Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 3 décembre 2015, M. D...A..., représenté par Me C...B..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français et refusant d'octroyer un délai de départ volontaire ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir ces décisions ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Maritime de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer, pour la durée de cet examen, une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros à verser à son conseil au titre de l'alinéa 2 de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision prononçant l'obligation de quitter le territoire français a été prise en violation de son droit d'être entendu et de présenter des observations écrites et orales ;
- elle a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle entache, par voie d'exception, d'illégalité la décision de refus d'octroyer un délai de départ volontaire ;
- la préfète a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision de refus de délai de départ volontaire sur sa situation personnelle ;
- le risque de fuite défini par l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile méconnaît les objectifs de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008.
La requête a été communiquée au préfet de la Seine-Maritime qui n'a pas produit de mémoire.
M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 3 novembre 2015 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Douai.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Olivier Yeznikian, président de chambre, a été entendu au cours de l'audience publique.
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, notamment du procès-verbal d'audition signé par l'intéressé dans le cadre de la procédure de retenue instituée par les dispositions de l'article L. 611-1-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que M. A...a été entendu le 5 octobre 2015 par les services de police en particulier en ce qui concerne son âge, sa nationalité, sa situation de famille, ses attaches dans son pays d'origine et en France, les raisons et conditions de son entrée en France, ses conditions d'hébergement, ainsi que sur l'éventualité d'une mesure d'éloignement prise à son encontre ; que le requérant a eu ainsi la possibilité, au cours de cet entretien, de faire valoir utilement ses observations ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la décision contestée méconnaîtrait le principe général du droit d'être entendu, qui est au nombre des principes fondamentaux du droit de l'Union européenne, doit être écarté ;
2. Considérant que M.A..., ressortissant russe, déclare être entré en France avec sa compagne le 7 avril 2011, à l'âge de vingt-un ans ; que sa présence sur le territoire a été rendue possible le temps de l'examen de sa demande d'asile, qui, après avoir été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 10 octobre 2011 confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 12 mars 2013, a fait l'objet d'un réexamen qui a à nouveau conduit à un rejet par l'Office le 31 décembre 2013 ; que, par un arrêté du 27 septembre 2013, confirmé par un arrêt du 5 mars 2015 de la cour administrative d'appel de Douai, le préfet de la Seine-Maritime a refusé de l'admettre au séjour et l'a obligé à quitter le territoire français sous trente jours ; que l'intéressé n'a pas déféré à cette mesure ; que sa compagne de nationalité russe, MmeE..., a également fait l'objet d'une mesure d'éloignement le 27 septembre 2013, confirmée de même par un arrêt de la cour du 5 mars 2015 ; que le requérant ne justifie pas avoir noué des liens d'une particulière intensité sur le territoire français ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que M.A..., sa compagne et leurs deux enfants, nés en France les 29 mai 2011 et 15 décembre 2012, seraient dans l'impossibilité de poursuivre leur vie privée et familiale hors de France ou dans leur pays d'origine où ils disposent encore d'attaches familiales ; que si M. A...se prévaut de la scolarisation de ses enfants sur le territoire, rien ne s'oppose toutefois à ce qu'ils poursuivent leur scolarisation hors de France et notamment dans leur pays d'origine ; que, compte tenu des conditions de son séjour en France et en dépit de sa durée, le préfet de la Seine-Maritime n'a pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale de M. A...une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels la décision litigieuse a été prise ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;
3. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'illégalité ;
Sur le refus d'octroyer un délai de départ volontaire :
4. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit au point 3 que le moyen tiré de l'illégalité de la décision de refus d'octroyer un délai de départ volontaire du fait de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être écarté ;
5. Considérant que, pour les mêmes raisons que celles énoncées au point 2, le moyen tiré de ce que la préfète aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision contestée sur sa situation personnelle et notamment sur la scolarité de ses enfants, doit être écarté ;
6. Considérant que, contrairement à ce que soutient M.A..., les dispositions du paragraphe II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sur lesquelles s'est fondé le préfet de la Seine-Maritime pour lui refuser un délai de départ volontaire, qui fixent des critères objectifs permettant de penser que l'étranger faisant l'objet de la mesure d'éloignement est susceptible de prendre la fuite, ne sont pas incompatibles avec celles de la directive 2008/115/CE que la loi du 16 juin 2011 a eu pour objet de transposer ; qu'en prévoyant que des circonstances particulières peuvent faire obstacle à ce que le risque de fuite soit considéré comme établi dans l'hypothèse où un étranger entrerait dans un des cas définis par le 3° du II de l'article L. 511-1 du code précité, le législateur a imposé à l'administration un examen de la situation particulière de chaque étranger, à même d'assurer le respect du principe de proportionnalité entre les moyens et les objectifs poursuivis lorsqu'il est recouru à des mesures coercitives ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompatibilité des dispositions du paragraphe II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile avec la directive 2008/115/CE doit être écarté ;
7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français et refusant d'octroyer un délai de départ volontaire contenues dans l'arrêté préfectoral du 5 octobre 2015 ; que les conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles présentées au titre de l'alinéa 2 de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent, par voie de conséquence, être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...A..., au ministre de l'intérieur et à Me C...B....
Copie en sera transmise pour information à la préfète de la Seine-Maritime.
Délibéré après l'audience publique du 30 juin 2016 à laquelle siégeaient :
- M. Olivier Yeznikian, président de chambre,
- M. Christian Bernier, président-assesseur,
- Mme Amélie Fort-Besnard, premier conseiller.
Lu en audience publique le 12 juillet 2016.
Le président-assesseur,
Signé : C. BERNIERLe premier vice-président de la cour,
Président de chambre rapporteur,
Signé : O. YEZNIKIAN
Le greffier,
Signé : S. DUPUIS
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
Le greffier en chef,
Par délégation,
Le greffier,
Sylviane Dupuis
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N°15DA01922 3