Procédure devant la cour :
I. Par une requête et un mémoire, enregistrés sous le n° 18NC01540 les 23 mai, 19 juillet et 20 novembre 2018, M. A... B..., représenté par MeD..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1702012 du 18 janvier 2018 du tribunal administratif de Besançon ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Doubs du 19 juin 2017 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Doubs : à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans un délai de 8 jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir ; subsidiairement, de lui délivrer, dans le même délai, une autorisation provisoire de séjour, à renouveler dans l'attente du réexamen de son droit au séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros à verser à son avocate au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
M. B...soutient que :
- le préfet a méconnu les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, eu égard à l'état de santé de sa soeur, qu'il assiste, aux menaces auxquelles il serait exposé en cas de retour dans son pays d'origine, au caractère sérieux de sa promesse d'embauche, à son implication dans le milieu associatif et à l'ancienneté de son séjour en France ;
- le préfet a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, eu égard à son absence d'attaches dans son pays d'origine et aux liens qu'il a tissés en France, où il est parfaitement intégré ;
- l'obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité du refus de séjour ;
- l'interdiction de retour sur le territoire français est illégale du fait de l'illégalité du refus de séjour ;
- l'interdiction de retour sur le territoire français est illégale dès lors que l'état de santé de sa soeur nécessite qu'ils reviennent au moins occasionnellement en France ;
- la prolongation de la durée de l'interdiction de retour sur le territoire français est illégale dès lors que la raison pour laquelle il n'a pas déféré à la précédente obligation de quitter le territoire français dont il a fait objet tient à ce qu'il était dans l'attente du réexamen de sa demande d'asile ;
- la décision fixant le pays de destination est illégale du fait de l'illégalité du refus de séjour ;
- la décision fixant le pays de destination méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par un mémoire en défense, enregistré le 27 juin 2018, le préfet du Doubs conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par le requérant n'est fondé.
Le 8 novembre 2018, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'irrecevabilité des conclusions à fin d'annulation dirigées contre l'obligation de quitter le territoire français.
Le 8 novembre 2018, M. B...a présenté des observations à la suite de cette information.
II. Par une requête et des mémoires, enregistrés sous le n° 18NC01541 les 19 et 25 juillet 2018 et le 20 novembre 2018, Mme C...B..., représentée par MeD..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1702009 du 18 janvier 2018 du tribunal administratif de Besançon ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Doubs du 19 juin 2017 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Doubs : à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans un délai de 8 jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir ; subsidiairement, de lui délivrer, dans le même délai, une autorisation provisoire de séjour, à renouveler dans l'attente du réexamen de son droit au séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros à verser à son avocate au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Mme B...soutient que :
- le préfet a méconnu les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, eu égard à son état de santé et à l'impossibilité de bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine, aux menaces auxquelles elle serait exposée en cas de retour dans son pays d'origine, au caractère sérieux de la promesse d'embauche dont bénéficie son frère, à son implication dans le milieu associatif et sportif, et à l'ancienneté de son séjour en France ;
- le préfet a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, eu égard à son absence d'attaches dans son pays d'origine et aux liens qu'elle a tissés en France, où elle est parfaitement intégrée ;
- l'obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité du refus de séjour ;
- l'interdiction de retour sur le territoire français est illégale du fait de l'illégalité du refus de séjour ;
- l'interdiction de retour sur le territoire français est illégale dès lors que son état de santé nécessite qu'elle revienne au moins occasionnellement en France ;
- la prolongation de la durée de l'interdiction de retour sur le territoire français est illégale dès lors que la raison pour laquelle elle n'a pas déféré à la précédente obligation de quitter le territoire français dont elle a fait objet tient à ce qu'elle était dans l'attente du réexamen de sa demande d'asile ;
- la décision fixant le pays de destination est illégale du fait de l'illégalité du refus de séjour ;
- la décision fixant le pays de destination méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par un mémoire en défense, enregistré le 27 juin 2018, le préfet du Doubs conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par la requérante n'est fondé.
Le 8 novembre 2018, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'irrecevabilité des conclusions à fin d'annulation dirigées contre l'obligation de quitter le territoire français.
Le 8 novembre 2018, Mme B...a présenté des observations à la suite de cette information.
M. B...et Mme B...ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par deux décisions du 20 mars 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991,
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.
Le rapport de M. Rees, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
Une note en délibéré présentée par Mme B...a été enregistrée le 20 décembre 2018.
Considérant ce qui suit :
1. Mme C...B...et son frère, M. A...B..., de nationalitéC..., nés respectivement les 25 mars 1984 et 20 septembre 1987, sont entrés irrégulièrement en France, selon leurs déclarations, le 21 novembre 2013. Chacun d'entre eux a déposé une demande d'asile, M. B...sollicitant, en outre, son admission au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, tandis que Mme B... sollicitait, en outre, la délivrance d'un titre de séjour en raison de son état de santé. A la suite du rejet des demandes d'asile des appelants, le préfet du Doubs, par des arrêtés du 22 juin 2015, a refusé de leur délivrer un titre de séjour et les a obligés à quitter le territoire français. Par des jugements du 10 décembre 2015, devenus définitifs, le tribunal administratif de Besançon a rejeté leurs demandes dirigées contre ces arrêtés. M. et Mme B... ont alors, le 2 mai 2016, sollicité le réexamen de leurs demandes d'asile. Ces nouvelles demandes ont été rejetées comme irrecevables par décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 23 mai 2016. La délivrance d'un titre de séjour leur a une nouvelle fois été refusée le 21 juillet 2016 par le préfet du Doubs, qui les a derechef obligés à quitter le territoire français et leur a, en outre, interdit de revenir en France pendant une durée de deux ans. Les demandes des intéressés dirigées contre ces décisions ont été rejetées par des jugements du tribunal administratif de Besançon du 23 décembre 2016, devenus définitifs. Le 13 février 2017, M. et Mme B...ont sollicité la régularisation de leur situation sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par des arrêtés du 19 juin 2017, le préfet du Doubs a refusé de leur délivrer un titre de séjour, a fixé le pays à destination duquel ils pourront être reconduits d'office et a prolongé de deux ans la durée de leur interdiction de retour sur le territoire français décidée le 21 juillet 2016.
2. Par une requête enregistrée sous le n° 18NC01540, M. A...B...relève appel du jugement n° 1702012 du 18 janvier 2018 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté le concernant. Par une requête enregistrée sous le n° 18NC01541, Mme C...B...relève appel du jugement n° 1702009 du 18 janvier 2018 par lequel le même tribunal a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté la concernant.
3. Les requêtes nos 18NC01540 et 18NC01541 concernent un frère et une soeur dont les situations sont liées et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.
Sur la recevabilité des conclusions relatives à des obligations de quitter le territoire français :
4. Les arrêtés contestés ne contiennent aucune décision portant obligation de quitter le territoire français et les jugements attaqués n'en font pas mention. Les conclusions des requérants, en ce qu'elles tendent à l'annulation des jugements attaqués en tant qu'ils auraient rejetés leurs conclusions relatives à des obligations de quitter le territoire français sont donc sans objet et, par suite, irrecevables.
Sur la légalité des arrêtés contestés :
En ce qui concerne les décisions de refus de séjour :
5. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2 ".
6. La réalité des risques auxquels les requérants soutiennent qu'ils seraient exposés en cas de retour dans leur pays d'origine n'est pas établie, et il ne ressort pas des pièces du dossier que l'état de santé de MmeB..., qui souffre d'une tétraplégie de niveau neurologique C8, présente une gravité ou des particularités permettant de considérer que leur admission au séjour répondrait, à l'évidence, à des considérations humanitaires ou se justifierait au regard des motifs qu'ils font valoir. Il en va de même de l'implication des requérants dans le milieu associatif, de leurs efforts d'intégration, de la promesse d'embauche dont bénéficie M. B...et de l'ancienneté de leur séjour. Dans ces conditions, les appelants ne sont pas fondés à soutenir que le préfet s'est livré à une appréciation manifestement erronée de leur situation au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précité.
7. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° - Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance - 2° - Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
8. Les requérants, présents en France depuis trois ans et demi à la date des arrêtés attaqués, n'y possèdent aucune attache familiale et les liens personnels qu'ils soutiennent y avoir tissés sont récents et ne présentent ni une intensité, ni une stabilité particulières. Par ailleurs, ils font tous deux l'objet d'une obligation de quitter le territoire français et s'ils soutiennent être dépourvus de toute attache familiale dans leur pays d'origine, ils n'établissent pas ne plus y posséder d'attache personnelle, alors que M. B...y a vécu jusqu'à l'âge de 26 ans et MmeB..., jusqu'à l'âge de 29 ans. Dans ces conditions, ils ne sont pas fondés à soutenir qu'en refusant de leur délivrer un titre de séjour, le préfet a porté à leur droit au respect de leur vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels il a pris ces décisions.
En ce qui concerne la prolongation de la durée des interdictions de retour sur le territoire français :
9. Aux termes du septième alinéa du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors applicable : " Lorsque l'étranger faisant l'objet d'une interdiction de retour s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai de départ volontaire ou alors qu'il était obligé de quitter sans délai le territoire français ou, ayant déféré à l'obligation de quitter le territoire français, y est revenu alors que l'interdiction de retour poursuit ses effets, l'autorité administrative peut prolonger cette mesure pour une durée maximale de deux ans ".
10. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que les décisions prolongeant la durée des interdictions de retour sur le territoire français sont illégales du fait de l'illégalité des décisions de refus de séjour.
11. En deuxième lieu, il n'est pas établi que l'état de santé de Mme B...nécessite qu'elle revienne au moins occasionnellement en France en compagnie de son frère. En outre, à supposer que cela soit le cas, il leur sera loisible de solliciter à tout moment l'abrogation de l'interdiction de retour, comme le III de l'article L. 511-1 en prévoit la possibilité.
12. En troisième lieu, il est constant que M. et Mme B...se sont maintenus sur le territoire au-delà du délai de départ volontaire que leur a accordé le préfet du Doubs en les obligeant, par ses arrêtés du 21 juillet 2016, à quitter le territoire français, en dépit de l'interdiction qui leur a été faite, par les mêmes arrêtés, de revenir en France pendant une durée de deux ans. Dès lors, la circonstance qu'ils se soient maintenus sur le territoire français dans l'attente de l'examen, par la Cour nationale du droit d'asile, de leurs recours contre les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 23 mai 2016, ne faisait pas, par elle-même, obstacle à ce que le préfet puisse légalement décider de prolonger la durée de leurs interdictions de retour.
En ce qui concerne les décisions fixant le pays de destination :
13. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que les décisions fixant le pays de destination sont illégales du fait de l'illégalité des décisions de refus de séjour.
14. En second lieu, aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ". L'article 3 de cette convention stipule que : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".
15. Les requérants, dont les demandes d'asile ont été rejetées par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile, ne font état que d'éléments déjà soumis à ces instances, et qui ne suffisent pas à établir la réalité des risques allégués de traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Dès lors, ils ne sont pas fondés à soutenir que le préfet a méconnu ces stipulations et les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précité.
16. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le tribunal administratif de Besançon a rejeté leurs demandes. Leurs conclusions à fin d'annulation ainsi que, par voie de conséquence, leurs conclusions à fin d'injonction et d'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : Les requêtes de Mme C...B...et de M. A...B...sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...B..., à M. A...B...et au ministre de l'intérieur.
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Nos 18NC01540 et 18NC01541