Par un jugement n° 1502378 du 25 août 2015, le magistrat délégué du tribunal administratif de Nancy a rejeté la demande de M.B....
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 25 septembre 2015, M.B..., représenté par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1502378 du 25 août 2015 du tribunal administratif de Nancy ;
2°) d'annuler les décisions du préfet du Bas-Rhin du 20 août 2015 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de l'expiration d'un délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, en application des dispositions des articles L. 911-2 et L. 911-3 du code de justice administrative ou subsidiairement de l'assigner à résidence le temps de régulariser sa situation ;
4°) d'ordonner une expertise médicale pour déterminer la compatibilité de la rétention avec son état de santé ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
M. B...soutient que :
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
- elle est entachée d'incompétence ;
- elle est insuffisamment motivée ;
- elle est entachée d'un vice de procédure en l'absence de saisine du médecin de l'agence régionale de santé ;
- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;
- elle est entachée d'une erreur de fait ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 6-7 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
- elle porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de la vie privée et familiale et méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :
- elle est entachée d'incompétence ;
- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision de l'obligation de quitter le territoire français sur laquelle elle se fonde.
Par un mémoire enregistré le 18 avril 2016 le préfet du Bas-Rhin a conclu au rejet de la requête.
Vu les autres pièces du dossier.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.
Le rapport de M. Richard, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C...B..., de nationalité algérienne, est entré régulièrement en France, muni d'un visa de court séjour, au mois d'avril 2012. Par un arrêté du préfet de l'Hérault du 27 septembre 2012, devenu définitif, M. B...a fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire.
2. Par un arrêté du 20 août 2015, le préfet du Bas-Rhin l'a obligé à quitter le territoire français, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire, a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit et l'a placé en rétention dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire pour une durée de cinq jours.
3. M. B...relève appel du jugement du 25 août 2015 par lequel le magistrat délégué du tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 20 août 2015.
Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :
4. En premier lieu, M. B...reprend en appel les moyens qu'il avait invoqués en première instance et tirés de l'incompétence de l'auteur de l'acte, de l'insuffisante motivation de la décision litigieuse et de l'erreur de fait, Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif de Nancy.
5. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, applicable aux mesures d'éloignement prononcées à l'encontre de ressortissants algériens : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) / 10° L' étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé (...) ". L'article R. 511-1 du même code dispose : " L'état de santé défini au 10° de l'article L. 511-4 est constaté dans les mêmes conditions que celles qui sont prévues aux deux premiers alinéas de l'article R. 313-22 ". Aux termes de l'article R. 313-22 auquel il est ainsi renvoyé : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin inspecteur départemental de la santé publique compétent au regard du lieu de résidence de l'intéressé (...). L 'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de la population et des migrations, du ministre chargé de la santé et du ministre de l'intérieur, au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de traitement dans le pays d'origine de l'intéressé ". Il résulte de l'ensemble de ces dispositions, qu'avant de prononcer une mesure d'obligation de quitter le territoire à l'encontre d'un étranger résidant habituellement en France, qui a sollicité son maintien sur le territoire compte tenu de son état de santé en justifiant d'éléments suffisamment précis sur la nature et la gravité des troubles dont il souffre, l'autorité préfectorale doit recueillir l'avis du médecin de l'agence régionale de santé.
6. Il ne ressort d'aucune pièce du dossier que M.B..., s'il a été opéré d'une hernie discale, ait sollicité son maintien sur le territoire français compte tenu de son état de santé. En tout état de cause et à supposer même que la seule production d'une fiche de rendez-vous auprès du centre d'accueil et de soins de Médecins du monde puisse suffire à justifier d'une telle demande qu'il n'a pas exprimée lors de son entretien au centre de rétention, il ne ressort pas non plus des certificats médicaux et d'hospitalisation pas plus que des ordonnances versées au dossier que M. B...qui s'est borné à faire état sans autres détails d'une opération chirurgicale antérieure, ait fait état d'éléments nouveaux et suffisamment précis sur la nature et la gravité des troubles particuliers justifiant que l'avis du médecin de l'agence régionale de santé soit requis préalablement à l'obligation de quitter le territoire français litigieuse. Enfin, l'intéressé ne produit aucun élément probant de nature à établir que son état de santé nécessiterait une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et pour lequel il n'existerait pas de traitement approprié en Algérie.
7. Le moyen tiré de l'absence de saisine du médecin de l'agence régionale de santé et de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit ainsi être écarté.
8. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Les dispositions du présent article ainsi que celles des deux articles suivants, fixent les conditions de délivrance et de renouvellement du certificat de résidence aux ressortissants algériens établis en France ainsi qu'à ceux qui s'y établissent, sous réserve que leur situation matrimoniale soit conforme à la législation française. Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit: (...) / 5. Au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ".
9. M. B...soutient qu'il justifie d'une bonne insertion en France où résident de nombreux cousins et cousines ainsi qu'une ressortissante française avec laquelle il vit en couple depuis juillet 2015 et qu'il a produit de nombreuses attestations en ce sens.
10. Il ressort toutefois des pièces du dossier que l'intéressé est entré en France au mois d'avril 2012 et a fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français du 27 septembre 2012 qu'il n'a pas exécutée. Il ne conteste pas qu'à la date de la décision litigieuse il disposait encore d'attaches familiales en Algérie où il a résidé habituellement jusqu'à l'âge de 32 ans. En outre, la relation conjugale dont il se prévaut est extrêmement récente, n'ayant qu'un mois à la date de la décision litigieuse.
11. Dans ces conditions et malgré ses efforts d'intégration, M. B...n'est pas fondé à soutenir qu'en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, le préfet du Bas-Rhin a porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de la vie privée et familiale en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
12. Il ne ressort pas plus des pièces du dossier que cette décision serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé.
Sur la légalité de la mesure de placement en rétention :
13. En premier lieu, M. B...reprend en appel le moyen qu'il avait invoqué en première instance et tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif de Nancy.
14. En deuxième lieu, il résulte de ce qui a été dit aux points 4 à 12 ci-dessus que le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision le plaçant en rétention doit être annulée en conséquence de l'illégalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français.
15. En conclusion de ce qui précède, M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement contesté, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 20 août 2015 par lesquelles le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination. Il y a lieu de rejeter, par voie de conséquence, les conclusions aux fins d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Par ces motifs,
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...B...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de Meurthe-et-Moselle.
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N° 15NC01971