Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 24 mars 2016, Mme D..., représentée par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Paris n°1515866/3-1 du 26 janvier 2016 ;
2°) et d'annuler l'arrêté du 10 août 2015 par lequel le ministre de l'intérieur a renouvelé, pour une durée de six mois, l'interdiction de sortie du territoire prise à son encontre le 27 février 2015.
Elle soutient que :
- l'arrêté contesté a été pris par une autorité incompétente ;
- il est insuffisamment motivé au regard de la loi no 79-587 du 11 juillet 1979 ;
- il méconnait les dispositions de l'article L. 224-1 du code de la sécurité intérieure dès lors que, pour fonder sa décision, le ministre de l'intérieur se fonde exclusivement sur une note peu circonstanciée établie par les services de renseignement, sans y apporter davantage de précisions ou de nouveaux éléments de preuve ;
- la décision du ministre de l'intérieur est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 22 juin 2016, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens de Mme D...ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la sécurité intérieure ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;
- le décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 relatif aux délégations de signature des membres du Gouvernement ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. X,
- les conclusions de M. W, rapporteur public,
- et les observations de MmeA..., représentant le ministre de l'intérieur.
1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 224-1 du code de la sécurité intérieure : " Tout Français peut faire l'objet d'une interdiction de sortie du territoire lorsqu'il existe des raisons sérieuses de penser qu'il projette : / 1° Des déplacements à l'étranger ayant pour objet la participation à des activités terroristes ; / 2° Ou des déplacements à l'étranger sur un théâtre d'opérations de groupements terroristes, dans des conditions susceptibles de le conduire à porter atteinte à la sécurité publique lors de son retour sur le territoire français / L'interdiction de sortie du territoire est prononcée par le ministre de l'intérieur pour une durée maximale de six mois à compter de sa notification. La décision est écrite et motivée. / (...) Lorsque les conditions en sont réunies, l'interdiction de sortie du territoire peut être renouvelée par décision expresse et motivée. (...) " ;
2. Considérant que Mme D...fait appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 10 août 2015 par lequel le ministre de l'intérieur a renouvelé, pour une durée de six mois, l'interdiction de sortie du territoire prise à son encontre le 27 février 2015, en application des dispositions énoncées par l'article L. 224-1 du code de la sécurité intérieure précité ;
3. Considérant, en premier lieu, qu'il y a lieu, par adoption des motifs retenus à bon droit par le Tribunal administratif de Paris, d'écarter le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté attaqué ;
4. Considérant, en deuxième lieu, que Mme D...ne peut utilement se prévaloir des dispositions de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 pour soutenir que l'arrêté attaqué est insuffisamment motivé, dès lors que l'exigence de motivation de cet acte est soumise aux seules prescriptions de l'article L. 224-1 précité du code de la sécurité intérieure ; qu'en tout état de cause, si la requérante fait valoir que l'arrêté litigieux ne comporte pas les éléments résultant de ses observations préalables, cette circonstance est sans incidence sur la motivation de l'arrêté qui, ainsi que l'ont relevé à bon droit les premiers juges, comporte l'ensemble des motifs de droit et de fait sur lesquels il se fonde et est donc suffisamment motivé ;
5. Considérant, en troisième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que Mme D... a fait l'objet d'une mesure d'interdiction de sortie du territoire le 27 février 2015 aux motifs que, alors que son père s'était rendu auprès des services de la police nationale pour leur signaler la volonté de leur fille de rejoindre la Syrie, elle avait été arrêtée le même jour à l'aéroport d'Amsterdam-Schiphol par les forces de l'ordre néerlandaises, alors qu'elle s'apprêtait à embarquer dans un vol à destination d'une ville turque proche de la frontière syrienne ; qu'il ressort du dossier, et notamment des éléments précis et circonstanciés contenus dans la " note blanche " établie par les services de renseignement produite par le ministre de l'intérieur, qu'à la suite de cette première décision, Mme D... a sollicité, le 9 mars 2015, auprès des services de la préfecture de Seine-Saint-Denis, la restitution de son passeport ou un laissez-passer afin de se rendre en Tunisie, en indiquant qu'elle disposait d'un billet d'avion et d'un passeport Tunisien ; qu'elle a été en contact avec des personnes ayant manifesté leur intention de participer au jihad, notamment une, actuellement incarcérée en France ; qu'en fondant sa décision sur l'ensemble de ces éléments, qui ne sont entachés d'aucune inexactitude matérielle, et en considérant qu'ils étaient de nature à établir qu'il existe des raisons sérieuses de penser que Mme D...est susceptible d'entreprendre des déplacements à l'étranger au nombre de ceux que l'article L. 224-1 du code de la sécurité intérieure a vocation à prévenir, le ministre de l'intérieur n'a entaché sa décision d'aucune erreur de droit, ni d'appréciation ;
6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... D...et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 28 juin 2016, à laquelle siégeaient :
- M. X, président de chambre,
- M. Y, premier conseiller,
- Mme T, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 8 juillet 2016.
Le président rapporteur,
XL'assesseur le plus ancien,
Y
Le greffier,
Z
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 16PA01066