Procédure devant la cour :
I. Par une requête n° 15NC02446, enregistrée le 10 décembre 2015, M. A...C..., représenté par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nancy du 4 juin 2015 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de Meurthe-et-Moselle du 29 octobre 2014 ;
3°) d'enjoindre au préfet de Meurthe-et-Moselle, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " avec autorisation de travailler dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans le même délai et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à verser à Me B...en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, ainsi que les entiers dépens de l'instance dont 13 euros de droit de plaidoirie.
Il soutient que :
- les premiers juges, qui n'ont pas répondu au moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision de refus de séjour, ont insuffisamment motivé le jugement attaqué ;
En ce qui concerne la décision de refus de séjour :
- la décision contestée n'est pas suffisamment motivée et méconnaît les articles 1 et 3 de la loi du 11 juillet 1979 ;
- le préfet n'a pas procédé à l'examen particulier de sa situation personnelle ;
- il a commis une erreur de droit en lui opposant, pour lui refuser la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que le métier pour lequel il avait présenté une demande d'autorisation de travail ne figurait pas sur la liste annexée à l'arrêté du 18 janvier 2008 ;
- il appartenait au préfet de saisir la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de son dossier ;
- la décision de refus de séjour méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation des éléments de sa situation personnelle, qui justifiaient qu'il soit admis au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
- l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français s'impose par voie de conséquence de l'annulation de la décision de refus de séjour ;
- cette décision a été prise en méconnaissance de son droit à être entendu, qui constitue un principe général du droit de l'Union européenne et résulte de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- la décision méconnaît les dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et 6 de la directive du 16 décembre 2008, car le préfet s'est cru en situation de compétence liée pour prendre la décision d'éloignement ;
- le préfet n'a pas tenu compte des conséquences de cette décision sur sa situation personnelle et familiale ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :
- l'annulation de la décision fixant le pays de renvoi s'impose par voie de conséquence de l'annulation de la décision de refus de séjour et de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
- cette décision est insuffisamment motivée ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le préfet n'a pas procédé à l'examen particulier de sa situation personnelle ;
- cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense enregistré le 3 juin 2016, le préfet de Meurthe-et-Moselle conclut au rejet de la requête au motif qu'aucun des moyens soulevés par le requérant n'est fondé.
M. C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 29 octobre 2015.
II. Par une requête n°15 NC02448, enregistrée le 10 décembre 2015, Mme D...C..., représentée par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nancy du 4 juin 2015 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de Meurthe-et-Moselle du 29 octobre 2014 ;
3°) d'enjoindre au préfet de Meurthe-et-Moselle, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " avec autorisation de travailler dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans le même délai et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à verser à Me B...en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, ainsi que les entiers dépens de l'instance dont 13 euros de droit de plaidoirie.
Elle soutient que :
- les premiers juges, qui n'ont pas répondu au moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision de refus de séjour, ont insuffisamment motivé le jugement attaqué ;
En ce qui concerne la décision de refus de séjour :
- la décision contestée n'est pas suffisamment motivée et méconnaît les articles 1 et 3 de la loi du 11 juillet 1979 ;
- le préfet n'a pas procédé à l'examen particulier de sa situation personnelle ;
- il a commis une erreur de droit en lui opposant, pour lui refuser la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que le métier pour lequel elle avait présenté une demande d'autorisation de travail ne figurait pas sur la liste annexée à l'arrêté du 18 janvier 2008 ;
- il appartenait au préfet de saisir la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de son dossier ;
- la décision de refus de séjour est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation des éléments de sa situation personnelle qui justifiaient qu'elle soit admise au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
- l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français s'impose par voie de conséquence de l'annulation de la décision de refus de séjour ;
- cette décision a été prise en méconnaissance de son droit à être entendue, qui constitue un principe général du droit de l'Union européenne et résulte de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- la décision méconnaît les dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et 6 de la directive du 16 décembre 2008, car le préfet s'est cru en situation de compétence liée pour prendre la décision d'éloignement ;
- le préfet n'a pas tenu compte des conséquences de cette décision sur sa situation personnelle et familiale ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :
- l'annulation de la décision fixant le pays de renvoi s'impose par voie de conséquence de l'annulation de la décision de refus de séjour et de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
- cette décision est insuffisamment motivée ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le préfet n'a pas procédé à l'examen particulier de sa situation personnelle ;
- cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense enregistré le 3 juin 2016, le préfet de Meurthe-et-Moselle conclut au rejet de la requête au motif qu'aucun des moyens soulevés par la requérante n'est fondé.
Mme C...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 29 octobre 2015.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 modifiée ;
- l'arrêté du 18 janvier 2008 relatif à la délivrance, sans opposition de la situation de l'emploi, des autorisations de travail aux étrangers non ressortissants d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de M. Fuchs a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que M. A... C..., né le 1er janvier 1974, et son épouse Mme D... C..., née le 26 janvier 1977, tous deux ressortissants turcs, sont entrés irrégulièrement en France le 13 octobre 2013 ; que, par les arrêtés contestés du 29 octobre 2014, le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de leur délivrer un titre de séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel ils pourront être éloignés à l'expiration de ce délai ; que les requérants relèvent appel du jugement du 4 juin 2015 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de ces deux arrêtés ;
2. Considérant que les requêtes n° 15NC02446 et n° 15NC02448, présentées par les épouxC..., sont dirigées contre un même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour y statuer par un seul arrêt ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
3. Considérant qu'il résulte des motifs mêmes du jugement attaqué que le tribunal administratif de Nancy a expressément répondu aux moyens contenus dans les mémoires produits par les requérants ; qu'en particulier, le tribunal administratif, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments avancés par les parties, n'a pas omis de répondre au moyen tiré du défaut de motivation des décisions contestées ; que, par suite, M. et Mme C...ne sont pas fondés à soutenir que le jugement serait, pour ce motif, entaché d'irrégularité ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne les décisions de refus de séjour :
4. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 alors en vigueur : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / - restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) " ; qu'aux termes de l'article 3 de cette même loi, dans sa version applicable : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision " ;
5. Considérant que les décisions en litige visent les dispositions pertinentes du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que, en particulier, la convention internationale des droits de l'enfant et la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'elles indiquent que M. et Mme C...ne remplissent pas les conditions pour se voir délivrer à un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en particulier en l'absence de difficultés de recrutement dans les activités professionnelles pour lesquelles ils ont produit des promesses d'embauche ; que ces décisions mentionnent ensuite que les intéressés ne font état d'aucun motif humanitaire et exceptionnel pour bénéficier d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'elles précisent également, après avoir fait état d'éléments précis et circonstanciés relatifs à la situation des requérants, qu'aucune atteinte disproportionnée à leur droit au respect de leur vie privée et familiale n'est caractérisée ; qu'elles soulignent encore qu'au regard de ces divers éléments, il n'y a pas lieu pour le préfet de régulariser leur situation ; qu'ainsi, et alors même qu'elles ne précisent pas en quoi les considérations que les requérants invoquent ne sont pas des circonstances humanitaires et des motifs exceptionnels au sens de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les décisions contestées sont suffisamment motivées et ne méconnaissent pas les dispositions précitées ; que le moyen tiré de l'absence d'examen de la situation personnelle des intéressés doit également être écarté ;
6. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 " ;
7. Considérant, d'une part, qu'en présence d'une demande de régularisation présentée, sur le fondement de l'article L. 313-14, par un étranger qui ne serait pas en situation de polygamie et dont la présence en France ne présenterait pas une menace pour l'ordre public, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire " ; que, dans cette dernière hypothèse, un demandeur qui justifierait d'une promesse d'embauche ou d'un contrat lui permettant d'exercer une activité figurant dans la liste annexée à l'arrêté interministériel du 18 janvier 2008, ne saurait être regardé, par principe, comme attestant, par là-même, des " motifs exceptionnels " exigés par la loi ; qu'il appartient, en effet, à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'examiner, notamment, si la qualification, l'expérience et les diplômes de l'étranger ainsi que les caractéristiques de l'emploi auquel il postule, dans un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement et recensés comme tels dans l'arrêté du 18 janvier 2008, de même que tout élément de sa situation personnelle dont l'étranger ferait état à l'appui de sa demande, tel que par exemple, l'ancienneté de son séjour en France, peuvent constituer, en l'espèce, des motifs exceptionnels d'admission au séjour ;
8. Considérant que le préfet de Meurthe-et-Moselle a indiqué que les requérants ne faisaient état ni de motifs humanitaires, ni de circonstances exceptionnelles de nature à justifier que leur soit délivré un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que si les arrêtés contestés mentionnent que les métiers pour lesquels ils ont présenté des promesses d'embauche n'appartiennent pas à des secteurs touchés par des pénuries de main-d'oeuvre, indice qui pouvait à bon droit être pris en compte, le moyen selon lequel le préfet aurait commis une erreur de droit en leur opposant que ces métiers ne figureraient pas sur la liste annexée à l'arrêté du 18 janvier 2008 visée ci-dessus manque en fait ; que le préfet a ainsi pris en compte les caractéristiques des emplois concernés, contrairement à ce que soutiennent les requérants ;
9. Considérant, d'autre part, que la procédure permettant d'obtenir une carte de séjour pour motif exceptionnel est distincte de celle de l'article L. 5221-2 du code du travail, de sorte qu'il n'est pas nécessaire que l'autorisation de travail soit délivrée préalablement à ce qu'il soit statué sur la délivrance de la carte de séjour temporaire ; qu'en particulier, la demande d'autorisation de travail pourra, en tout état de cause, être présentée auprès de l'administration compétente lorsque l'étranger disposera d'un récépissé de demande de titre de séjour ou même de la carte sollicitée ; qu'ainsi, il n'appartenait pas au préfet de Meurthe-et-Moselle, sur le fondement de l'article L. 313-14 précité, de saisir la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi ;
10. Considérant, enfin, que ni la volonté d'intégration et les promesses d'embauche que présentent les requérants, ni les motifs familiaux dont ils se prévalent, ne constituent des circonstances humanitaires ou des motifs exceptionnels au sens des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le moyen tiré de l'erreur manifeste dans l'appréciation que le préfet a fait de leur situation au regard de ces dispositions doit donc être écarté ;
11. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus " ;
12. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. et Mme C...sont entrés en France le 13 octobre 2013, soit un an seulement avant la date des arrêtés contestés ; qu'ils ne justifient pas ne plus avoir d'attaches dans leur pays d'origine, dans lequel ils ont vécu respectivement jusqu'à 39 ans et 36 ans, et où résident encore leurs parents et la majeure partie de leur fratrie ; qu'ainsi, eu égard à la durée et aux conditions de leur séjour sur le territoire, et alors même que leur enfant est scolarisé et que Mme C...était enceinte à la date des arrêtés en litige, ces décisions n'ont pas porté à leur droit au respect de leur vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts dans lesquels elles ont été prises ; que, par suite, le moyen tiré de la violation des dispositions et stipulations précités doit être écarté ;
En ce qui concerne les décisions portant obligation de quitter le territoire français :
13. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que les décisions portant obligation de quitter le territoire français doivent être annulées par voie de conséquence des décisions refusant de leur délivrer un titre de séjour ;
14. Considérant, en deuxième lieu, que le préfet a considéré qu'il n'y avait, en l'espèce, pas lieu de faire usage de son pouvoir discrétionnaire afin de ne pas assortir les décisions de refus de séjour de décisions d'éloignement ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que le préfet se serait estimé en situation de compétence liée pour obliger les requérants à quitter le territoire français doit être écarté ;
15. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes du paragraphe 1 de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions et organes de l'Union " ; qu'aux termes du paragraphe 2 de ce même article : " Ce droit comporte notamment : / - le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre (...) " ; qu'aux termes du paragraphe 1 de l'article 51 de la Charte : " Les dispositions de la présente Charte s'adressent aux institutions, organes et organismes de l'Union dans le respect du principe de subsidiarité, ainsi qu'aux États membres uniquement lorsqu'ils mettent en oeuvre le droit de l'Union (...) " ;
16. Considérant que les dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, applicables au présent litige, sont issues de dispositions de la loi du 16 juin 2011 relative à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité qui ont procédé à la transposition, dans l'ordre juridique interne, des objectifs de la directive du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;
17. Considérant, ainsi que la Cour de justice de l'Union européenne l'a jugé dans les motifs de son arrêt du 10 septembre 2013 visé ci-dessus, que les auteurs de la directive du 16 décembre 2008, s'ils ont encadré de manière détaillée les garanties accordées aux ressortissants des États tiers concernés par les décisions d'éloignement ou de rétention, n'ont pas précisé si et dans quelles conditions devait être assuré le respect du droit de ces ressortissants d'être entendus, qui relève des droits de la défense figurant au nombre des droits fondamentaux faisant partie intégrante de l'ordre juridique de l'Union européenne et consacrés par la charte des droits fondamentaux ; que si l'obligation de respecter les droits de la défense pèse en principe sur les administrations des États membres lorsqu'elles prennent des mesures entrant dans le champ d'application du droit de l'Union, il appartient aux États membres, dans le cadre de leur autonomie procédurale, de déterminer les conditions dans lesquelles doit être assuré, pour les ressortissants des États tiers en situation irrégulière, le respect du droit d'être entendu ;
18. Considérant que le droit d'être entendu implique que l'autorité préfectorale, avant de prendre à l'encontre d'un étranger une décision portant obligation de quitter le territoire français, mette l'intéressé à même de présenter ses observations écrites et lui permette, sur sa demande, de faire valoir des observations orales, de telle sorte qu'il puisse faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue sur la mesure envisagée avant qu'elle n'intervienne ; que, toutefois, dans le cas prévu au 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, où la décision faisant obligation de quitter le territoire français est prise concomitamment au refus de délivrance d'un titre de séjour, l'obligation de quitter le territoire français découle nécessairement du refus de titre de séjour ; que le droit d'être entendu n'implique alors pas que l'administration ait l'obligation de mettre l'intéressé à même de présenter ses observations de façon spécifique sur la décision l'obligeant à quitter le territoire français, dès lors qu'il a pu être entendu avant que n'intervienne la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour ;
19. Considérant que lorsqu'il sollicite la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour, l'étranger, en raison même de l'accomplissement de cette démarche qui tend à son maintien régulier sur le territoire français, ne saurait ignorer qu'en cas de refus, il pourra faire l'objet d'une mesure d'éloignement ; qu'à l'occasion du dépôt de sa demande, il est conduit à préciser à l'administration les motifs pour lesquels il demande que lui soit délivré un titre de séjour et à produire tous éléments susceptibles de venir au soutien de cette demande ; qu'il lui appartient, lors du dépôt de cette demande, lequel doit en principe faire l'objet d'une présentation personnelle du demandeur en préfecture, d'apporter à l'administration toutes les précisions qu'il juge utiles ; qu'il lui est loisible, au cours de l'instruction de sa demande, de faire valoir auprès de l'administration toute observation complémentaire utile, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux ; que le droit de l'intéressé d'être entendu, ainsi satisfait avant que n'intervienne le refus de titre de séjour, n'impose pas à l'autorité administrative de mettre l'intéressé à même de réitérer ses observations ou de présenter de nouvelles observations, de façon spécifique, sur l'obligation de quitter le territoire français qui est prise concomitamment et en conséquence du refus de titre de séjour ;
20. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la seule circonstance que M. et Mme C... n'aient pas été informés de l'éventualité que soit prononcée à leur encontre une mesure d'éloignement, ni n'aient été invités à formuler leurs observations sur cette éventualité, n'est pas de nature à permettre de regarder les intéressés comme ayant été privés de leur droit à être entendus, notamment énoncé à l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
21. Considérant, en dernier lieu, que pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 12, le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ; qu'en outre, le préfet, qui, contrairement à ce que soutiennent les requérants, a procédé à l'examen des conséquences de ces décisions sur leur situation personnelle et familiale, n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation de ces conséquences ;
En ce qui concerne les décisions fixant le pays de renvoi :
22. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que les décisions fixant le pays de destination doivent être annulées par voie de conséquence des décisions refusant de leur délivrer un titre de séjour et de celles portant obligation de quitter le territoire français ;
23. Considérant, en deuxième lieu, que les décisions en litige visent les dispositions pertinentes du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en particulier son article L. 513-2, ainsi que l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'elles indiquent ensuite que les requérants n'ont pas établi être exposés à des peines ou traitements inhumains ou dégradants en cas de retour en Turquie ; qu'il s'ensuit que ces décisions sont suffisamment motivées et que le préfet a procédé à l'examen particulier de leur situation personnelle ;
24. Considérant, en dernier lieu, que M. et Mme C... ne font état d'aucun élément de leur situation personnelle au soutien du moyen selon lequel ils encourent des risques de traitement contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour en Turquie ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'ils auraient fait valoir de tels éléments au cours de la procédure administrative ; que, par suite, ce moyen doit être écarté, de même que celui tiré de l'erreur d'appréciation ;
25. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme C...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté leurs demandes ;
Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :
26. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation des décisions contestées, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions de M. et Mme C...à fin d'injonction et d'astreinte doivent être rejetées ;
Sur les dépens :
27. Considérant qu'aucun dépens n'a été exposé durant la présente instance ; que les droits de plaidoirie ne sont pas au nombre des dépens énumérés par l'article R. 761-1 du code de justice administrative ; que, par suite, les conclusions présentées à ce titre ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
28. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, la somme demandée par M. et Mme C...au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : Les requêtes présentées par M. et Mme C...sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...C..., à Mme D...C...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée pour information au préfet de Meurthe-et-Moselle.
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N° 15NC02446 et 15NC02448