Procédure devant la Cour :
I. Par une requête enregistrée sous le n° 15MA04469 le 26 novembre 2015, M. D..., représenté par Me A..., demande à la Cour :
1°) de prononcer le sursis à exécution de ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 9 avril 2015 ;
2°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, dans le délai de 15 jours à compter de l'arrêt à intervenir ;
Il soutient que :
- le jugement attaqué risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables dès lors qu'il est présent en France depuis de nombreuses années et y a fixé le centre de ses intérêts personnels et professionnels ;
- lorsque l'étranger est comme lui déjà présent sur le territoire national, c'est le préfet qui est compétent pour délivrer l'autorisation de travail ; le refus de séjour ne pouvait donc se fonder sur le défaut de visa du contrat de travail au regard de l'article 3 de l'accord franco-marocain et de l'article L. 5221-2 du code du travail ;
- il ressort de la décision attaquée que M. B..., rattaché au ministère de l'intérieur, a refusé l'autorisation de travail ; il n'était pas compétent, seul le préfet ou un fonctionnaire rattaché à la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) était compétent ;
- il justifie s'être intégré socio-professionnellement en France où il est présent depuis 2006 et où se trouvent sa soeur et son frère ; la décision attaquée a porté une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision attaquée qui mentionne que l'ensemble de sa fratrie réside au Maroc est entachée d'erreur de fait.
Par un mémoire en défense, enregistré le 18 décembre 2015, le préfet des Bouches-du-Rhône conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que :
- le requérant ne justifie pas que l'exécution du jugement emportera des conséquences difficilement réparables ;
- les moyens de la requête son mal-fondés.
M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 30 novembre 2015.
II. Par une requête enregistrée sous le n° 15MA04470 le 26 novembre 2015, M. D..., représenté par Me A..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 9 avril 2015 ;
2°) d'annuler l'arrêté précité ;
3°) en application des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative, à titre principal, d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt et à titre subsidiaire de procéder à une nouvelle instruction de sa demande ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2400 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 à verser à son conseil qui renonce dans ce cas à percevoir la part contributive de l'Etat due au titre de l'aide juridictionnelle ;
Il soutient que :
- lorsque l'étranger est comme lui déjà présent sur le territoire national, c'est le préfet qui est compétent pour délivrer l'autorisation de travail ; le refus de séjour ne pouvait donc se fonder sur le défaut de visa du contrat de travail au regard de l'article 3 de l'accord franco-marocain et de l'article L. 5221-2 du code du travail ;
- il ressort de la décision attaquée que M. B..., rattaché au ministère de l'intérieur, a refusé l'autorisation de travail ; il n'était pas compétent, seul le préfet ou un fonctionnaire rattaché à la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) était compétent ;
- il justifie s'être intégré socio-professionnellement en France où il est présent depuis 2006 et où résident sa soeur et son frère ; la décision attaquée a porté une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision attaquée qui mentionne que l'ensemble de sa fratrie réside au Maroc est entachée d'erreur de fait.
Par un mémoire en défense, enregistré le 18 décembre 2015, le préfet des Bouches-du-Rhône conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir qu'il s'en rapporte à ses écritures de première instance.
M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 30 octobre 2015.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-marocain en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Gougot a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que, par arrêté du 31 octobre 2013, le préfet des Bouches-du-Rhône a rejeté la demande de titre de séjour que lui avait présentée le 7 mai 2013 M. D..., ressortissant marocain, sur le fondement de l'article 3 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987, et des articles L. 313-11 7° et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et a assorti cette décision d'une invitation à quitter le territoire français dans un délai de trente jours ; que, par une requête enregistrée sous le numéro 15MA04470, M. D... interjette appel du jugement du 9 avril 2015 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ; que, par une seconde requête enregistrée le même jour sous le numéro 15MA004469, il demande à la Cour de surseoir à l'exécution dudit jugement ;
Sur la jonction :
2. Considérant que les affaires enregistrées sous les numéros 15MA04469 et 15MA04470 sont dirigées contre le même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un même arrêt ;
Sur les conclusions en annulation :
3. Considérant que l'arrêté attaqué a été signé par M. B..., attaché principal, chef du bureau des mesures administratives, du contentieux, et des examens spécialisés, qui avait reçu délégation de signature du préfet de ce département, par arrêté n° 2013290-0005 du 17 octobre 2013, l'autorisant à signer tout document relatif à la procédure d'admission au séjour ; que le requérant ne peut utilement soutenir, à l'appui de ses conclusions tendant à la seule annulation du refus de séjour, et non du refus d'autorisation de travail, que le préfet, en sa qualité d'autorité compétente pour délivrer l'autorisation de travail, ne peut accorder de délégation qu'à un fonctionnaire rattaché au ministère du travail et non au ministère de l'intérieur ;
4. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de l'accord franco-marocain susvisé : " Les ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1er du présent Accord, reçoivent, après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention " salarié " éventuellement assortie de restrictions géographiques ou professionnelles (...) " ; qu'aux termes de l'article 9 de cette même convention : " Les dispositions du présent Accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'Accord (...) " ; que selon l'article L. 311-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, l'octroi de la carte de séjour temporaire (...) sont subordonnées à la production par l'étranger d'un visa pour un séjour supérieur à trois mois. " ; que l'article L. 5221-2 du code du travail dispose : " Pour entrer en France en vue d'y exercer une profession salariée, l'étranger présente : 1° Les documents et visas exigés par les conventions internationales et les règlements en vigueur ; 2° Un contrat de travail visé par l'autorité administrative ou une autorisation de travail " ; qu'aux termes de l'article R. 5221-1 du même code : " Pour exercer une activité professionnelle en France, les personnes suivantes doivent détenir une autorisation de travail [...] /1° Etranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse ; (...) " ; que l'article R. 5221-3 du même code prévoit : " L'autorisation de travail peut être constituée par l'un des documents suivants : (...) / 6° La carte de séjour temporaire portant la mention salarié, délivrée sur présentation d'un contrat de travail d'une durée égale ou supérieure à douze mois conclu avec un employeur établi en France, en application du 1° de l'article L. 313-10 du même code ou le visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois mentionné au 7° de l'article R. 311-3 du même code, accompagné du contrat de travail visé ; (...) ; qu'aux termes de l'article R. 5221-11 dudit code : " La demande d'autorisation de travail relevant des 5°, 6°, 7°, 8°, 9°, 9° bis, 12° et 13° de l'article R. 5221-3 est faite par l'employeur. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 5221-14 de ce code : " Peut faire l'objet de la demande prévue à l'article R. 5221-11 l'étranger résidant hors du territoire national ou, lorsque la détention d'un titre de séjour est obligatoire, l'étranger résidant en France sous couvert d'une carte de séjour, d'un récépissé de demande ou de renouvellement de carte de séjour ou d'une autorisation provisoire de séjour. " ; qu'aux termes de l'article R. 5221-15 du même code : " Lorsque l'étranger est déjà présent sur le territoire national, la demande d'autorisation de travail mentionnée à l'article R. 5221-11 est adressée au préfet de son département de résidence. " ;
5. Considérant qu'il résulte de ces dernières dispositions qu'il appartient au préfet d'instruire les demandes d'autorisation de travail présentées par les étrangers ; que, par suite, le préfet ne pouvait légalement refuser la carte de séjour mention " salarié " au motif que M. D... ne présentait pas de contrat de travail visé par les autorités compétentes ; que, toutefois, il est constant que dans sa décision le préfet des Bouches-du-Rhône se fondait également sur le fait que l'intéressé n'était pas titulaire du visa de long séjour prévu par l'article L. 311-7 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que ce motif suffit à justifier le refus de séjour en qualité de salarié opposé à l'intéressé ;
6. Considérant que contrairement à ce que soutient le requérant, la décision attaquée, qui ne mentionne pas la fratrie de l'intéressé, n'est pas entachée d'erreur de fait pour indiquer à tort que l'ensemble de la fratrie de M. D... résiderait au Maroc ;
7. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales: " 1- Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2- Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; que M. D... est entré en France le 7 novembre 2007 sous couvert d'un contrat de travail en qualité de " travailleur saisonnier " et déclare s'y être maintenu depuis cette date, en méconnaissance de son engagement à maintenir sa résidence habituelle hors de France prévue pour ce type de contrat ; qu'à supposer même qu'il se soit maintenu sur le territoire national depuis cette date, et alors même que plusieurs membres de sa famille sont en situation régulière en France ou sont de nationalité française, le préfet n'a toutefois pas, en refusant son admission au séjour, porté une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale au regard des stipulations précitées de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales alors qu'il est célibataire et a passé la majeur partie de sa vie dans son pays d'origine où réside encore une partie de sa fratrie ; que, par ailleurs, il ne justifie pas s'être intégré socio-professionnellement en France par la production de bulletins de salaire sur des périodes discontinues en qualité de travailleur saisonnier de 2006 à 2010, puis depuis 2010 de bulletins de salaire et d'un contrat à durée indéterminée de 20 heures hebdomadaires portées par avenant du 1er mars 2011 à 35 heures hebdomadaires et enfin d'un contrat à durée indéterminée du 30 mars 2013 pour une durée de travail de 20 heures hebdomadaires, alors notamment qu'il se disait hébergé par un tiers dans sa demande de titre de séjour ; que, par suite, M. D... n'est pas fondé à soutenir que la décision attaquée est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, les conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
Sur les conclusions à fin de sursis à statuer :
9. Considérant que le présent arrêt statuant sur l'appel présenté contre le jugement n°1401236 du 9 avril 2015, les conclusions de la requête n° 14MA04469 tendant à ce qu'il soit sursis à son exécution sont devenues sans objet ; qu'il n'y a plus lieu d'y statuer ;
D É C I D E :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. D... enregistrée sous le n° 14MA004469.
Article 2 : La requête enregistrée sous le n° 14MA04470 est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... D...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.
Délibéré après l'audience du 4 mai 2016, où siégeaient :
- M. d'Hervé, président de chambre,
- Mme Josset, présidente assesseure,
- Mme Gougot, première conseillère.
Lu en audience publique, le 26 mai 2016.
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N° 15MA04469, 15MA04470