Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 10 août 2016, la commune de Régina-Kaw, représentée par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de la Guyane du 16 juin 2016 en tant qu'il a annulé l'arrêté du 2 décembre 2015 et mis à sa charge la somme de 6 000 euros ;
2°) de rejeter les demandes présentées par Mme A...devant le tribunal administratif ;
3°) de mettre à la charge de Mme A...la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que la sanction prononcée est, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif, proportionnée à la faute reprochée à MmeA....
Par un mémoire en défense enregistré le 18 novembre 2016, Mme A...conclut au rejet de la requête ainsi qu'à la confirmation du jugement prononcé par le tribunal administratif de la Guyane. Elle soutient que, comme l'a jugé le tribunal administratif, la sanction prononcée à son encontre n'était pas proportionnée aux faits qui lui étaient reprochés.
Par ordonnance du 23 janvier 2018, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 7 février 2018 à 12h00.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;
- le décret n° 88-145 du 15 février 1988 pris pour l'application de l'article 136 de la loi du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif aux agents non titulaires de la fonction publique territoriale ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Sylvie Cherrier,
- et les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. MmeA..., adjointe administratif territorial de 2ème classe non titulaire en fonction dans le service de la commune de Régina Kaw, a fait l'objet, par des arrêtés du maire des 12 novembre 2015 et 10 décembre 2015, de mesures de suspension, puis, par un arrêté du 22 décembre 2015, le maire lui a infligé la sanction de l'exclusion temporaire de fonctions avec retenue de traitement pour une durée de quatre mois à compter du 26 décembre 2015. Par la présente requête, la commune de Régina Kaw demande à la cour d'annuler le jugement du 9 juin 2016 du tribunal administratif de la Guyane en tant qu'il a annulé l'arrêté du 22 décembre 2015 et mis à sa charge la somme de 6 000 euros au titre du préjudice subi par MmeA....
2. Aux termes de l'article 36 du décret susvisé du 15 février 1988 : " Tout manquement au respect des obligations auxquelles sont assujettis les agents publics, commis par un agent non titulaire dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions est constitutif d'une faute l'exposant à une sanction disciplinaire, sans préjudice, le cas échéant, des peines prévues par le code pénal ". L'article 36-1 du même décret prévoit par ailleurs les sanctions disciplinaires suivantes : " 1° L'avertissement ; 2° Le blâme ; 3° l'exclusion temporaire des fonctions avec retenue de traitement pour une durée maximale (...) d'un an pour les agents sous contrat à durée indéterminée ; 4° Le licenciement, sans préavis ni indemnité de licenciement ".
3. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes.
4. La décision litigieuse est fondée sur ce que Mme A...a apposé " des affiches particulièrement injurieuses sur les murs de son bureau, à la vue du public et en direction de sa hiérarchie ", qu'à la suite de la demande d'explications émanant de sa hiérarchie, elle a tout d'abord écrit " je ne vois pas de quoi vous parlez (...) " avant d'indiquer que ces affiches étaient " humoristiques et philosophiques ", enfin, " que les propos contenus dans ces affiches et la réponse de Mme A...sur les raisons qui ont motivé [leur] mise en place (...) dans son bureau excèdent par leur caractère outrageant et insultant les limites que les fonctionnaires doivent respecter en raison de leur obligation de réserve et du devoir de correction auquel ils sont tenus notamment à l'égard de leur hiérarchie ".
5. Il ressort des pièces du dossier que, dans un contexte de tension juridique et politique entre le maire de la commune et un élu communal, Mme A...a, le 4 novembre 2015, apposé sur les murs de son bureau des affiches de format A4 qui comportaient des mentions présentant, ainsi que l'a relevé le jugement attaqué, un caractère déplacé et irrévérencieux et inspirant une suspicion à l'égard des élus et de la hiérarchie de l'intéressé, bien que n'indiquant aucun nom. Il ressort également des pièces du dossier que, invitée par le secrétaire général de la mairie par lettre du 6 novembre 2015 à fournir des explications sur les motivations l'ayant conduite à apposer ces affiches, l'intéressée s'est contentée de répondre qu'elle ne voyait pas de quoi il était question, faisant ainsi preuve d'une désinvolture certaine à l'égard d'un supérieur hiérarchique. Enfin, au cours de l'entretien préalable du 17 décembre 2015, elle s'est contentée de soutenir que ces affiches présentaient un caractère humoristique et philosophique, ce qui n'était à l'évidence pas le cas. L'ensemble des faits ainsi reprochés à Mme A...caractérise une faute de nature à justifier une sanction disciplinaire.
6. Toutefois, eu égard au fait que ces affiches sont restées peu de temps en place, au grade de l'intéressée et aux fonctions occupées par elle au sein de la mairie, à l'absence de tout antécédent disciplinaire, c'est à juste titre que le tribunal administratif a estimé que la sanction de quatre mois d'exclusion avec retenue de traitement infligée à Mme A...présentait, au regard de la gravité de la faute commise, un caractère disproportionné.
7. Il résulte de ce qui précède que la commune n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a annulé l'arrêté du 22 décembre 2015 et l'a condamnée à verser une indemnité dont elle ne discute pas le montant.
8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que MmeA..., qui n'est pas la partie perdante, soit condamnée à payer une somme à ce titre à la commune.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la commune de Régina-Kaw est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Régina-Kaw et à Mme B...A....
Copie en sera adressée à la ministre des outre-mer et au préfet de la Guyane.
Délibéré après l'audience du 29 mars 2018 à laquelle siégeaient :
M. Aymard de Malafosse, président,
M. Laurent Pouget, président-assesseur,
Mme Sylvie Cherrier, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 26 avril 2018.
Le rapporteur,
Sylvie CHERRIER
Le président,
Aymard de MALAFOSSE Le greffier,
Christophe PELLETIER
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 16BX02739