1°) d'annuler cette ordonnance ;
2°) de rejeter la demande de première instance ;
3°) de mettre à la charge de Mme A... une somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'ordonnance attaquée est entachée d'une insuffisance de motivation, le juge des référés du tribunal administratif de Melun s'étant borné à relever le nombre de pièces produites par la requérante pour en déduire que cette dernière subissait des faits de harcèlement moral ;
- elle est entachée d'une erreur de droit et d'une erreur d'appréciation dès lors que, d'une part, le poste et les missions affectés à Mme A... correspondent à son grade et, d'autre part, les décisions prises par le centre hospitalier ne constituent pas une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté fondamentale que constitue le droit de ne pas être soumis à un harcèlement moral mais résultent des manquements professionnels de Mme A... tenant à ses difficultés relationnelles, ses insuffisances professionnelles et son absentéisme injustifié et récurrent et, par suite, à l'absence de service fait ;
- le juge des référés a commis une erreur de droit et une erreur d'appréciation en estimant que la condition d'urgence était satisfaite, alors que la première retenue sur salaire a eu lieu à partir du mois de mai 2020 et qu'un revenu correspondant au revenu de solidarité active ainsi que la jouissance d'un logement de fonction et des frais afférents ont été maintenus au bénéfice de Mme A... par le centre hospitalier.
Par un mémoire en défense, enregistré le 5 novembre 2020, Mme A... conclut au rejet de la requête, par la voie de l'appel incident, à ce qu'il soit fait droit à l'intégralité de sa demande de première instance et à ce que soit mis à la charge du CHIV la somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les moyens soulevés par le CHIV ne sont pas fondés ;
- l'ordonnance contestée est entachée d'une contradiction de motif et d'une erreur de droit en ce qu'elle reconnaît la violation grave et manifestement illégale de son droit à ne pas être harcelée par son employeur mais considère qu'il n'y a pas lieu d'y mettre fin de manière urgente ;
- la condition d'urgence est satisfaite dès lors, en premier lieu, qu'elle subit une situation de harcèlement moral depuis plusieurs années, en deuxième lieu, que la clôture d'instruction de son recours au fond n'aura lieu que le 28 décembre 2020 et, en dernier lieu, que les retenues sur salaire ont des conséquences financières importantes eu égard à ses charges mensuelles, qui sont deux fois plus élevées.
Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, le centre hospitalier intercommunal de Villeneuve-Saint-Georges, d'autre part, Mme B... A... :
Ont été entendus lors de l'audience publique du 10 novembre 2020, à 14h30 :
- Me Delamarre, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat du centre hospitalier intercommunal de Villeneuve-Saint-Georges ;
- les représentants du centre hospitalier intercommunal de Villeneuve-Saint-Georges ;
- Me Gaschignard, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de Mme A... ;
- le représentant de Mme A... ;
- Mme A... ;
à l'issue de laquelle le juge des référés a clos l'instruction.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 ;
- le code de justice administrative ;
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures ".
2. Mme B... A..., personnel de direction des établissements hospitaliers depuis 1994 et titulaire du grade de directrice d'hôpital hors classe, a été affectée par arrêté du 24 janvier 2017 aux fonctions de " directrice adjointe en charge du pilotage de dossiers spécifiques dans le cadre de la constitution du groupement hospitalier de territoire (GHT) 94 Est ". Elle a, par une demande enregistrée au tribunal administratif de Melun le 18 mai 2018, demandé l'annulation de la décision du directeur du centre hospitalier intercommunal Lucie et Raymond Aubrac de Villeneuve-Saint-Georges (CHIV) du 3 novembre 2017 refusant sa proposition de modification de fiche de poste, ainsi qu'une réparation financière des divers préjudices subis. La directrice générale du CHIV a, par des décisions des 22 juin, 29 juillet et 15 septembre 2020, décidé de procéder à des retenues sur ses traitements pour service non fait depuis le 25 février 2020, décisions qu'elle a également contestées par une demande enregistrée le 25 septembre 2020 au même tribunal administratif.
3. Mme A... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Melun, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'ordonner la suspension de l'exécution de la décision par laquelle le centre hospitalier a refusé de lui attribuer des fonctions effectives correspondant à son grade, de lui enjoindre de l'affecter sur des fonctions effectives correspondant à son grade, à son expérience et à ses compétences et d'ordonner la suspension de l'exécution des décisions de la directrice du centre hospitalier des 22 juin, 29 juillet et 15 septembre 2020 portant retenue sur salaire et d'enjoindre au centre hospitalier de lui verser, à titre provisionnel, une somme au moins égale aux trois quarts des traitements qui ne lui ont pas été versés. Par une ordonnance n° 2007558 du 30 septembre 2020, le juge des référés du tribunal administratif de Melun a suspendu l'exécution des décisions des 22 juin, 29 juillet et 15 septembre 2020 et enjoint au centre hospitalier de procéder à la restitution des sommes prélevées sur ses traitements en juin, juillet et août 2020. Le centre hospitalier relève appel de cette ordonnance et Mme A... forme un appel incident dirigée contre l'ordonnance en tant qu'elle n'a pas fait droit à l'ensemble de ses demandes.
Sur le cadre du litige :
4. Aux termes de l'article 6 quinquies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. Aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la formation, la notation, la discipline, la promotion, l'affectation et la mutation ne peut être prise à l'égard d'un fonctionnaire en prenant en considération : 1° Le fait qu'il ait subi ou refusé de subir les agissements de harcèlement moral visés au premier alinéa ; 2° Le fait qu'il ait exercé un recours auprès d'un supérieur hiérarchique ou engagé une action en justice visant à faire cesser ces agissements ; 3° Ou bien le fait qu'il ait témoigné de tels agissements ou qu'il les ait relatés. Est passible d'une sanction disciplinaire tout agent ayant procédé ou ayant enjoint de procéder aux agissements définis ci-dessus. Les dispositions du présent article sont applicables aux agents non titulaires de droit public. ". Le droit de ne pas être soumis à un harcèlement moral constitue pour un agent une liberté fondamentale au sens des dispositions de l'article L. 521-2 du code de justice administrative.
5. Il appartient à l'agent public qui soutient avoir été victime de faits constitutifs de harcèlement moral, lorsqu'il entend contester le refus opposé par l'administration dont il relève à une demande de protection fonctionnelle fondée sur de tels faits de harcèlement, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles d'en faire présumer l'existence. Il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile.
Sur l'appel du CHIV :
6. Il résulte de l'instruction que, comme l'a relevé le juge des référés du tribunal administratif, par les éléments joints par Mme A... à sa demande, complétés en appel, la requérante soumet au juge des référés des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'une situation de harcèlement moral dont elle serait victime depuis 2017, résultant en particulier de la volonté de la mettre à l'écart de l'équipe de direction du centre hospitalier. Toutefois, au soutien de sa requête d'appel, le centre hospitalier produit divers éléments dont il ressort que le changement de fonctions décidé au début de l'année 2017 était justifié par les difficultés rencontrées par la requérante dans son précédent poste de directrice adjointe chargée des services économiques et logistiques du centre hospitalier, relevées par son évaluation au titre de l'année 2016 contestée par l'intéressée mais aussi par diverses autres pièces, dont des échanges de courriers révélant un mode de relations préjudiciable à la bonne marche du service. Si, depuis ce changement de fonctions, Mme A... a contesté le contenu de ses missions au titre de sa nouvelle fonction de directrice adjointe en charge du pilotage de dossiers spécifiques dans le cadre de la constitution du groupement hospitalier de territoire " GHT 94 Est ", il ne résulte pas de l'instruction qu'après les difficultés rencontrées dans son précédent poste, elle se soit investie dans ses nouvelles fonctions ni, d'ailleurs, dans les activités que le centre hospitalier a dû mener pour faire face à la crise de la covid depuis le début de l'année 2020. Bien qu'il puisse être reproché au centre hospitalier de ne pas avoir pris des mesures, entre 2017 et 2020, pour résoudre les difficultés rencontrées dans l'intégration de la requérante au sein de son équipe de direction, il n'est pas établi, en l'état de l'instruction, au vu des considérations mentionnées ci-dessus, qu'il a été porté une atteinte grave et manifestement illégale au droit de Mme A... de ne pas subir de harcèlement moral.
7. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur l'urgence, que le CHIV est fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance du 30 septembre 2020, le tribunal administratif de Melun a suspendu l'exécution des décisions de sa directrice générale des 22 juin, 29 juillet et 15 septembre 2020 portant retenue sur salaire et lui a enjoint de procéder à la restitution des sommes prélevées sur les traitements de Mme A... en juin, juillet et août 2020.
Sur l'appel incident :
8. Mme A... soutient que la condition d'urgence est satisfaite, s'agissant de ses demandes en référé relatives à la décision du 3 novembre 2017 par laquelle le centre hospitalier a refusé de lui attribuer des fonctions effectives correspondant à son grade, dès lors que cette situation dure depuis 2017 et qu'elle est atteinte d'un syndrome anxio-dépressif dû à cette situation. Toutefois, ces circonstances ne sont pas de nature à caractériser, à elles seules, une situation d'urgence au sens de l'article L. 521-2 du code de justice administrative. Par suite, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que le juge des référés du tribunal administratif de Melun, qui n'a pas entaché sa décision de contradiction de motifs sur ce point, a commis une erreur de droit en écartant la condition d'urgence. Son appel incident doit, dès lors, être rejeté.
Sur les conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge du CHIV qui n'est pas, dans la présente instance, partie perdante. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme A... une somme à ce titre.
O R D O N N E :
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Article 1er : Les articles 1er, 2 et 3 de l'ordonnance n° 2007558 du 25 septembre 2020 du juge des référés du tribunal administratif de Melun sont annulés.
Article 2 : Les demandes de Mme A... présentées devant le juge des référés du tribunal administratif de Melun au titre des décisions de sa directrice générale des 22 juin, 29 juillet et 15 septembre 2020 portant retenue sur salaire, les conclusions de son appel incident ainsi que ses conclusions au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Les conclusions présentées par le CHIV au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : La présente ordonnance sera notifiée au centre hospitalier intercommunal de Villeneuve-Saint-Georges et à Mme B... A....