Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 20 novembre 2017, M. B..., représenté par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Dijon du 28 août 2017 ;
2°) d'annuler les décisions du 31 mai 2017 par lesquelles la préfète de la Côte-d'Or lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination en cas d'éloignement forcé ;
3°) d'enjoindre au préfet de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros, à verser à son conseil, sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- le jugement est irrégulier dès lors que c'est à tort que les premiers juges ont dispensé l'affaire d'instruction, qu'ils ont écarté les moyens tirés de ce que la décision d'éloignement est entachée d'une violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle et qu'ils n'ont pas répondu à son moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni d'ailleurs aux concluions en annulation de cette décision ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- la décision fixant le pays de destination méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 22 février 2018, la préfète de la Côte-d'Or conclut au rejet de la requête.
Elle fait valoir que :
- le jugement est régulier ;
- les moyens invoqués par l'appelant ne sont pas fondés.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 17 octobre 2017.
Par une ordonnance du 5 mars 2018, la clôture d'instruction a été fixée au 21 mars 2018.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Lesieux.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant de la République Démocratique du Congo, né le 15 mars 1965, est entré irrégulièrement en France à la date déclarée du 4 août 2016 muni de faux papiers angolais. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision du directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 31 janvier 2017, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 18 avril 2017. En conséquence, la préfète de la Côte-d'Or a, par un arrêté du 31 mai 2017, refusé à M. B... la délivrance d'un titre de séjour au titre de l'asile et a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et d'une décision fixant le pays de destination en cas d'éloignement forcé. Par un jugement du 28 août 2017, dont M. B... relève appel, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral du 31 mai 2017 en tant qu'il prononce à son encontre une mesure d'éloignement dans le délai de trente jours et fixe le pays de destination.
Sur la régularité du jugement :
2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 611-8 du code de justice administrative : " Lorsqu'il apparaît au vu de la requête que la solution de l'affaire est d'ores et déjà certaine, le président du tribunal administratif ou le président de la formation de jugement ou, à la cour administrative d'appel, le président de la chambre ou, au Conseil d'Etat, le président de la chambre peut décider qu'il n'y a pas lieu à instruction. ".
3. La circonstance que le président du tribunal administratif de Dijon a fait application de l'article R. 611-8 du code de justice administrative en dispensant d'instruction la demande présentée par M. B... n'affecte pas le respect du caractère contradictoire de la procédure à son égard et ne saurait, dès lors, être utilement invoquée par lui.
4. En deuxième lieu, si M. B... conteste l'appréciation portée par les premiers juges sur les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de la mesure d'éloignement sur sa situation personnelle, ce moyen n'est susceptible d'affecter que le bien-fondé du jugement et non sa régularité et ne peut qu'être écarté.
5. En dernier lieu, M. B...soutenait devant le tribunal administratif que la décision du 31 mai 2017 relative au pays de destination avait été prise en méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Le tribunal ne s'est pas prononcé sur ce moyen, qui n'était pas inopérant. Dès lors, en tant qu'il statue sur les conclusions de M. B... dirigées contre la décision de la préfète de la Côte-d'Or fixant le pays à destination duquel l'intéressé pourra être renvoyé en cas d'exécution d'office de l'obligation de quitter le territoire français, le jugement est irrégulier et doit être annulé dans cette mesure.
6. Il y a lieu pour la cour administrative d'appel, avant de se prononcer par la voie de l'évocation sur la décision fixant le pays de destination, de statuer dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel sur les conclusions relatives à la décision d'éloignement.
Sur la légalité des décisions contestées :
7. En premier lieu, M. B... déclare avoir rejoint en France sa compagne et leurs deux enfants majeurs, en situation régulière. Il soutient que Mme B...a créé une entreprise en France, qu'il l'aide dans le développement de son commerce et qu'il entend solliciter le réexamen de sa demande d'asile. Toutefois, il n'est pas contesté que Mme B...a quitté la République Démocratique du Congo avec leurs enfants en 2004 et que le couple a vécu séparément pendant douze ans. Par ailleurs, M. B... est entré récemment en France, en août 2016, à l'âge de 51 ans, après avoir vécu l'essentiel de sa vie dans son pays d'origine où il n'établit pas être dépourvu de toute attache familiale. Dans ces conditions, la préfète de la Côte-d'Or n'a pas, par la décision contestée, porté au droit de M. B... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cette décision a été prise. Elle ne méconnaît dès lors pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas davantage entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé.
8. En second lieu, si M. B... soutient que sa soeur est décédée dans des conditions dramatiques en République Démocratique du Congo et qu'il envisage de demander le réexamen de sa demande d'asile, il n'apporte à la cour, et ce, alors que sa demande d'asile a été définitivement rejetée par la Cour nationale du droit d'asile le 18 avril 2017, aucun élément de nature à établir l'existence de risques directs et personnels qu'il encourrait en cas de retour dans son pays d'origine. Le moyen tiré de ce que la décision en litige méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit donc être écarté.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 31 mai 2017 de la préfète de la Côte-d'Or l'obligeant à quitter le territoire français, ni à demander l'annulation de la décision du même jour fixant le pays de renvoi en cas d'exécution d'office. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1701640 du tribunal administratif de Dijon du 28 août 2017 est annulé en tant qu'il a statué sur les conclusions de M. B... à l'encontre de la décision du 31 mai 2017 de la préfète de la Côte-d'Or fixant le pays de renvoi en cas d'exécution d'office.
Article 2 : Les conclusions présentées par M. B... devant le tribunal administratif et dirigées contre la décision fixant le pays de destination ainsi que le surplus de ses conclusions d'appel sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., au préfet de la Côte-d'Or et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 13 décembre 2018, à laquelle siégeaient :
M. d'Hervé, président de chambre,
Mme Michel, président-assesseur,
Mme Lesieux, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 10 janvier 2019.
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N° 17LY03943