Procédure devant la Cour :
Par un recours et un mémoire, enregistrés le 10 juin 2014 et le 23 février 2015, le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie et le ministre du logement et de l'égalité des territoires demandent à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 25 mars 2014 ;
2°) de rejeter la demande de M. A... devant le tribunal administratif de Lyon.
Ils soutiennent que :
- le litige n'a pas un caractère indemnitaire et est susceptible d'appel ;
- le jugement est irrégulier en ce que les juges de première instance ont retenu un moyen qui n'était pas soulevé par le demandeur, sans en informer les parties ;
- la décision en litige ne méconnaît pas l'article 8 du décret du 30 mai 2005 portant statut particulier du corps des ingénieurs des travaux publics de l'Etat, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif, dès lors que seuls lui ont été réclamés les frais d'études afférents à l'année de scolarité effectuée entre le 4 septembre 2007 et le 3 septembre 2008, lesquels ont été fixés forfaitairement à 9 230 euros pour l'année calendaire 2007 par arrêté ministériel du 9 juillet 2008 ;
- les élèves-ingénieurs fonctionnaires ne peuvent se prévaloir d'une discrimination dans le calcul de leurs frais d'études par rapport aux élèves-ingénieurs civils, dès lors qu'ils sont placés dans une situation différente ;
- ils s'en rapportent pour le surplus aux observations en défense de première instance.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 6 août 2014 et le 6 mai 2015, M. B... A... conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que :
- la Cour n'est pas compétente pour statuer en appel dès lors que sa demande de première instance présentait un caractère indemnitaire et portait sur un montant inférieur à 10 000 euros ;
- la décision en litige n'a pas été précédée d'une procédure contradictoire ;
- elle n'est pas motivée en ce qui concerne le calcul de la fraction des frais d'études mise à sa charge ;
- elle méconnaît l'article 8 du décret du 30 mai 2005 portant statut particulier du corps des ingénieurs des travaux publics de l'Etat, comme l'a jugé à bon droit le tribunal administratif ;
- elle est discriminatoire par rapport au régime applicable aux élèves-ingénieurs civils de l'Ecole nationale des travaux publics de l'Etat.
Par lettre du 27 avril 2016, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la Cour est susceptible de relever d'office l'irrecevabilité des moyens de procédure soulevés par M. A...après l'expiration du délai du recours contentieux.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ;
- le décret n° 2005-631 du 30 mai 2005 portant statut particulier du corps des ingénieurs des travaux publics de l'Etat ;
- l'arrêté du 1er août 2008 fixant les modalités de remboursement et le calcul des sommes dues au Trésor au titre de l'article 8 du décret n° 2005-631 du 30 mai 2005 portant statut particulier du corps des ingénieurs des travaux publics de l'Etat ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Drouet, président assesseur,
- et les conclusions de M. Clément, rapporteur public.
1. Considérant que, par arrêté du 5 décembre 2008, le ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire a accepté la démission de M. A... en qualité d'élève-ingénieur fonctionnaire stagiaire de l'Ecole nationale des travaux publics de l'Etat et a mis à sa charge la somme de 9 230 euros représentant le coût de ses études au sein de cette école ; que le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie et le ministre du logement et de l'égalité des territoires relèvent appel du jugement du 25 mars 2014 par lequel le tribunal administratif de Lyon a déchargé M. A...de l'obligation de payer cette somme ;
Sur la compétence de la cour administrative d'appel :
2. Considérant que la demande de première instance de M. A..., qui tend à la décharge de l'obligation de payer la somme de 9 230 euros mise à sa charge par l'arrêté du 5 décembre 2008 du ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire, n'a pas un caractère indemnitaire au sens du 8° de l'article R. 811-1 du code de justice administrative et ne relève d'aucune des autres catégories de litiges sur lesquels, en vertu de ce même article dans sa rédaction applicable au présent recours, le tribunal administratif statue en premier et dernier ressort ; que la Cour est dès lors compétente pour statuer en appel sur le recours formé par le ministre ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
3. Considérant que le jugement attaqué est fondé exclusivement sur la méconnaissance des dispositions de l'article 8 du décret n° 2005-631 du 30 mai 2005 ; que ce moyen avait été invoqué par M. A... dans son mémoire enregistré le 17 septembre 2009 au greffe du tribunal administratif de Lyon ; qu'ainsi, les premiers juges, en retenant ce moyen sans en informer préalablement les parties, n'ont entaché leur jugement d'aucune irrégularité ;
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
4. Considérant qu'aux termes de l'article 8 du décret du 30 mai 2005 portant statut particulier du corps des ingénieurs des travaux publics de l'Etat : " Le recrutement des élèves ingénieurs des travaux publics de l'Etat est subordonné, pour chacun d'eux, à l'engagement de suivre le cycle complet de l'enseignement mentionné au II de l'article 7 et à celui de servir, en qualité de fonctionnaire de l'Etat, en activité ou en détachement, pendant une durée minimale de huit ans à compter de la date de titularisation dans le corps des ingénieurs des travaux publics de l'Etat. / Si la rupture de l'un des engagements survient plus de trois mois après la date de nomination en qualité d'élève ingénieur, les intéressés doivent, sauf si la rupture ne leur est pas imputable, rembourser à l'Etat une somme égale à la totalité des traitements et indemnités perçus pendant leur scolarité ainsi qu'une fraction des frais d'études engagés pour leur formation. / Les modalités de ce remboursement sont fixées par arrêté conjoint du ministre chargé de l'équipement et du ministre chargé du budget. " ; que selon l'article 3 de l'arrêté ministériel du 1er août 2008 fixant les modalités de remboursement et le calcul des sommes dues au Trésor au titre de l'article 8 du décret du 30 mai 2005 : " La somme à rembourser, par les élèves ingénieurs, les ingénieurs des travaux publics de l'Etat stagiaires ou les ingénieurs des travaux publics de l'Etat, prévue au deuxième alinéa de l'article 8 du décret du 30 mai 2005 susvisé est établie compte tenu de la durée de service déjà effectuée en activité ou en détachement et comporte : / - d'une part, les traitements et indemnités qu'ils ont perçus pendant la scolarité, à l'exception des prestations familiales ; / - d'autre part, une fraction des frais d'études engagés pour leur formation qui représente forfaitairement les frais des années d'études effectivement accomplies. Le montant de ces frais est fixé chaque année par arrêté du ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire. Si la rupture de l'engagement a lieu au cours d'une année scolaire, le montant des frais dus pour cette année est proportionnel au nombre de mois accomplis depuis le 1er octobre, le montant mensuel étant égal à un douzième du montant des frais de l'année considérée. " ;
5. Considérant qu'il est constant que M. A... a accompli du 4 septembre 2007 au 2 septembre 2008 sa première année de scolarité à l'Ecole nationale des travaux publics de l'Etat en qualité d'élève-ingénieur fonctionnaire stagiaire de l'Etat ; que, par arrêté du 5 décembre 2008, le ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire a accepté la démission de M. A... avec effet au 3 septembre 2008 et a mis à sa charge la somme de 9 230 euros correspondant au coût de ses études au sein de cette école ; que M. A... ayant ainsi accompli une scolarité de douze mois avant sa démission, il appartenait au ministre, en application des dispositions précitées l'article 3 de l'arrêté du 1er août 2008, de mettre à sa charge, au titre des frais d'études, une somme représentant forfaitairement les frais d'une année entière d'études effectivement accomplie ; que, par arrêté du 9 juillet 2008, le ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire a fixé à 9 230 euros pour l'année calendaire 2007 le montant de la somme forfaitaire représentant les frais d'études à rembourser par les élèves-ingénieurs et les ingénieurs des travaux publics de l'Etat, en application de l'article 8 du décret du 30 mai 2005, en cas de rupture de l'engagement qu'ils ont souscrit ; que, dans ces conditions, en mettant, par la décision en litige, la somme de 9 230 euros à la charge de M. A... au titre des frais d'études, le ministre n'a pas fait une inexacte application des dispositions précitées de l'article 8 du décret du 30 mai 2005, ni de celles de l'article 3 de l'arrêté du 1er août 2008 ; qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur la méconnaissance de ces dispositions pour décharger M. A... de l'obligation de payer la somme de 9 230 euros en litige ;
6. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A... ;
7. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que la décision en litige du 5 décembre 2008, qui comporte la mention des voies et délais de recours, a été notifiée à M. A... le 10 janvier 2009 ; que le mémoire introductif de première instance et le mémoire complémentaire, présentés par M. A... et enregistrés respectivement le 11 février 2009 et le 9 avril 2009 au greffe du tribunal administratif, ne contenaient que des moyens relatifs au bien-fondé de cette décision ; que si, dans deux mémoires enregistrés le 14 avril 2009 et le 17 septembre 2009, M. A... a soulevé respectivement un moyen tiré de ce que la décision en litige n'est pas motivée et un moyen tiré de ce qu'elle n'a pas été précédée d'une procédure contradictoire, ces moyens, fondés sur une autre cause juridique et énoncés dans des mémoires enregistrés après l'expiration du délai du recours contentieux, sont irrecevables et doivent, par suite, être écartés ;
8. Considérant, en deuxième lieu, qu'il est constant que M. A... a été nommé, à compter du 4 septembre 2007, fonctionnaire stagiaire de l'Etat au grade d'élève-ingénieur des travaux publics de l'Etat ; qu'ainsi qu'il a été dit au point 6, le ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire a, par arrêté du 5 décembre 2008, accepté sa démission de la fonction publique présentée le 27 août 2008, avec effet au 3 septembre 2008 ; que, dans ces conditions, nonobstant la circonstance que l'intéressé a repris sa scolarité à l'Ecole nationale des travaux publics de l'Etat en qualité d'élève-ingénieur civil en décembre 2008 moins de trois mois après sa démission de la fonction publique, une telle démission, survenue plus de trois mois après sa nomination en qualité de fonctionnaire stagiaire de l'Etat, a fait rentrer M. A... dans le champ d'application du deuxième alinéa de l'article 8 du décret du 30 mai 2005 ;
9. Considérant, en troisième et dernier lieu, que le moyen tiré d'une discrimination par rapport aux élèves-ingénieurs civils de l'Ecole nationale des travaux publics de l'Etat et aux élèves des écoles normales supérieures doit être écarté, dès lors que M. A..., en sa qualité d'élève-ingénieur du corps des ingénieurs des travaux publics de l'Etat au regard de laquelle la décision contestée a été prise, se trouve dans une situation juridiquement différente de celles des élèves-ingénieurs civils et des élèves des écoles normales supérieures ;
10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée en première instance par l'administration, que les ministres requérants sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a déchargé M. A... de l'obligation de payer la somme de 9 230 euros correspondant aux frais de ses études à l'Ecole nationale des travaux publics de l'Etat ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Lyon du 25 mars 2014 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Lyon est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, au ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales et à M. B... A....
Délibéré après l'audience du 17 mai 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Boucher, président de chambre ;
- M. Drouet, président assesseur ;
- Mme Dèche, premier conseiller.
Lu en audience publique le 14 juin 2016.
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N° 14LY01776