- elle est recevable à contester la décision du 22 novembre 2017 par voie d'exception dès lors que le principe de l'autonomie procédurale de l'Etat membre ne saurait avoir pour effet de laisser perdurer une violation du droit de l'Union européenne ;
- le délai de deux mois lui est inopposable en ce qu'elle n'a été informée ni de la délivrance d'une autorisation de mise sur le marché générique ni de la procédure à l'origine de cette décision ;
- la condition d'urgence est remplie dès lors que, d'une part, les décisions attaquées portent atteinte aux intérêts économiques de la Société Effik, d'autre part, l'absence de bioéquivalence entre les deux spécialités fait courir un risque pour la santé publique et, enfin, il est nécessaire de faire cesser la violation du droit de l'Union européenne ;
- il existe un doute sérieux quant à la légalité des décisions contestées ;
- elles sont entachées d'une erreur de droit en ce que, d'une part, l'autorisation de mise sur le marché générique du Fenticonazole Bailleul 2%, crème, 15g en tube a été délivrée en lieu et place de l'autorisation de mise sur le marché hybride sollicitée en raison de l'absence de transposition en droit français de la directive 2004/27/CE et, d'autre part, cette autorisation a été délivrée en violation la procédure prévue à l'article 29 du code communautaire relatif aux médicaments à usage humain institué par la directive 2001/83/CE.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 7 août 2019 et 9 août 2019, l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé conclut au rejet de la requête en ce qu'elle demande de suspendre l'exécution de la décision du 8 juillet 2019. Elle soutient, à titre principal, que la requête est irrecevable et, à titre subsidiaire, que la condition d'urgence n'est pas remplie et qu'aucun des moyens soulevés n'est propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée.
Par un mémoire en défense, enregistré le 8 août 2019, la ministre des solidarités et de la santé conclut au rejet de la requête en ce qu'elle demande de suspendre l'exécution des arrêtés du 16 juillet 2019. Elle soutient, à titre principal, que la requête est irrecevable et, à titre subsidiaire, que la condition d'urgence n'est pas remplie et qu'aucun des moyens soulevés n'est propre à créer un doute sérieux quant à la légalité des décisions attaquées.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la directive 2001/83/CE du Parlement européen et du Conseil du 6 novembre 2001 instituant un code communautaire relatif aux médicaments à usage humain ;
- la directive 2004/27/CE du Parlement européen et du Conseil du 31 mars 2004 ;
- la loi n° 2018-1203 du 22 décembre 2018 ;
- le code de la santé publique ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, la société Effik, et d'autre part, la ministre des solidarités et de la santé, le président du Comité économique des produits de santé et le directeur général de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé ;
Vu le procès-verbal de l'audience publique du 12 août à 10 heures au cours de laquelle ont été entendus :
- les représentants de la société Effik ;
- les représentants de la ministre des solidarités et de la santé ;
- les représentants de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé ;
et à l'issue de laquelle le juge des référés a clos l'instruction.
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ".
2. La société Effik détient une autorisation de mise sur le marché pour le médicament Lomexin depuis le 14 mai 1991. Les laboratoires Bailleul ont développé un médicament similaire et ont sollicité une autorisation de mise sur le marché, selon la procédure européenne prévue à cet effet par le code communautaire du médicament, pour trois Etats membres parmi lesquels l'Allemagne a été désignée comme Etat membre de référence. L'Allemagne a délivré l'autorisation de mise sur le marché demandé. Par une décision du 20 septembre 2017, l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé a délivré une autorisation de mise sur le marché générique pour ce même médicament, et en a informé la société Effik par un courrier en date du même jour. Le directeur général de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé a décidé le 22 novembre 2017 de constituer un groupe générique dans lequel il identifie le Lomexin de la société Effik comme spécialité de référence, et celui des laboratoires Bailleul comme spécialité générique de la spécialité de référence. Par un courrier, en date du 21 juin 2019, la société Effik a demandé au directeur général de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé d'abroger sa décision du 22 novembre 2017 portant modification du répertoire des groupes génériques mentionné à l'article R. 5121-5 du code de la santé publique, en tant que cette décision concerne le groupe Fenticonazole Lomexin. Par une décision en date du 8 juillet 2019, ce dernier a rejeté la demande, au motif que le recours a été présenté plus d'un an et demi après la publication de la décision, soit hors délai, rendant la décision incontestable devant le juge administratif. La société Effik demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution des arrêtés du 16 juillet 2019 portant modification de la liste des spécialités pharmaceutiques remboursables aux assurés sociaux et la liste des spécialités pharmaceutiques agrées à l'usage des collectivités et divers services publics en tant que ces arrêtés portent inscription sur ces deux listes de Fenticonazole Bailleul 2%, crème, 15g en tube, d'autre part de la convention conclue entre le Comité économique des produits de santé et la société Laboratoires Bailleul SAS en tant que celle-ci fixe le prix de Fenticonazole Bailleul 2%, crème, 15g en tube et, enfin, de la décision du 8 juillet 2019 par laquelle l'agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé a rejeté la demande d'abrogation de la décision de modification du répertoire des groupes génériques du 22 novembre 2017 en ce qu'elle crée un groupe générique Fenticonazole (Nitrate de) 2% - Lomexin 2%, crème, et inscrit la spécialité Fenticonazole Bailleul 2%, crème comme générique de Lomexin 2%, crème.
3. Pour établir l'urgence qui s'attache aux suspensions demandées, la société Effik se prévaut d'abord d'un risque pour la santé publique, dont elle a cependant reconnu à l'audience qu'il ne résulte d'aucun fait précis mais d'une suspicion de principe découlant du raisonnement qu'elle tient quant à la régularité de la procédure suivie ; elle argue ensuite de la perte de chiffre d'affaires qu'elle éprouverait du fait des décisions contestées, mais, alors que la spécialité concurrente de la sienne n'est pas encore commercialisée, ne produit aucun élément chiffré ou comptable permettant d'établir ce qui ne constitue en l'état qu'un risque potentiel ; enfin, le trouble à l'ordre public communautaire allégué résulterait selon le raisonnement tenu d'un défaut de transposition d'une directive depuis près de quinze ans, qui n'a aucun caractère d'évidence et dont les conséquences ne sont nullement établies. A supposer que le Conseil d'Etat puisse être regardé comme compétent pour examiner en premier ressort, directement ou le cas échéant par voie de connexité, les demandes de la société Effik ne révèlent en tout état de cause aucune urgence au sens des dispositions de l'article L. 521-1 du code de justice administrative. Il y a donc lieu de les rejeter, ainsi que, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative y faisant obstacle faute que l'Etat soit la partie perdante, celles tendant au versement d'une somme de 3 000 euros.
O R D O N N E :
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Article 1er : La requête de la société Effik est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à la société Effik, à la ministre des solidarités et de la santé, au président du Comité économique des produits de santé et au directeur général de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé.