3°) de faire application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1503162 du 23 décembre 2016, le tribunal administratif de Dijon a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 18 février 2017, M. B..., représenté par la SCP Bon de Saulce Latour, avocats, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Dijon du 23 décembre 2016 ;
2°) d'annuler l'arrêté mentionné ci-avant du président du conseil départemental de la Nièvre du 27 mai 2015 en ce qu'il module l'indemnité spécifique de service ;
3°) d'enjoindre au président du conseil départemental de la Nièvre de lui verser l'arriéré des primes non réglées ;
4°) de mettre à la charge du département de la Nièvre une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement est irrégulier en ce que le mémoire qu'il a produit le 7 décembre 2016 n'a pas été pris en compte par les premiers juges, qui n'ont pas répondu aux moyens nouveaux développés dans ce mémoire ;
- le régime indemnitaire dont il bénéficie en application de la délibération du conseil départemental de la Nièvre du 2 février 2015 le place dans une situation d'inégalité avec les autres agents territoriaux de même grade et de même échelon ; il le place dans une situation d'inégalité avec d'autres agents intégrés au sein de la fonction publique territoriale en ce que d'autres ouvriers des parcs et ateliers intégrés au sein de la fonction publique territoriale au même grade et au même échelon bénéficient d'un régime plus favorable alors que les fonctions qu'ils exercent sont identiques aux siennes et que leur ancienneté est identique voire moindre ; l'intégration dans la fonction publique territoriale des ouvriers des parcs et ateliers des ponts et chaussées et des bases aériennes ne s'accompagnait d'aucun avantage, contrairement à ce qu'ont relevé les premiers juges ; l'indemnité spécifique de service est utilisée comme prime " compensatrice déguisée " ; il n'est pas établi que les agents dont l'indemnité est modulée exerceraient des fonctions différentes des autres membres de la fonction publique territoriale de grade et d'échelon équivalents ;
- les règles relatives à la modulation définies par la circulaire n° NOR : INTB0000062C du 22 mars 2000 n'ont pas été respectées.
Par un mémoire en défense, enregistré le 9 novembre 2018, le département de la Nièvre, représenté par Me Jousselin, avocate, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 500 euros soit mise à la charge du requérant au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir qu'aucun moyen de la requête n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;
- la loi n° 2009-1291 du 26 octobre 2009 relative au transfert aux départements des parcs de l'équipement et à l'évolution de la situation des ouvriers des parcs et ateliers ;
- le décret n° 91-875 du 6 septembre 1991 pris pour l'application du premier alinéa de l'article 88 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;
- le décret n° 2003-799 du 25 août 2003 relatif à l'indemnité spécifique de service allouée aux ingénieurs des ponts et chaussées et aux fonctionnaires des corps techniques de l'équipement ;
- le décret n° 2010-329 du 22 mars 2010 portant dispositions statutaires communes à divers cadres d'emplois de fonctionnaires de la catégorie B de la fonction publique territoriale ;
- le décret n° 2010-1357 du 9 novembre 2010 portant statut particulier du cadre d'emplois des techniciens territoriaux ;
- le décret n° 2014-456 du 6 mai 2014 fixant les conditions d'intégration dans les cadres d'emplois de la fonction publique territoriale des ouvriers des parcs et ateliers des ponts et chaussées et des bases aériennes ;
- le code de justice administrative.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Nathalie Peuvrel, première conseillère,
- les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public,
- et les observations de Me Jousselin représentant le département de la Nièvre ;
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ouvrier des parcs et ateliers au sein de l'agence " Nièvre Travaux et Matériels ", a demandé son intégration dans la fonction publique territoriale par application des dispositions de la loi du 26 octobre 2009 et du décret du 6 mai 2014 susvisés. Par un arrêté du président du conseil départemental de la Nièvre du 27 mai 2015, il a été intégré à compter du 1er janvier 2015 dans le cadre d'emplois des techniciens territoriaux, au onzième échelon du grade de technicien territorial principal de 2ème classe, avec une ancienneté conservée de deux ans et quatre mois. Par le même arrêté, lui est attribué un coefficient d'indemnité spécifique de service de 52,75 %, soit un montant mensuel de 254,56 euros. M. B... a formé un recours gracieux contre le régime indemnitaire ainsi défini. Le président du conseil départemental de la Nièvre a rejeté ce recours par une décision du 22 septembre 2015. M. B... relève appel du jugement du 23 décembre 2016 par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 27 mai 2015 en tant qu'il module le montant de l'indemnité spécifique de service.
Sur la légalité de l'arrêté du 27 mai 2015 en ce qu'il module l'indemnité spécifique de service :
2. D'une part, aux termes de l'article 88 de la loi susvisée du 26 janvier 1984 : " L'assemblée délibérante de chaque collectivité territoriale ou le conseil d'administration d'un établissement public local fixe les régimes indemnitaires (...) ". Aux termes de l'article 1er du décret du 6 septembre 1991 susvisé : " Le régime indemnitaire fixé par les assemblées délibérantes des collectivités territoriales et les conseils d'administration des établissements publics locaux pour les différentes catégories de fonctionnaires territoriaux ne doit pas être plus favorable que celui dont bénéficient les fonctionnaires de l'Etat exerçant des fonctions équivalentes. (...) ". Selon l'article 2 du même texte : " L'assemblée délibérante de la collectivité ou le conseil d'administration de l'établissement fixe, dans les limites prévues à l'article 1er, la nature, les conditions d'attribution et le taux moyen des indemnités applicables aux fonctionnaires de ces collectivités ou établissements. (...) L'autorité investie du pouvoir de nomination détermine, dans cette limite, le taux individuel applicable à chaque fonctionnaire. ". Il résulte de ces dispositions qu'il revient à l'assemblée délibérante de chaque collectivité territoriale de fixer elle-même la nature, les conditions d'attribution et le taux moyen des indemnités bénéficiant aux fonctionnaires de la collectivité, sans que le régime ainsi institué puisse être plus favorable que celui dont bénéficient les fonctionnaires de l'Etat d'un grade et d'un corps équivalents au grade et au cadre d'emplois de ces fonctionnaires territoriaux et sans que la collectivité soit tenue de faire bénéficier ses fonctionnaires de régimes indemnitaires identiques à ceux des fonctionnaires de l'Etat. Par ailleurs, le respect du principe d'égalité entre les agents publics ne s'oppose pas à l'institution de différences dans le régime indemnitaire dont ils bénéficient, fondées sur des différences dans les conditions d'exercice de leurs fonctions ou sur les nécessités du bon fonctionnement du service auquel ils appartiennent.
3. Par délibération du 2 février 2015, le conseil départemental de la Nièvre a, dans le cadre de l'intégration des ouvriers des parcs et ateliers à la fonction publique territoriale, prévu que l'indemnité spécifique de service leur serait attribuée individuellement en fonction des missions exercées. M. B... soutient que la modulation ainsi instituée crée une rupture d'égalité entre, d'une part, les agents intégrés et les agents en place et, d'autre part, les agents intégrés eux-mêmes.
4. Le département de la Nièvre a fait valoir devant les premiers juges que la prise en compte, en application de l'article 2 du décret du 6 mai 2014 susvisé, de deux primes pour la détermination de l'échelon avait abouti à intégrer les agents concernés à des échelons très élevés dans leur grade, ce qui a entrainé une amélioration de leur traitement de base. La modulation de l'indemnité spécifique de service allouée aux ouvriers des parcs et ateliers intégrés, qui conduit à attribuer cette indemnité individuellement en fonction non du grade et de l'ancienneté mais des missions exercées, a, selon le département, pour but de réduire le décalage, résultant de ces conditions d'intégration avantageuses, entre le grade des agents intégrés et leurs fonctions effectives afin de lisser les disparités entre ces derniers et les autres agents qui, à fonctions équivalentes, relèvent de grades moins élevés. Toutefois, il ne ressort pas de la fiche de poste détaillée de M. B... que ses fonctions de " Responsable des chantiers " ne correspondent pas aux missions incombant, en vertu des dispositions du II de l'article 2 du décret du 9 novembre 2010 portant statut particulier du cadre d'emplois des techniciens territoriaux, aux membres de ce cadre d'emplois titulaires des grades de technicien principal de 2ème et de 1ère classe, consistant à assurer le contrôle de chantiers, l'encadrement de personnel ou la gestion de matériel ou de services. Par suite, M. B... est fondé à soutenir que l'arrêté en litige, en ce qu'il assortit l'indemnité spécifique de service qui lui est attribuée d'un coefficient, le place dans une situation d'inégalité avec les autres agents territoriaux de même grade et de même échelon exerçant des fonctions similaires aux siennes et, sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement et sur les autres moyens de la requête, et à demander l'annulation de cet arrêté dans cette mesure.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
5. Eu égard aux motifs qui fondent l'annulation prononcée par le présent arrêt, il y a lieu d'enjoindre au département de la Nièvre de verser à M. B... la somme correspondant à la différence entre les sommes qu'il a perçues au titre de l'indemnité spécifique de service depuis le 1er janvier 2015 et la somme qu'il aurait perçue s'il avait bénéficié de cette indemnité à taux plein depuis cette date.
Sur les frais liés au litige :
6. Il y a lieu, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge du département de la Nièvre le versement d'une somme de 1 000 euros au titre des frais non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1503162 du tribunal administratif de Dijon du 23 décembre 2016 est annulé.
Article 2 : L'arrêté du président du conseil départemental de la Nièvre du 27 mai 2015 est annulé en ce qu'il module l'indemnité spécifique de service attribuée à M. B....
Article 3 : Il est enjoint au département de la Nièvre de verser à M. B... la somme correspondant à la différence entre les sommes qu'il a perçues au titre de l'indemnité spécifique de service depuis le 1er janvier 2015 et la somme qu'il aurait perçue s'il avait bénéficié de cette indemnité à taux plein depuis cette date.
Article 4 : Le département de la Nièvre versera à M. B... une somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au département de la Nièvre.
Copie en sera adressée au préfet de la Nièvre.
Délibéré après l'audience du 18 décembre 2018 à laquelle siégeaient :
M. Jean-François Alfonsi, président de chambre,
M. Pierre Thierry, premier conseiller,
Mme Nathalie Peuvrel, première conseillère.
Lu en audience publique, le 22 janvier 2019.
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N° 17LY00718