1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Lyon ;
2°) avant dire droit de désigner un expert ;
3°) à titre principal de condamner le centre hospitalier gériatrique du Mont d'Or à lui verser la somme de 103 840 euros HT outre les intérêts légaux et la capitalisation des intérêts ;
4 °) de mettre à la charge du centre hospitalier gériatrique du Mont d'Or la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La société Ulti Service soutient que :
- sa requête présentée devant le tribunal administratif, contrairement à ce qu'il a jugé, était bien recevable puisqu'elle a fourni le mémoire en réclamation qu'elle avait envoyé par Chronopost au maître d'oeuvre le 10 septembre 2010, soit dix jours avant l'expiration du délai prévu par le cahier des clauses administratives générales (CCAG) ; par ailleurs, le délai de 45 jours prévu par l'article 13.44 du CCAG ne lui était même pas opposable puisque le décompte général notifié le 3 août 2010 était irrégulier ;
- le centre hospitalier gériatrique du Mont d'Or ne pouvait s'opposer au paiement des travaux supplémentaires dès lors qu'ils résultaient d'une volonté du maître de l'ouvrage ;
- des plus-values ont été appliquées de manière injustifiée, la mise en régie pour la pose des siphons des salles de bains des chambres ayant été effectuée à la suite d'un constat non contradictoire ;
- des pénalités ont été appliquées de façon tout aussi injustifiée.
Par deux mémoires en défense enregistrés les 9 septembre 2014, 16 juillet et 14 août 2015, le centre hospitalier gériatrique du Mont d'Or demande à la cour :
1°) à titre principal, de confirmer le jugement attaqué et de rejeter la requête présentée par la société Ulti Service en raison de son irrecevabilité ;
2°) à titre subsidiaire, de rejeter, en raison de son caractère infondé, la requête tendant à lui faire verser la somme de 119 230,13 euros HT (103 840 euros pour travaux supplémentaires et 15 390,13 euros pour l'application injustifiée de moins-value) outre intérêts au taux légal, de ne pas modérer le montant des pénalités de retard mise à la charge d'Ulti Service, et de ne pas désigner un expert ;
3°) de mettre à la charge de la société Ulti Service la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Le centre hospitalier fait valoir que :
- la requête était irrecevable en application des articles 5.3, 13.44 et 13.45 du CCAG Travaux applicable au litige ;
- à titre subsidiaire, la demande de rémunération pour travaux supplémentaires doit être rejetée, aucun ordre de service ni aucun avenant ni aucun accord du maître de l'ouvrage n'étant intervenu sur le principe d'une rémunération ;
- s'agissant de l'application de moins-values, elles correspondent aux sommes engagées pour pallier la défaillance de l'entreprise Ulti Service, le paiement des travaux réalisés par l'entreprise Fragola doit rester à la charge financière d'Ulti Service ;
- les pénalités ont un caractère automatique en application des articles 20.1 du CCAG et 4.3 du CCAP applicable au marché en litige ; c'est à cause d'Ulti Service que le chantier a pris du retard obligeant le maître d'ouvrage à faire recaler le planning par le maître d'oeuvre et à revoir son organisation.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des marchés publics,
- le décret n° 76-86 du 21 janvier 1976,
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Gondouin,
- les conclusions de M. Dursapt, rapporteur public,
- et les observations de MeC..., représentant la société Ulti Service, et de MeB..., représentant le centre hospitalier gériatrique du Mont d'Or.
1. Considérant que, dans le cadre de la construction d'un établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes, le centre hospitalier gériatrique du Mont d'Or a confié à la société Ulti Service, par un acte d'engagement signé le 13 septembre 2007, l'exécution du lot n° 12B " sols souples et revêtements muraux PVC " pour un montant de 402 007,33 euros hors taxe ; que le délai contractuel d'exécution de ce marché était de dix-huit mois, outre deux mois de préparation ; que la maîtrise d'oeuvre de ces travaux était assurée par le cabinet Garbit et Blondeau ; que la société Ulti Service, qui a contesté devant le tribunal administratif de Lyon le montant du décompte de son marché, relève appel du jugement du tribunal administratif qui a rejeté sa demande ;
2. Considérant, d'une part, qu'aux termes des premier et deuxième alinéas de l'article 13.32 du cahier des charges administratives générales (CCAG) annexé au décret du 21 janvier 1976 susvisé, relatif aux marchés de travaux et rendu applicable au marché litigieux par l'article 2 B) de son cahier des clauses administratives particulières (CCAP) : " Le projet de décompte final est remis au maître d'oeuvre dans le délai de quarante cinq jours à compter de la date de notification de la décision de réception des travaux telle qu'elle est prévue au 3 de l'article 41, ce délai étant réduit à quinze jours pour les marchés dont le délai d'exécution n'excède pas trois mois. / Toutefois, s'il est fait application des dispositions du 5 de l'article 41, la date du procès-verbal constatant l'exécution des prestations complémentaires est substituée à la date de notification de la décision de réception des travaux comme point de départ des délais ci-dessus " ; qu'aux termes de l'article 41.3 du même CCAG : " Au vu du procès-verbal des opérations préalables à la réception et des propositions du maître d'oeuvre, la personne responsable du marché décide si la réception est ou non prononcée ou si elle est prononcée avec réserves. Si elle prononce la réception, elle fixe la date qu'elle retient pour l'achèvement des travaux. La décision ainsi prise est notifiée à l'entrepreneur dans les quarante-cinq jours suivant la date du procès-verbal. / À défaut de décision de la personne responsable du marché notifiée dans le délai précisé ci-dessus, les propositions du maître d'oeuvre sont considérées comme acceptées. / La réception, si elle est prononcée ou réputée comme telle, prend effet à la date fixée pour l'achèvement des travaux " ; que les stipulations de l'article 9.2 du CCAP applicables au marché litigieux, si elles dérogent aux articles 41.1 à 41.3 du CCAG Travaux, ne prévoient toutefois aucune dérogation aux règles de délai fixées par ce dernier article ;
3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes des premier et troisième alinéas de l'article 13.44 du cahier des charges administratives générales auquel ne déroge pas le cahier des clauses administratives particulières applicable au marché litigieux : " L'entrepreneur doit, dans un délai compté à partir de la notification du décompte général, le renvoyer au maître d'oeuvre, revêtu de sa signature, sans ou avec réserves, ou faire connaître les raisons pour lesquelles il refuse de le signer. Ce délai est de trente jours, si le marché a un délai d'exécution inférieur ou égal à six mois. Il est de quarante-cinq jours, dans le cas où le délai contractuel d'exécution du marché est supérieur à six mois. / (...) Si la signature du décompte général est refusée ou donnée avec réserves, les motifs de ce refus ou de ces réserves doivent être exposés par l'entrepreneur dans un mémoire de réclamation qui précise le montant des sommes dont il revendique le paiement et qui fournit les justifications nécessaires en reprenant sous peine de forclusion, les réclamations déjà formulées antérieurement et qui n'ont pas fait l'objet d'un règlement définitif ; ce mémoire doit être remis au maître d'oeuvre dans le délai indiqué au premier alinéa du présent article. (...) " ; qu'aux termes de l'article 13.45 de ce même cahier : " Dans le cas où l'entrepreneur n'a pas renvoyé au maître d'oeuvre le décompte général signé dans le délai de trente jours ou de quarante-cinq jours, fixé au 44 du présent article, ou encore, dans le cas où, l'ayant renvoyé dans ce délai, il n'a pas motivé son refus ou n'a pas exposé en détail les motifs de ses réserves en précisant le montant de ses réclamations, ce décompte général est réputé être accepté par lui ; il devient le décompte général et définitif du marché " ;
4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la réception des travaux du lot n° 12B a eu lieu le 22 décembre 2009 avec effet à la date du 2 décembre 2009, assortie de nombreuses réserves mais portant essentiellement sur des finitions ; que cette décision de réception avec réserves a été notifiée à la société Ulti Service le 10 février 2010 ; que la société Ulti Service a envoyé son projet de décompte final, (élaboré dès le mois de décembre 2009) à Beterem, économiste de la maîtrise d'oeuvre, le 24 mai 2010 ; que, les dernières réserves ayant été levées le 19 mai 2010, le maître de l'ouvrage a décidé le 9 juillet 2010 que la réception était prononcée sans réserve avec effet à la date du 2 décembre 2009 et notifié cette décision à la société requérante le 21 juillet suivant ; que le décompte général a été notifié par ordre de service à la société requérante le 30 juillet 2010 qui l'a reçu le 3 août suivant ; qu'à la suite de cette notification, la société Ulti Service soutient qu'elle a renvoyé un mémoire en réclamation, dont elle produit au demeurant un exemplaire qui n'est ni daté ni signé, et fournit, à l'appui de sa requête, deux bordereaux d'envoi par Chronopost, datés du 10 septembre 2010, adressés au maître d'oeuvre, le cabinet Garbit et Blondeau ainsi qu'au cabinet AGH chargé de la mission d'ordonnancement, de pilotage et de coordination du chantier ;
5. Considérant que l'article 5.3 du CCAG précité précise que : " Lorsque, en exécution des dispositions du marché, un document doit être remis, dans un délai fixé, par l'entrepreneur au maître d'oeuvre, à la personne responsable du marché ou au maître de l'ouvrage, ou réciproquement, ou encore lorsque la remise d'un document doit faire courir un délai, le document doit être remis au destinataire contre récépissé ou lui être adressé par lettre recommandée avec demande d'avis de réception postal. La date du récépissé ou de l'avis de réception postal est retenue comme date de remise de document " ; que, comme l'ont relevé les premiers juges, il résulte des cases à cocher figurant sur ces bordereaux que l'expéditeur a exclu la remise dans la boîte aux lettres du destinataire et sélectionné la mise en instance et la remise contre signature ; qu'à eux seuls, ces bordereaux ne permettent pas d'établir que les plis ont effectivement été remis à leurs destinataires ; qu'en l'absence de toute autre preuve de remise du mémoire en réclamation au maître d'oeuvre en temps voulu, le centre hospitalier gériatrique du Mont d'Or, qui fait valoir que ni lui ni le cabinet Garbit et Blondeau n'ont reçu le mémoire en réclamation de la requérante, est fondé à soutenir que le décompte général était devenu définitif en application des stipulations précitées de l'article 13.45 du cahier des charges administratives générales applicable aux marchés de travaux ;
6. Considérant que, devant la cour, la société Ulti Service soutient qu'elle n'avait pas à respecter de délai pour transmettre sa réclamation dès lors que le décompte général qui lui a été notifié était irrégulier ; qu'il ne résulte toutefois pas de l'instruction que la procédure d'élaboration ou de notification du décompte général a été en l'espèce entachée d'irrégularité ; qu'en particulier, pour remettre en cause la régularité de l'élaboration du décompte général, la société Ulti Service ne peut se prévaloir de ce qu'elle a élaboré un projet de décompte final de façon prématurée avant la levée des réserves ; qu'elle ne peut pas davantage se prévaloir de ce qu'elle a notifié son projet de décompte final à Beterem, économiste de la maîtrise d'oeuvre et non au cabinet Garbit et Blondeau ; qu'en outre et en tout état de cause, comme il a été précédemment rappelé, contrairement à ce que soutient la requérante le décompte général lui a été notifié après la réception des travaux ; que, dès lors, la société Ulti Service n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Lyon a fait droit à la fin de non-recevoir soulevée par le centre hospitalier gériatrique du Mont d'Or ;
7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens soulevés par le centre hospitalier gériatrique du Mont d'Or tirés de l'irrecevabilité de la demande, que la société Ulti Service n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande de condamnation du centre hospitalier gériatrique du Mont d'Or à lui verser la somme de 103 840 euros HT outre les intérêts légaux ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
8. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du centre hospitalier gériatrique du Mont d'Or qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, quelle que somme que ce soit, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que la société Ulti Service, au titre de ces mêmes dispositions, versera au centre hospitalier gériatrique du Mont d'Or la somme de 1 500 euros ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la société Ulti Service est rejetée.
Article 2 : La société Ulti Service versera au centre hospitalier gériatrique du Mont d'Or la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société Ulti Service et au centre gériatrique du Mont d'Or.
Délibéré après l'audience du 26 mai 2016 où siégeaient :
- M. Mesmin d'Estienne, président,
- Mme Gondouin, premier conseiller,
- Mme Samson-Dye, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 16 juin 2016.
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N° 14LY01976