Par un jugement n° 1501321 du 8 septembre 2015, le tribunal administratif de Nancy a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 14 octobre 2015, M.A..., représenté par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nancy du 8 septembre 2015 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Vosges du 7 avril 2015 en tant qu'il refuse de lui délivrer un titre de séjour ;
3°) d'enjoindre au préfet des Vosges, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans le même délai et lui délivrer dans les trois jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de cent euros par jour de retard ;
4°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à verser à Me C...en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Il soutient que :
- la décision en litige méconnaît les dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ;
- le préfet n'a pas procédé à l'examen particulier de sa situation et a motivé de manière stéréotypée la décision en litige en se bornant à rappeler le rejet de sa demande d'asile ;
- cette décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- alors qu'il était malade, le préfet n'a pas saisi le médecin de l'agence régionale de santé ni ne lui a délivré de titre de séjour en raison de son état de santé ;
- la décision contestée a des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur sa situation personnelle et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- il aurait dû, à tout le moins, être admis exceptionnellement au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et en application des critères posés par la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012 ;
- la décision en litige méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par un mémoire en défense enregistré le 22 janvier 2016, le préfet des Vosges conclut au rejet de la requête au motif qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.
Par une décision du 25 février 2016, M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 modifiée ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de M. Fuchs a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que M.A..., ressortissant bangladais né le 4 janvier 1987, est entré irrégulièrement en France le 15 juin 2013 afin d'y solliciter la reconnaissance de la qualité de réfugié ; que sa demande a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) le 18 octobre 2013, décision confirmée par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 10 mars 2015 ; que, par l'arrêté en litige du 7 avril 2015, le préfet des Vosges a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné à l'expiration de ce délai ; que M. A...a été assigné à résidence par un arrêté préfectoral du 8 juillet 2015 ; que par un jugement du 27 juillet 2015, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nancy a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination ; que M. A... relève appel du jugement du 8 septembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté en tant seulement que lui est refusée la délivrance un titre de séjour ;
Sur les conclusions tendant à l'octroi de l'aide juridictionnelle provisoire :
2. Considérant que, par une décision du 25 février 2016, M. A...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ; que, dès lors, ses conclusions tendant à ce que l'aide juridictionnelle provisoire lui soit octroyée ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur les conclusions aux fins d'annulation de la décision portant refus de titre de séjour :
3. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des motifs mêmes de la décision contestée que le préfet des Vosges a examiné la situation particulière de M.A... ; qu'en particulier, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'administration n'aurait pas pris connaissance des pièces de sa demande d'asile, alors au demeurant que le préfet était tenu de lui refuser la délivrance d'un titre de séjour à ce titre en raison du rejet de cette demande par l'OFPRA, décision confirmée par la CNDA ; que, de surcroît, l'arrêté précise également que l'intéressé ne fait état d'aucun élément permettant d'établir qu'il encourt des risques de peines ou de traitements inhumains ou dégradants dans son pays d'origine ; qu'ainsi, les moyens tirés du défaut d'examen de sa situation personnelle et du défaut de motivation de la décision contestée doivent être écartés ;
4. Considérant, en deuxième lieu et d'une part, qu'aux termes de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 alors applicable : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi n°79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales (...) " ; qu'en vertu de leurs termes mêmes, ces dispositions ne peuvent pas être utilement invoquées à l'encontre d'une décision de refus de titre de séjour, qui est prise en réponse à une demande formulée par l'intéressé ; qu'il en est notamment ainsi lorsque le préfet s'oppose à la délivrance d'une carte de résident à un étranger auquel la qualité de réfugié a été refusée, cette décision devant, en effet, être regardée comme prise en réponse à une demande d'admission au séjour en qualité de demandeur d'asile, la reconnaissance du statut de réfugié impliquant la délivrance immédiate d'une carte de résident ; que, dès lors, contrairement à ce que soutient M. A..., le moyen tiré du non-respect de la procédure contradictoire prévue par les dispositions précitées est inopérant et doit être écarté ;
5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie (...) dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus " ;
6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M.A..., qui est célibataire et sans enfant, résidait en France depuis moins de deux ans à la date de la décision contestée ; qu'il admet ne pas être dépourvu d'attaches dans son pays d'origine, dans lequel il a vécu jusqu'à l'âge de 26 ans ; que, dans ces conditions, eu égard à la durée et aux conditions de séjour du requérant et en dépit de la bonne insertion dans la société dont il se prévaut ainsi que de la promesse d'embauche en tant que serveur qu'il produit, la décision contestée n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels elle a été prise ; qu'elle n'a dès lors pas méconnu les stipulations et dispositions précitées ;
7. Considérant, en quatrième lieu, que, lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour, le préfet n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si l'étranger peut prétendre à un titre de séjour au regard d'une disposition du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui ne fondent pas la demande ; que si le requérant soutient qu'il est malade et aurait dû se voir délivrer un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il est constant qu'il n'a ni formulé de demande de titre de séjour en raison de son état de santé, ni produit d'élément de nature à établir qu'il aurait dû bénéficier d'un titre de séjour sur ce fondement ; que le préfet, qui n'était dès lors pas tenu de saisir le médecin de l'agence régionale de santé, n'a pas commis d'erreur de droit en n'examinant pas sa demande sur le fondement de cet article ; qu'au demeurant, le certificat médical versé au dossier sur lequel s'appuie le requérant ne fait état d'aucune pathologie et mentionne simplement que le patient est " inquiet de son état de santé " ;
8. Considérant, en cinquième lieu, que pour les mêmes motifs que ceux mentionnés aux points 6 et 7, le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision contestée sur la situation personnelle du requérant ;
9. Considérant, en sixième lieu et en tout état de cause, qu'eu égard aux motifs énoncés aux points précédents, le requérant ne se prévaut d'aucune considération humanitaire ou circonstance exceptionnelle ; que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut être accueilli ;
10. Considérant, en septième lieu, que les énonciations de la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012 relative aux conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière dans le cadre des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne constituent pas des lignes directrices dont M. A...peut utilement se prévaloir devant le juge ;
11. Considérant, en dernier lieu, que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut être utilement invoqué à l'encontre du refus de titre de séjour, dès lors que cette décision n'implique pas, par elle-même, l'éloignement de l'intéressé vers son pays d'origine ;
12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte, ainsi que celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, ne peuvent qu'être rejetées ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête présentée par M. A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée pour information au préfet des Vosges.
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N° 15NC02123