Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le traité instituant la Communauté européenne ;
- le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;
- l'accord entre la Communauté européenne et ses Etats membres, d'une part, et la Confédération suisse, d'autre part, sur la libre circulation des personnes, fait à Luxembourg le 21 juin 1999, ensemble la décision n° 1/2012 du 31 mars 2012 du comité mixte ;
- le règlement (CE) n° 1408/71 du Conseil du 14 juin 1971 ;
- le règlement (CE) n° 883/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de la sécurité sociale ;
- l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Nicolas Agnoux, maître des requêtes,
- les conclusions de Mme Marie-Astrid Nicolazo de Barmon, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de Mme B...;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que MmeB..., qui réside fiscalement en France, a été assujettie au titre des années 2011, 2012 et 2013 à la contribution sociale généralisée (CSG) et à la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS) à raison des pensions de droit suisse qu'elle perçoit en tant qu'ayant-droit de son conjoint décédé. Par un jugement du 12 avril 2016, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître la demande de Mme B... tendant à la décharge de la CSG de l'année 2011 et rejeté le surplus de sa demande en décharge des autres impositions. Par un arrêt du 19 octobre 2017, la cour administrative d'appel de Nancy, après avoir annulé ce jugement en tant qu'il rejette partiellement sa demande comme portée devant une juridiction incompétente, a rejeté cette partie de sa demande ainsi que le surplus des conclusions de sa requête. Mme B...se pourvoit en cassation contre cet arrêt, dont elle doit être regardée comme demandant l'annulation de l'article 2 qui rejette sa demande en décharge portant sur la CSG due au titre de l'année 2011 ainsi que sa requête tendant à la décharge du surplus des impositions en litige.
2. Les dispositions du règlement (CEE) n° 1408/71 du Conseil du 14 juin 1971 relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté, applicable avant le 1er avril 2012 aux relations entre la Confédération suisse et les Etats membres de l'Union européenne en vertu de l'accord sur la libre circulation des personnes du 21 juin 1999, ont été reprises par le règlement (CEE) n° 883/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 portant sur la coordination des systèmes de sécurité sociale, applicable depuis le 1er avril 2012 aux relations entre la Confédération suisse et les Etats membres de l'Union européenne en vertu de la décision n° 1/2012 du 31 mars 2012 du comité mixte.
3. D'une part, en application de l'article 13 du règlement n° 1408/71, dont les dispositions sont reprises à l'article 11 du règlement n° 883/2004, les personnes qui relèvent du champ du règlement ne sont soumises qu'à la législation d'un seul Etat membre, déterminée selon les règles définies aux articles 13 à 17 bis du règlement n° 1408/71, reprises aux articles 11 à 16 du règlement n° 883/2004, ce qui exclut dès lors toute possibilité de cumul de plusieurs législations nationales pour une même période et, de manière corollaire, qu'un même revenu soit exposé au paiement de doubles cotisations.
4. D'autre part, en application de l'article 27 du règlement n° 1408/71, le titulaire de pensions dues au titre de législations de deux Etats membres, dont celle de l'Etat membre de résidence, et qui a droit aux prestations au titre de la législation de ce dernier Etat membre, obtient ces prestations de l'institution du lieu de résidence et à la charge de cette institution, comme si l'intéressé était titulaire d'une pension due au titre de la seule législation de ce dernier Etat membre. Si l'article 33, paragraphe 1, du règlement n° 1408/71 autorise l'Etat membre de résidence à opérer, sur la pension qu'il verse à un assuré également bénéficiaire d'une pension au titre de la législation d'un autre Etat membre, des retenues de cotisations pour la couverture de prestations de maladie et de maternité dont il assure le service, le paragraphe 2 du même article interdit à l'Etat membre de résidence au titre de la législation duquel aucune pension n'est due d'exiger, du fait de la résidence sur son territoire du titulaire d'une pension servie au titre de la législation d'un autre Etat membre, de recouvrer des cotisations pour la couverture de prestations de maladie et de maternité, lorsque ces dernières sont prises en charge par l'institution de cet autre État membre en application de l'article 28 bis. Ces dispositions sont reprises respectivement à l'article 23, aux 1 et 2 de l'article 30 et à l'article 25 du règlement n° 883/2004.
5. Il résulte de ces dispositions telles qu'interprétées par la Cour de justice de l'Union européenne, en particulier dans son arrêt du 10 mai 2001 Rundgren (aff. C-389/99), que le principe général, qui découle du règlement n° 1408/71, dans sa version modifiée et mise à jour par le règlement n° 2001/83, tel que modifié par le règlement n° 3096/95, et dont l'article 33 de ce règlement constitue une application, selon lequel le titulaire d'une pension ou d'une rente ne peut pas se voir réclamer, du fait de sa résidence sur le territoire d'un Etat membre, des cotisations d'assuré obligatoire pour la couverture de prestations prises en charge par une institution d'un autre Etat membre, s'oppose à ce que l'Etat membre sur le territoire duquel réside le titulaire d'une pension ou d'une rente exige le paiement par celui-ci de cotisations ou retenues équivalentes prévues par sa législation pour la couverture de prestations de vieillesse, d'incapacité de travail et de chômage, lorsque l'intéressé bénéficie de prestations ayant un objet analogue prises en charge par l'institution de l'Etat membre compétent en matière de pension.
6. Cependant, la Cour de justice a également dit pour droit, dans son arrêt du 18 juillet 2006 Nikula (aff. C-50/05) que l'article 33, paragraphe 1, du règlement n° 1408/71 ne s'oppose pas à ce que, pour la détermination de l'assiette des cotisations d'assurance maladie appliquées dans l'Etat membre de résidence du titulaire de pensions versées par des institutions de cet Etat membre compétent pour servir des prestations en vertu de l'article 27 de ce règlement, soient comprises dans cette assiette, outre les pensions perçues dans l'Etat membre de résidence, des pensions versées par des institutions d'un autre État membre, dans la mesure où ces cotisations ne dépassent pas le montant des pensions servies dans l'Etat membre de résidence. Aux termes du même arrêt, toutefois, l'article 39 du traité instituant la Communauté européenne s'oppose à ce que le montant des pensions perçues d'institutions d'un autre État membre soit pris en compte si des cotisations ont déjà été versées dans cet autre Etat membre sur les revenus d'activité perçus dans ce dernier État membre. Il appartient aux intéressés d'établir la réalité de ces versements de cotisations antérieurs. Il résulte de cet arrêt et notamment de son point 33 que la législation de l'Etat de résidence ne doit pas avoir pour effet de pénaliser le titulaire de pension qui se serait déjà acquitté, durant ses années d'activité dans un Etat membre autre que l'Etat de résidence, des cotisations destinées au financement des prestations servies aux pensionnés, par rapport à celui qui serait demeuré dans ce dernier Etat pour y exercer la totalité de son activité.
7. Il résulte des dispositions du règlement n° 1408/71 et du règlement n° 883/2004 citées aux points 3 et 4, telles qu'interprétées par la Cour de justice dans sa jurisprudence rappelée aux points 5 et 6, que le principe général selon lequel l'Etat membre de résidence ne peut exiger le paiement de cotisations vieillesse lorsque l'assuré bénéficie d'une pension versée par un autre Etat membre, ne trouve à s'appliquer que sous réserve que l'assuré ne bénéficie pas également d'une pension versée par l'Etat membre de résidence. Mme B...ne peut donc utilement invoquer le bénéfice de ce principe, dès lors qu'il ressort des pièces soumises aux juges du fond qu'elle était également titulaire de pensions de vieillesse de droit français. En cette qualité, elle était, en vertu du f du 2 de l'article 13 du règlement n° 1408/71, reprises au e du 3 de l'article 11 du règlement n° 883/2004, soumise à la législation française au sens et pour l'application de ces règlements, la seule circonstance qu'elle soit également titulaire d'une pension de vieillesse de droit suisse acquise au titre de l'activité professionnelle accomplie par son conjoint dans ce pays étant sans incidence au regard des règles de détermination de la législation applicable définies aux articles 13 à 17 bis du règlement n° 1408/71, reprises aux articles 11 à 16 du règlement n° 883/2004. Par suite, elle n'est pas fondée à soutenir que les impositions en litige auraient été recouvrées en méconnaissance du principe d'unicité de législation ni du principe prohibant les doubles cotisations. Enfin, en se bornant à faire valoir que les revenus d'activité de son époux ont été assujettis par la Suisse à des cotisations vieillesse, la requérante n'établit pas qu'elle aurait été placée dans une situation moins favorable que celle des assurés demeurés en France pour y exercer la totalité de leur activité, susceptible de caractériser une entrave à la libre circulation des travailleurs garantie par l'article 39 du traité instituant la Communauté européenne devenu l'article 45 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne et, par application de la règle énoncée par l'arrêt Nikula, de faire obstacle à l'assujettissement de ses pensions de vieillesse de droit suisse aux prélèvements en litige.
8. Ces motifs dont l'examen n'implique l'appréciation d'aucune circonstance de fait doivent être substitués aux motifs retenus par l'arrêt attaqué de la cour administrative d'appel, dont ils justifient légalement le dispositif.
9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à demander l'annulation de l'article 2 de l'arrêt qu'elle attaque. Par suite, ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi de Mme B...est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme A...B...et au ministre de l'action et des comptes publics.