Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 5 mai 2015, Mme C...D..., représentée par la société d'avocats Devarenne associés, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 14 octobre 2014 ;
2°) de condamner le centre hospitalier de Vitry-le-François à lui verser la somme de 155 000 euros, ainsi que les intérêts au taux légal et la capitalisation de ces intérêts à compter du 4 septembre 2007, en réparation des préjudices résultant pour elle de sa mise en disponibilité d'office à compter de cette date ;
3°) de mettre à la charge du centre hospitalier de Vitry-le-François la somme de 1 500 euros, à verser à son conseil, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le centre hospitalier de Vitry-le-François a commis une faute dans la gestion de sa carrière en la plaçant en disponibilité d'office à compter du 4 septembre 2007 alors que la fibromyalgie dont elle souffrait justifiait l'attribution d'un congé de longue maladie ;
- les préjudices subis à raison de pertes de traitement, d'un retard de carrière et d'une minoration de ses droits sociaux s'établissent, respectivement, à 50 000 euros, 10 000 euros et 40 000 euros ;
- elle subit un préjudice moral évalué à 30 000 euros ;
- elle sollicite en outre des " dommages et intérêts " pour un montant de 25 000 euros.
L'instruction a été close au 14 décembre 2015 par une ordonnance en date du 25 novembre 2015, prise en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative.
Par un mémoire en défense enregistré le 14 décembre 2015, le centre hospitalier de Vitry-le-François, représenté par MeB..., conclut au rejet de la requête et à la condamnation de la requérante à lui verser la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Le centre hospitalier de Vitry-le-François fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
L'instruction a été rouverte par une ordonnance en date du 14 décembre 2015, prise en application de l'article R. 613-4 du code de justice administrative.
Mme D... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle en date du 26 février 2015.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;
- le décret n°88-386 du 19 avril 1988 ;
- l'arrêté du 14 mars 1986 relatif à la liste des maladies donnant droit à l'octroi de congé de longue maladie ;
- l'arrêté du 1er août 1988 relatif à la liste indicative des maladies pouvant ouvrir droit à un congé de longue maladie pour les agents de la fonction publique hospitalière ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Guérin-Lebacq,
- les conclusions de M. Collier, rapporteur public,
- et les observations de MeA..., pour MmeD..., et de Me B...pour le centre hospitalier de Vitry-le-François.
1. Considérant que MmeD..., née le 27 novembre 1962, était, en tant qu'agent des services hospitaliers, affectée au centre hospitalier de Vitry-le-François depuis le 1er janvier 2004 ; qu'elle a été placée en disponibilité d'office pour raison de santé à compter du 4 septembre 2007 puis mise à la retraite pour invalidité le 1er mars 2010 ; que l'intéressée, estimant qu'elle aurait dû être placée en congé de longue maladie à compter du 4 septembre 2007, a saisi le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'une demande tendant à la condamnation du centre hospitalier de Vitry-le-François à réparer les préjudices résultant selon elle de son placement en disponibilité d'office ; qu'elle relève appel du jugement du 14 octobre 2014 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande ;
Sur le bien fondé du jugement attaqué :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 41 de loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 3° A des congés de longue maladie d'une durée maximale de trois ans dans les cas où il est constaté que la maladie met l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, rend nécessaires un traitement et des soins prolongés et présente un caractère invalidant et de gravité confirmée (...) " ; qu'aux termes de l'article 62 de cette loi : " (...) La disponibilité est prononcée soit à la demande de l'intéressé, soit d'office à l'expiration des congés prévus aux 2°, 3° et 4° de l'article 41 " ; qu'aux termes de l'article 7 du décret du 19 avril 1988 relatif aux conditions d'aptitude physique et aux congés de maladie des agents de la fonction publique hospitalière : " Les comités médicaux (...) sont consultés obligatoirement en ce qui concerne : (...) 2. L'octroi des congés de longue maladie et de longue durée (...) 6. La mise en disponibilité d'office pour raisons de santé (...) " ; qu'aux termes de l'article 8 du même décret, dans sa version alors applicable : " Le comité médical supérieur (...) peut être consulté sur les cas dans lesquels l'avis donné en premier ressort par le comité médical compétent est contesté. / Il est obligatoirement consulté dans tous les cas où le bénéfice du congé de longue maladie est demandé pour une affection ne figurant pas sur la liste indicative prévue à l'article 18 ci-dessous (...) " ; qu'aux termes de l'article 18 de ce décret, dans sa version alors applicable : " Pour l'application de l'article 41 (3°) de la loi du 9 janvier 1986 susvisée, le ministre chargé de la santé établit par arrêté, après avis du comité médical supérieur, une liste indicative de maladies qui, si elles répondent en outre aux critères définis par ces dispositions législatives, peuvent ouvrir droit à congé de longue maladie après avis du comité médical (...) " ; que l'article 3 de l'arrêté du 14 mars 1986 relatif à la liste des maladies donnant droit à l'octroi de congés de longue maladie, rendu applicable aux agents de la fonction publique hospitalière par l'arrêté susvisé du 1er août 1988, dispose que : " Un congé de longue maladie peut être attribué, à titre exceptionnel, pour une maladie non énumérée aux articles 1er et 2 du présent arrêté, après proposition du comité médical compétent à l'égard de l'agent et avis du comité médical supérieur. Dans ce cas, il doit être constaté que la maladie met l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, rend nécessaire un traitement et des soins prolongés et qu'elle présente un caractère invalidant et de gravité confirmée " ;
3. Considérant que Mme D..., qui a été placée en congé de maladie à compter du 3 juin 2005 et ne conteste pas que ses droits au congé de maladie ordinaire étaient expirés à la date du 4 septembre 2007, soutient qu'elle aurait dû alors être placée en congé de longue maladie en raison de la fibromyalgie dont elle dit être atteinte ;
4. Considérant, toutefois, d'une part, que le médecin psychiatre consulté par le comité médical départemental dans le cadre de la prolongation du congé de maladie ordinaire de la requérante, a estimé, dans ses rapports des 24 janvier et 28 mars 2007, que l'état de santé de Mme D... ne justifiait pas l'attribution d'un congé de longue maladie mais permettait au contraire une reprise d'activité professionnelle ; que dans sa séance du 2 août 2007, le comité médical départemental a considéré que la situation médicale de la requérante ne justifiait ni l'octroi d'un congé de longue maladie ni même une prolongation d'arrêt de travail ; que le 9 octobre 2007, le comité médical supérieur a rendu un avis défavorable à l'attribution d'un congé de longue maladie au motif que la pathologie de l'intéressée ne présentait pas un caractère de gravité suffisant ;
5. Considérant, d'autre part, que la fibromyalgie ne figure pas sur la liste des maladies, fixée par l'arrêté susvisé du 14 mars 1986, donnant droit à l'octroi d'un congé de longue maladie ; que, contrairement à ce que soutient Mme D..., cette pathologie ne saurait correspondre aux " rhumatismes chroniques invalidants, inflammatoires ou dégénératifs " visés par la liste précitée, alors qu'il ressort des comptes-rendus produits à l'instance, établis par les médecins qu'elle a consultés à la demande de son médecin traitant, que ses examens biologiques et cliniques n'ont révélé aucune anomalie et, notamment, aucun rhumatisme inflammatoire ; qu'en tout état de cause, il ne résulte pas non plus de l'instruction, eu égard aux conclusions du rapport médical établi le 22 mai 2009 à la demande du comité médical départemental, que la requérante aurait présenté une maladie mentale ouvrant droit à l'octroi d'un congé de longue maladie ;
6. Considérant, enfin, que si l'hypothèse d'une fibromyalgie est évoquée dans les comptes rendus établis par les médecins consultés par Mme D..., il ne résulte pas de l'instruction, et notamment de ces comptes rendus, que la maladie dont l'intéressée se dit atteinte aurait présenté un caractère invalidant et de gravité confirmée ayant eu pour effet de la mettre dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions ; qu'à cet égard, si le compte rendu du 5 février 2008 fait état d'un possible conflit du travail à l'origine de la situation médicale de la requérante, l'auteur de ce document fait également part de ses doutes quant à l'existence d'une fibromyalgie et indique avoir recommandé à Mme D... de reprendre son activité professionnelle ; que les appréciations ainsi portées sur l'état de santé de la requérante ne sont pas contredites par le certificat établi le 18 juillet 2011 qui constate l'excellent état général de l'intéressée et conclut à l'absence de fibromyalgie symptomatique lourdement invalidante ; qu'ainsi, il ne résulte pas de l'instruction que Mme D... aurait souffert d'une maladie la plaçant dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, nécessitant un traitement et des soins prolongés et présentant un caractère invalidant et de gravité confirmée ; que, par suite, il n'est pas établi qu'elle aurait rempli les conditions prévues par les dispositions précitées de l'article 3 de l'arrêté du 14 mars 1986 pour obtenir, à titre exceptionnel, un congé de longue maladie ;
7. Considérant que, dans ces conditions, Mme D...n'établit pas que le centre hospitalier de Vitry-le-François aurait commis une faute en la plaçant en disponibilité d'office à compter du 4 septembre 2007, plutôt qu'en congé de longue maladie ; qu'en l'absence de faute, elle n'est pas fondée à obtenir l'indemnisation de ses préjudices, lesquels ne sont en tout état de cause pas justifiés ;
8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme D...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du centre hospitalier de Vitry-le-François, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que Mme D...demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que, par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme D...la somme dont le centre hospitalier de Vitry-le-François demande le versement sur le fondement des mêmes dispositions ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme D...est rejetée.
Article 2 : Les conclusions du centre hospitalier de Vitry-le-François présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... D...et au centre hospitalier de Vitry-le-François.
''
''
''
''
3
N° 15NC00829