2°) d'annuler l'ordonnance du 29 mai 2019 ;
3°) de faire droit à sa demande de première instance ;
4°) de mettre à la charge de l'OFII le versement d'une somme de 2 000 euros au bénéfice de MeA..., son conseil, qui renoncera à percevoir la part contributive de l'Etat, au titre des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que l'ordonnance attaquée :
- a été prise au terme d'une procédure irrégulière au regard du principe du contradictoire faute que lui ait été communiqué le document établissant qu'il aurait été en fuite ;
- est entachée d'erreur de droit en tant qu'elle juge que la circonstance que l'OFII ne lui a pas permis de présenter ses observations, avant de suspendre le bénéfice des conditions matérielles d'accueil, est, par elle-même, sans rapport avec l'atteinte au droit d'asile qui a motivé sa demande ;
- est entachée d'erreur manifeste d'appréciation et d'inexactitude matérielle en tant qu'elle retient qu'il a été en fuite, alors, d'une part, que la fiche produite relative à son obligation de se présenter pendant son assignation à résidence présente des incohérences la privant de valeur probante et, d'autre part, qu'il a bénéficié le 14 mars 2019, avant l'expiration du délai de transfert qui avait été fixé au 27 octobre 2019, d'une requalification de sa demande d'asile en procédure normale.
Par un mémoire en défense, enregistré le 4 juillet 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'OFII conclut au rejet de la requête de M.B.... Il soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés et que la condition d'urgence n'est pas remplie.
La requête a été communiquée au ministre de l'intérieur qui n'a pas produit d'observations.
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- le règlement (UE) n° 604/2013 du parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- la directive n° 2013/33/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 2018-778 du 10 septembre 2018 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, M. B... et, d'autre part, le directeur de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ;
Vu le procès-verbal de l'audience publique du 5 juillet 2019 à 10 heures au cours de laquelle ont été entendus :
- Me Pinatel, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de M. B... ;
- la représentante de l'OFII ;
et à l'issue de laquelle le juge des référés a clos l'instruction ;
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures ".
2. Il résulte de l'instruction que M.B..., ressortissant guinéen né le 1er janvier 1992, a enregistré le 12 février 2018, après être entré sur le territoire français en provenance d'Italie, une demande d'asile et a fait l'objet, le 27 avril 2018, d'une décision implicite des autorités italiennes acceptant de le reprendre en charge. A partir de début décembre 2018, les conditions matérielles d'accueil, dont il bénéficiait depuis l'enregistrement initial de sa demande, ne lui ont plus été versées par l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII). M. B...a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Marseille, sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'enjoindre sous astreinte de 100 euros par jour de retard, au directeur de l'OFII de procéder au rétablissement, dans un délai de sept jours, des conditions matérielles d'accueil. Il relève appel de l'ordonnance du 29 mai 2019 par laquelle cette demande a été rejetée.
Sur les dispositions applicables et l'office du juge :
3. Aux termes de l'article L. 744-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction résultant de la loi du 29 juillet 2015 relative à la réforme du droit d'asile et applicable en l'espèce dès lors que les conditions matérielles d'accueil ont été accordées avant le 1er janvier 2019 : " Le bénéfice des conditions matérielles d'accueil peut être : / 1° Suspendu si, sans motif légitime, le demandeur d'asile (...) n'a pas respecté l'obligation de se présenter aux autorités (...) ".
4. Dans le cas où les conditions matérielles d'accueil ont été suspendues sur le fondement de l'article L. 744-8, dans sa rédaction issue de la loi du 29 juillet 2015, le demandeur peut, notamment dans l'hypothèse où la France est devenue responsable de l'examen de sa demande d'asile, en demander le rétablissement. Il appartient alors à l'Office français de l'immigration et de l'intégration, pour statuer sur une telle demande de rétablissement, d'apprécier la situation particulière du demandeur à la date de la demande de rétablissement au regard notamment de sa vulnérabilité, de ses besoins en matière d'accueil ainsi que, le cas échéant, des raisons pour lesquelles il n'a pas respecté les obligations auxquelles il avait consenti au moment de l'acceptation initiale des conditions matérielles d'accueil.
5. Si la privation du bénéfice des mesures prévues par la loi afin de garantir aux demandeurs d'asile des conditions matérielles d'accueil décentes, jusqu'à ce qu'il ait été statué sur leur demande, est susceptible de constituer une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté fondamentale que constitue le droit d'asile, le caractère grave et manifestement illégal d'une telle atteinte s'apprécie en tenant compte des moyens dont dispose l'autorité administrative compétente et de la situation du demandeur. Ainsi, le juge des référés ne peut faire usage des pouvoirs qu'il tient de l'article L. 521-2 du code de justice administrative en adressant une injonction à l'administration que dans le cas où, d'une part, le comportement de celle-ci fait apparaître une méconnaissance manifeste des exigences qui découlent du droit d'asile et où, d'autre part, il résulte de ce comportement des conséquences graves pour le demandeur d'asile, compte tenu notamment de son âge, de son état de santé ou de sa situation familiale. Il incombe au juge des référés d'apprécier, dans chaque situation, les diligences accomplies par l'administration en tenant compte des moyens dont elle dispose ainsi que de l'âge, de l'état de santé et de la situation familiale de la personne intéressée.
Sur la demande en référé :
6. Il résulte de l'instruction que le bénéfice des conditions matérielles d'accueil a été suspendu par l'OFII, en application des dispositions précitées de l'article L. 744-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, à la suite de la réception d'une fiche intitulée " pointage assignation à résidence Asile-Dublin " et d'un formulaire intitulé " informations relatives à la prolongation des délais de transfert ", rédigés par la préfecture des Bouches-du-Rhône pour M. B...et établissant, selon l'OFII, que celui-ci aurait été déclaré en fuite faute de s'être présenté à des convocations entre le 23 août et le 24 septembre 2018.
7. Toutefois, les deux documents visés au point précédent ne sont ni datés ni signés. La fiche, dont il a été indiqué par l'OFII lors de l'audience de référé qu'elle correspondait à une simple retranscription, se borne à mentionner " PV " dans la colonne " signature ", à propos des huit dates de convocation qui y figurent et qui sont entachées, pour six d'entre elles, d'erreur matérielle quant au mois concerné. Et le formulaire indique seulement que M. B...aurait pris la fuite si bien que son délai de transfert aurait été prolongé jusqu'au 27 octobre 2019.
8. En revanche, il est constant que, par une lettre du 7 novembre 2018, adressée à la préfecture des Bouches-du-Rhône, M. B...a demandé un formulaire de demande d'asile au motif qu'il s'était présenté à toutes les convocations auxquelles il avait été soumis sans que son transfert ne soit mis en oeuvre dans le délai de six mois dont disposait les autorités françaises pour y procéder. Le formulaire lui a été envoyé le 10 décembre 2018 par cette préfecture puis complété par l'intéressé et retourné à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides qui a déclaré la demande complète le 27 décembre 2018, permettant, par la suite, à M. B...d'obtenir une attestation de demande d'asile en procédure normale.
9. Ainsi, en l'absence de toute justification donnée par l'OFII ou par le ministre de l'intérieur, qui n'a pas répondu à l'invitation qui lui a été faite de présenter des observations, sur les raisons autres que l'incapacité de l'administration à organiser le transfert de M. B...vers l'Italie avant le 27 octobre 2018, qui ont pu expliquer que celui-ci ait obtenu la requalification de sa demande d'asile en procédure normale, il n'est pas établi que M. B...n'aurait pas été présent lors des convocations et devait être regardé comme étant en fuite.
10. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de sa requête, que M.B..., qui a contesté en vain, auprès de l'OFII, la suspension des conditions matérielles d'accueil à plusieurs reprises depuis le mois de janvier où il a eu notification d'un premier courrier en ce sens et qui soutient sans être contesté être sans ressources, est fondé à soutenir que c'est à tort que le juge des référés du tribunal administratif de Marseille a estimé que le refus de l'OFII de rétablir le bénéfice des conditions matérielles d'accueil ne portait pas une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté fondamentale que constitue le droit d'asile et a, par voie de conséquence, rejeté ses conclusions aux fins d'injonction. Il n'y a pas lieu, en revanche, d'assortir une telle injonction d'une astreinte.
11. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, sans qu'il soit besoin d'admettre M. B...au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
O R D O N N E :
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Article 1er : L'ordonnance n° 1904589 du 29 mai 2019 du juge des référés du tribunal administratif de Marseille est annulée.
Article 2 : Il est enjoint à l'Office français de l'immigration et de l'intégration de reprendre le versement à M. B...de l'allocation pour demandeur d'asile, dans un délai de sept jours à compter de la notification de la présente ordonnance.
Article 3 : L'Etat versera la somme de 2 000 euros au requérant au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente ordonnance sera notifiée à M. C...B...et à l'Office français de l'immigration et de l'intégration.