Par une requête enregistrée le 30 septembre 2015 complétée par des pièces enregistrées le 22 avril 2016, MmeC..., représentée par MeB..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Aube de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir et de lui délivrer durant cet examen une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement à Me B...d'une somme de 1 500 euros en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Elle soutient que :
En ce qui concerne le refus de titre de séjour :
- la décision est insuffisamment motivée ;
- elle méconnait les dispositions de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors que le préfet ne justifie pas que l'arrêt de la Cour nationale du droit d'asile lui avait été notifié préalablement à sa décision ;
- elle méconnaît les dispositions du 8° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour et du droit d'asile dès lors qu'elle est exposée à des risques de persécutions en cas de retour dans son pays d'origine ;
- le jugement est entaché d'omission à statuer sur le moyen tiré du défaut de base légale de la décision de refus de séjour.
En ce qui concerne la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français :
- la décision est illégale du fait de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;
- elle méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnait les stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
- elle méconnait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle et familiale ;
- le jugement est entaché d'omission à statuer sur le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de la décision sur sa situation.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
- la décision est entachée d'incompétence ;
- la décision méconnait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par un mémoire en défense enregistré le 29 octobre 2015, le préfet de l'Aube conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
Par une décision en date du 10 septembre 2015, Mme C...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
Vu :
- les autres pièces du dossier ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de Mme Stefanski, président, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. MmeC..., ressortissante congolaise (République démocratique du Congo), est entrée en France le 15 août 2013 selon ses déclarations afin d'y solliciter la reconnaissance du statut de réfugié. Sa demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides par une décision du 25 février 2014, décision confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 1er octobre 2014.
2. Par arrêté du 19 novembre 2014, le préfet de l'Aube a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être éloignée. Mme C...relève appel du jugement du 8 avril 2015 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la régularité du jugement attaqué :
3. Si Mme C...fait valoir que le tribunal administratif n'a pas répondu au moyen tiré du défaut de base légale à l'encontre de la décision de refus de séjour et au moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de la décision sur sa situation à l'encontre de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français, il ressort du jugement attaqué qu'il a répondu à ces deux moyens dans les points 4 et 11. Ainsi, le jugement attaqué n'est pas entaché d'omission à statuer.
Sur le bien fondé du jugement :
En ce qui concerne la décision de refus de titre :
4. Mme C...reprend en appel le moyen qu'elle avait invoqué en première instance et tiré de l'insuffisance de motivation de la décision de refus de titre. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.
5. Aux termes de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger admis à séjourner en France bénéficie du droit de s'y maintenir jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou, si un recours a été formé, jusqu'à la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile (...) ".
6. Il résulte de ces dispositions que l'étranger qui demande l'asile a le droit de séjourner sur le territoire national à ce titre jusqu'à ce que la décision rejetant sa demande lui ait été notifiée régulièrement par l'OFPRA ou, si un recours a été formé devant elle, par la Cour nationale du droit d'asile. En l'absence d'une telle notification, l'autorité administrative ne peut regarder l'étranger à qui l'asile a été refusé comme ne bénéficiant plus de son droit provisoire au séjour ou comme se maintenant irrégulièrement sur le territoire. En cas de contestation sur ce point, il appartient à l'autorité administrative de justifier que la décision de la Cour nationale du droit d'asile a été régulièrement notifiée à l'intéressé, le cas échéant en sollicitant la communication de la copie de l'avis de réception auprès de la cour.
7. Il ressort des pièces produites par le préfet de l'Aube que la Cour nationale du droit d'asile a notifié à la requérante la décision du 1er octobre 2014 par lettre recommandée avec accusé de réception envoyée le 8 octobre et notifiée le 22 octobre et que la cour a notifié sa décision du 17 octobre 2014 par lettre recommandée avec accusé de réception envoyée le 20 octobre 2014 et notifiée le 23 octobre 2014. Ainsi, la requérante ne bénéficiait plus, à la date de l'arrêté contesté, du droit de se maintenir en France sur le fondement de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
8. La décision de refus de titre de séjour n'implique pas, par elle-même, le retour de l'intéressée dans son pays d'origine. Par suite, la requérante ne peut utilement se prévaloir des risques qu'elle encourt en cas de retour dans son pays d'origine à l'encontre de cette décision.
En ce qui concerne la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français :
9. Mme C...reprend en appel les moyens qu'elle avait invoqués en première instance et tirés de l'insuffisance de motivation de la décision portant obligation de quitter le territoire français, de l'illégalité par voie d'exception de cette décision et de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.
10. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
11. Si la requérante fait valoir qu'elle s'est bien intégrée en France et que deux de ses enfants y sont scolarisés, il ressort toutefois des pièces du dossier qu'elle n'est entrée en France que récemment, soit un an et trois mois à la date de la décision attaquée, et qu'elle n'établit ni même n'allègue y posséder des attaches familiales. En outre, elle n'établit pas ne plus posséder d'attaches dans son pays d'origine, la République démocratique du Congo, où elle a résidé durant 29 ans. Par suite, les moyens tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de cette décision sur sa situation personnelle et familiale doivent être écartés.
12. Aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions politiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant. Elles sont applicables non seulement aux décisions qui ont pour objet de régler la situation personnelle d'enfants mineurs, mais aussi à celles qui ont pour effet d'affecter, de manière suffisamment directe et certaine, leur situation.
13. Si Mme C...soutient que la décision litigieuse a de graves répercussions sur la situation de ses enfants, scolarisés et bien intégrés en France, elle n'établit pas l'impossibilité pour eux de poursuivre leur scolarité en République démocratique du Congo. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :
14. Mme C...reprend en appel le moyen qu'elle avait invoqué en première instance et tiré de ce que la décision fixant le pays de renvoi serait entachée d'incompétence. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.
15. Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales: " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " et aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ".
16. Si la requérante soutient qu'elle encourt des risques en cas de retour dans son pays d'origine en raison des poursuites judiciaires dont fait l'objet son époux, les documents versés aux débats à l'appui de ses allégations, sont dénués de valeur probante et ne permettent pas d'établit qu'elle serait personnellement exposée à de tels risques, alors qu'au demeurant tant l'Office français de protection des réfugiés et apatrides que la Cour nationale du droit d'asile n'ont pas fait droit à sa demande de reconnaissance du statut de réfugié. Dès lors, le moyen tiré de ce que la décision attaquée aurait été prise en méconnaissance des stipulations et dispositions précitées ne peut être qu'écarté.
17. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement contesté, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 19 novembre 2014 par lequel le préfet de l'Aube a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination. Il y a lieu de rejeter, par voie de conséquence, les conclusions aux fins d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
D E C I D E :
Article 1er : La requête présentée par Mme C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...C...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Aube.
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N° 15NC02055