 2019 ou covid-19 et particulièrement contagieux, a été qualifiée d'urgence de santé publique de portée internationale par l'Organisation mondiale de la santé le 30 janvier 2020, puis de pandémie le 11 mars 2020. La propagation du virus sur le territoire français a conduit le ministre des solidarités et de la santé à prendre, à compter du 4 mars 2020, des mesures de plus en plus strictes destinées à réduire les risques de contagion. Dans ce contexte, le Premier ministre a adressé à l'ensemble des maires le 7 mars 2020 une lettre présentant les mesures destinées à assurer le bon déroulement des élections municipales et communautaires prévues les 15 et 22 mars 2020. Ces mesures ont été précisées par une circulaire du ministre de l'intérieur du 9 mars 2020 relative à l'organisation des élections municipales des 15 et 22 mars 2020 en situation d'épidémie de coronavirus covid-19, formulant des recommandations relatives à l'aménagement des bureaux de vote et au respect des consignes sanitaires, et par une instruction de ce ministre, du même jour, destinée à faciliter l'exercice du droit de vote par procuration. Après consultation par le Gouvernement du conseil scientifique mis en place pour lui donner les informations scientifiques utiles à l'adoption des mesures nécessaires pour faire face à l'épidémie de covid-19, les 12 et 14 mars 2020, le premier tour des élections municipales a eu lieu comme prévu le 15 mars 2020. A l'issue du scrutin, les conseils municipaux ont été intégralement renouvelés dans 30 143 communes ou secteurs. Le taux d'abstention a atteint 55,34 % des inscrits, contre 36,45 % au premier tour des élections municipales de 2014.
4. Au vu de la situation sanitaire, l'article 19 de la loi du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19 a reporté le second tour des élections, initialement fixé au 22 mars 2020, au plus tard en juin 2020 et prévu que : " Dans tous les cas, l'élection régulière des conseillers municipaux et communautaires, des conseillers d'arrondissement, des conseillers de Paris et des conseillers métropolitains de Lyon élus dès le premier tour organisé le 15 mars 2020 reste acquise, conformément à l'article 3 de la Constitution ". Ainsi que le Conseil constitutionnel l'a jugé dans sa décision n° 2020-849 QPC du 17 juin 2020, ces dispositions n'ont ni pour objet ni pour effet de valider rétroactivement les opérations électorales du premier tour ayant donné lieu à l'attribution de sièges et ne font ainsi pas obstacle à ce que ces opérations soient contestées devant le juge de l'élection.
5. En premier lieu, aux termes de l'article L. 262 du code électoral, applicable aux communes de mille habitants et plus : " Au premier tour de scrutin, il est attribué à la liste qui a recueilli la majorité absolue des suffrages exprimés un nombre de sièges égal à la moitié du nombre des sièges à pourvoir, arrondi, le cas échéant, à l'entier supérieur lorsqu'il y a plus de quatre sièges à pourvoir et à l'entier inférieur lorsqu'il y a moins de quatre sièges à pourvoir. Cette attribution opérée, les autres sièges sont répartis entre toutes les listes à la représentation proportionnelle suivant la règle de la plus forte moyenne, sous réserve de l'application des dispositions du troisième alinéa ci-après. / Si aucune liste n'a recueilli la majorité absolue des suffrages exprimés au premier tour, il est procédé à un deuxième tour (...) ".
6. Ni par ces dispositions, ni par celles de la loi du 23 mars 2020 le législateur n'a subordonné à un taux de participation minimal la répartition des sièges au conseil municipal à l'issue du premier tour de scrutin dans les communes de mille habitants et plus, lorsqu'une liste a recueilli la majorité absolue des suffrages exprimés. Le niveau de l'abstention n'est ainsi, par lui-même, pas de nature à remettre en cause les résultats du scrutin, s'il n'a pas altéré, dans les circonstances de l'espèce, sa sincérité.
7. Pour soutenir que le niveau d'abstention constaté lors des opérations électorales du 15 mars 2020 à Poissy a été de nature à remettre en cause les résultats du scrutin, M. C... fait valoir que l'abstention a été particulièrement importante par rapport aux scrutins antérieurs et que de nombreuses personnes fragiles ou âgées ont été dissuadées de voter.
8. Toutefois, il ne résulte pas de l'instruction que l'abstention aurait été significativement plus forte à Poissy qu'au niveau national, le taux de participation lors du scrutin du 15 mars 2020 s'élevant à 41,80 %, voisin du taux de 40,69 % mesuré au niveau départemental et du taux de 44,66 % mesuré pour l'ensemble du territoire. Il ne résulte pas davantage de l'instruction que l'abstention aurait été plus forte parmi les personnes âgées ou fragiles de la commune qu'au niveau national, ni, en tout état de cause, qu'il existerait un lien de causalité entre cette abstention et la répartition des suffrages entre les listes en présence. Dans ces conditions, M. C... n'invoquant aucune autre circonstance relative au déroulement de la campagne électorale ou du scrutin dans la commune qui montrerait, en particulier, qu'il aurait été porté atteinte au libre exercice du droit de vote ou à l'égalité entre les candidats, le niveau de l'abstention constatée ne peut être regardé comme ayant altéré la sincérité du scrutin.
9. En deuxième lieu, le grief tiré de ce que le déroulement du scrutin aurait été entaché d'irrégularités est dépourvu des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé et si M. C... soutient qu'il aurait fait l'objet, de la part de la municipalité, d'un traitement discriminatoire et d'une censure, il n'indique pas en quoi les faits ainsi allégués auraient eu une incidence sur la régularité des opérations électorales qu'il conteste.
10. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa protestation dirigée contre les opérations électorales qui se sont déroulées le 15 mars 2020 à Poissy
Sur les conclusions tendant à ce qu'il soit prononcé une amende pour injure publique :
11. Eu égard aux caractéristiques du contentieux électoral, les conclusions tendant à la condamnation de la liste conduite par M. B... à une amende pour injure publique ne sont pas recevables à l'occasion d'un recours présenté en cette matière. Il en va de même de celles tendant au rappel à l'ordre la liste #KO2020 pour comportement illégal. Par suite, les conclusions présentées par M. C... à ces fins, au demeurant pour la première fois en appel, ne peuvent qu'être rejetées.
Sur les conclusions relatives aux frais exposés et non compris dans les dépens :
12. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".
13. Eu égard à la situation économique personnelle de M. C..., c'est à tort que le tribunal administratif de Versailles a condamné ce dernier à verser la somme globale de 1 000 euros à M. A... B... et aux membres élus de la liste conduite par ce dernier en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. M. C... est par suite fondé à demander l'annulation de l'article 2 du jugement qu'il attaque.
14. Il n'y a pas lieu non plus, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux demandes présentées en appel par M. B... sur ce même fondement.
D E C I D E :
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Article 1er : L'article 2 du jugement du 16 novembre 2020 du tribunal administratif de Versailles est annulé.
Article 2 : Les conclusions présentées, devant le tribunal administratif, par M. B... et ses colistiers, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. C... et les conclusions présentées en appel par M. B... et ses colistiers sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. E... C..., M. A... B..., premier dénommé pour l'ensemble des défendeurs, et au ministre de l'intérieur.