Résumé de la décision
La décision concerne un pourvoi de M. et Mme A... contre un arrêt de la cour administrative d'appel de Douai, qui avait jugé qu'ils ne pouvaient pas se prévaloir d'un droit de séjour en France en raison de la nature de leur contrat de travail, considéré comme relevant d'une politique d'insertion sociale. Le Conseil d'État a annulé cet arrêt, estimant que la cour avait commis une erreur de droit en ne se concentrant pas sur la nature réelle et effective des activités exercées par M. et Mme A..., et a renvoyé l'affaire à la cour administrative d'appel de Douai. De plus, il a été décidé que l'État verserait 3 000 euros à l'avocat des requérants au titre de l'aide juridictionnelle.
Arguments pertinents
1. Droit de séjour des citoyens de l'Union : Le Conseil d'État rappelle que, selon l'article 3 du traité sur l'Union européenne, l'Union garantit la libre circulation des personnes. L'article 45 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne et l'article 7 de la directive 2004/38/CE stipulent que tout citoyen de l'Union a le droit de séjourner dans un autre État membre s'il y exerce une activité professionnelle.
> "Tout citoyen de l'Union a le droit de séjourner sur le territoire d'un autre Etat membre pour une durée de plus de trois mois : / a) s'il est un travailleur salarié ou non salarié dans l'Etat membre d'accueil." (Directive 2004/38/CE - Article 7)
2. Interprétation de la notion de travailleur : La Cour de justice de l'Union européenne a précisé que la notion de travailleur doit inclure toute personne exerçant une activité réelle et effective, excluant les activités marginales. Le Conseil d'État souligne que la cour administrative d'appel a erré en se basant sur l'objectif d'insertion sociale plutôt que sur la nature des activités exercées.
> "La relation de travail est caractérisée par la circonstance qu'une personne accomplit pendant un certain temps, en faveur d'une autre et sous la direction de celle-ci, des prestations en contrepartie desquelles elle touche une rémunération."
Interprétations et citations légales
1. Droit au séjour : Le droit au séjour des citoyens de l'Union est encadré par le Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, notamment par l'article L. 121-1, qui stipule que tout citoyen de l'Union a le droit de séjourner en France pour une durée supérieure à trois mois s'il exerce une activité professionnelle.
> "Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, tout citoyen de l'Union européenne (...) a le droit de séjourner en France pour une durée supérieure à trois mois (...) s'il exerce une activité professionnelle en France." (Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile - Article L. 121-1)
2. Insertion par l'activité économique : L'article L. 5132-1 du Code du travail définit l'insertion par l'activité économique, mais le Conseil d'État souligne que cela ne doit pas être un obstacle à la reconnaissance du droit de séjour si les activités exercées sont réelles et effectives.
> "L'insertion par l'activité économique a pour objet de permettre à des personnes sans emploi, rencontrant des difficultés sociales et professionnelles particulières, de bénéficier de contrats de travail en vue de faciliter leur insertion professionnelle." (Code du travail - Article L. 5132-1)
En conclusion, la décision du Conseil d'État met en lumière l'importance de l'examen des activités réelles et effectives des travailleurs, indépendamment de la nature sociale de leur contrat, pour déterminer leur droit de séjour en France.