Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 9 septembre 2015, MmeC..., représentée par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 10 juillet 2015 ;
2°) d'enjoindre au ministre chargé des naturalisations de réexaminer sa demande dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la décision contestée est insuffisamment motivée ;
- la décision litigieuse est entachée d'une erreur de fait ; l'association Tamoul Cholai n'a aucun lien avec les Tigres de libération de l'Eelam tamoul " (LTTE) ; cette association n'a par ailleurs jamais été liée au Comité de coordination des Tamouls de France (CCTF) ; la LTTE a en outre été dissoute plus de trois ans avant la décision contestée à la mort de son chef ; elle ne milite pas pour le séparatisme et encore moins pour le terrorisme ;
- en lui reprochant son défaut de loyalisme, le ministre a commis une erreur manifeste d'appréciation ; elle n'a jamais troublé l'ordre public, méconnu ses obligations légales ou fait preuve d'incivisme ; son comportement ne peut être qualifié d'indigne au sens des circulaires des 27 juillet 2010, 24 août 2011 et 24 février 2015 ; son implication au sein de l'association est licite ; le seul fait qu'elle ait adhéré à l'association ne suffit pas à établir son défaut de loyalisme.
Par un mémoire en défense enregistré le 24 septembre 2015, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- les moyens de la requête ne sont pas fondés ;
- il renvoie à ses écritures de première instance qu'il reprend subsidiairement.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code civil ;
- le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Pérez, président-rapporteur.
1. Considérant que MmeC..., ressortissante sri-lankaise, relève appel du jugement du 10 juillet 2015 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 14 novembre 2012 du ministre de l'intérieur rejetant sa demande de naturalisation.
2. Considérant, en premier lieu, que la décision du 14 novembre 2012 comporte les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde ; que le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision contestée doit, par suite, être écarté ;
3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 21-15 du code civil : " (...) l'acquisition de la nationalité française par décision de l'autorité publique résulte d'une naturalisation accordée par décret à la demande de l'étranger " ; qu'aux termes de l'article 48 du décret du 30 décembre 1993 susvisé : " Si le ministre chargé des naturalisations estime qu'il n'y a pas lieu d'accorder la naturalisation ou la réintégration sollicitée, il prononce le rejet de la demande. Il peut également en prononcer l'ajournement en imposant un délai ou des conditions. Ce délai une fois expiré ou ces conditions réalisées, il appartient à l'intéressé, s'il le juge opportun, de déposer une nouvelle demande " ; qu'en vertu de ces dispositions, il appartient au ministre de porter une appréciation sur l'intérêt d'accorder la nationalité française à l'étranger qui la sollicite ; que, dans le cadre de cet examen d'opportunité, il peut légalement prendre en compte les renseignements défavorables recueillis sur le comportement du postulant ;
4. Considérant que, pour rejeter, par sa décision du 14 novembre 2012, la demande d'acquisition de la nationalité française présentée par MmeC..., le ministre chargé des naturalisations s'est fondé sur une note établie le 30 mars 2012 par le directeur des libertés publiques et des affaires juridiques du ministère de l'intérieur mentionnant que l'intéressée fait partie depuis 2007 de l'association " Tamoul Cholai " à Strasbourg, laquelle est une des vitrines légales du mouvement séparatiste tamoul " Tigres de libération de l'Eelam tamoul " (LTTE), organisation sri-lankaise reconnue comme appartenant aux mouvances terroristes par la position commune du Conseil de l'Union européenne 2001/931/PESC, mise à jour le 13 juillet 2010 ;
5. Considérant que Mme C...ne conteste pas avoir, dans un premier temps, nié son appartenance à l'association " Tamoul Cholai " avant d'admettre dans un second temps y enseigner la langue tamoule en qualité de bénévole depuis 2007 ; qu'en se bornant à faire valoir son implication dans la promotion de la langue et de la culture tamoules auprès des jeunes et à indiquer qu'elle s'est toujours tenue à l'écart de tout militantisme en faveur du mouvement séparatiste tamoul, Mme C...n'établit pas que les renseignements retenus par le ministre seraient inexacts ; que, dans ces conditions, en raison du doute existant sur le loyalisme de l'intéressée et alors même que l'association " Tamoul Cholai " exercerait légalement ses activités sous couvert d'une inscription au registre des associations du tribunal d'instance de Strasbourg, le ministre, qui dispose d'un large pouvoir pour apprécier l'opportunité d'accorder la nationalité française à l'étranger qui la sollicite, a pu, sans commettre d'erreur de fait, ni d'erreur manifeste d'appréciation, rejeter pour ce motif la demande de naturalisation de MmeC...;
6. Considérant, en second lieu, que Mme C...ne saurait utilement se prévaloir des circulaires ministérielles du 27 juillet 2010 et du 24 août 2011 lesquelles sont dépourvues de caractère réglementaire ; que la requérante ne saurait davantage utilement soulever le moyen tiré de l'absence d'indignité, examinée dans le cadre de l'acquisition de la nationalité française à raison du mariage, dès lors qu'elle a demandé à être naturalisée par décision de l'autorité publique ; qu'elle ne peut, pour cette même raison, se prévaloir de la méconnaissance de la circulaire du 24 février 2005 relative à l'enquête diligentée par les services préfectoraux sur les demandes d'acquisition de la nationalité française par déclaration, au demeurant dépourvue de caractère réglementaire ;
7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ; que par suite, ses conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées, de même que celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête présentée par Mme C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...C...et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 14 juin 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Pérez, président de chambre,
- M. Millet, président assesseur,
- Mme Buffet, premier-conseiller.
Lu en audience publique, le 5 juillet 2016.
Le président assesseur,
JF. MILLET
Le président-rapporteur,
A. PEREZ
Le greffier,
S. BOYERE
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15NT02758 3
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