Par un jugement n° 1423015 du 4 mai 2016, le Tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de M.A....
Procédure devant la Cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés les 1er juillet 2016, 4 août 2016 et 22 mars 2018, M.A..., représenté par la SCP Delvolvé et Trichet, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1423015 du 4 mai 2016 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler les décisions des 16 juillet 2012 et 15 avril 2013 du ministre de l'intérieur, ainsi que l'avis du médiateur interne de la police nationale du 18 novembre 2013 ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme totale de 142 531 euros en réparation des préjudices qu'il a subis, assortie des intérêts au taux légal ;
4°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de procéder à la reconstitution de sa carrière et de lui attribuer une affectation correspondant à son grade et à son ancienneté ;
5°) de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement est irrégulier, dès lors que d'une part, les conclusions du rapporteur public n'ont pas été mises en ligne dans un délai raisonnable avant l'audience et étaient incomplètes, que d'autre part, le tribunal n'a pas répondu à tous les moyens de sa demande et qu'enfin, il a été rendu au terme d'une procédure non contradictoire ;
- en ne faisant pas droit à ses conclusions tendant à la reconstitution de sa carrière, le tribunal a méconnu l'autorité de la chose jugée par le Conseil d'Etat dans ses décisions des 23 novembre 2009 et 27 mai 2011 ;
- pour la période comprise entre 2004 et 2013, la commission administrative paritaire compétente en matière d'avancement au grade de commissaire divisionnaire n'a pas procédé à l'examen particulier de sa situation, les procès-verbaux ne comportant aucune mention relative à sa situation individuelle ;
- l'administration a commis une erreur manifeste d'appréciation en ne procédant pas à sa nomination au grade de commissaire divisionnaire ; il est resté au dernier échelon du grade de commissaire de police alors qu'il remplissait toutes les conditions pour accéder au grade supérieur ; sa notation a augmenté de deux points au titre de l'année 2010 ; en vertu du principe de rétroactivité des décisions d'annulation et de retrait des décrets en cause, la période d'éviction aurait dû être effacée et les notes de 2010 à 2012 devaient être ramenées à celle de 2008, année de son premier licenciement ;
- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que l'administration n'avait pas commis d'erreur de droit en ne procédant pas à son évaluation au titre des années 2008 et 2009 et qu'il n'avait pas été privé d'une chance d'obtenir une meilleure notation s'il avait été noté ;
- aucun des postes sur lesquels il a été affecté ne correspondait à son grade ;
- il est fondé à obtenir réparation des préjudices causés par les décrets du président de la République des 20 mars 2008 et 31 janvier 2011 qui étaient entachés d'illégalité interne ; en outre, l'exécution de ce dernier décret pendant quatre mois lui a causé un préjudice.
Par un mémoire en défense, enregistré le 20 avril 2017, le ministre de l'intérieur demande à la Cour de prononcer un non-lieu à statuer sur les conclusions présentées par M. A... tendant à ce qu'il soit enjoint à l'administration de lui attribuer une affectation correspondant à son grade et à son ancienneté et conclut au rejet du surplus des conclusions de la requête.
Il soutient que :
- par un arrêté en date du 16 mars 2017, M. A...a été affecté, à sa demande, sur le poste d'adjoint au chef de la brigade des chemins de fer à la direction centrale de la police aux frontières à compter du 22 février 2017 ; les conclusions du requérant tendant à ce qu'il soit enjoint à l'administration de lui attribuer une affectation correspondant à son grade et à son ancienneté sont devenues sans objet ;
- les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- le décret n° 95-654 du 9 mai 1995 ;
- le décret n° 2005-939 du 2 août 2005 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Larsonnier,
- les conclusions de M. Lemaire, rapporteur public,
- les observations de MeB..., pour M.A...,
- et les observations de M.A....
1. Considérant que M. A..., titularisé dans le grade de commissaire de police le 1er juillet 1992, a été licencié des cadres de la police nationale pour insuffisance professionnelle, par un décret du Président de la République du 20 mars 2008 ; que le Conseil d'Etat, par une décision du 23 novembre 2009, a annulé ce décret et enjoint au ministre de l'intérieur de procéder à sa réintégration ; qu'en exécution de cette décision, M. A...a été affecté, à compter du 7 janvier 2010, à la direction centrale de la police aux frontières en qualité de chargé de mission, responsable du suivi des fonds européens ; qu'il a de nouveau été licencié des cadres de la police nationale pour insuffisance professionnelle par un décret du Président de la République du 31 janvier 2011 ; que, par une ordonnance du 27 mai 2011, le Conseil d'Etat a suspendu l'exécution de ce décret qui a été retiré par un décret du Président de la République du 15 septembre 2011 ; que, par des courriers en date des 27 janvier 2012 et 12 février 2013, M. A... a saisi le ministre de l'intérieur de demandes tendant à la reconstitution de sa carrière, à bénéficier d'une promotion dans le grade supérieur du corps d'encadrement et de conception de la police nationale, à la révision des modalités de calcul de son indemnité d'éviction ainsi qu'à l'indemnisation de ses préjudices financier et moral ; que, par des courriers en date du 16 juillet 2012 et du 15 avril 2013, le ministre de l'intérieur a proposé de lui verser une somme de 5 000 euros en réparation de ses préjudices et a rejeté le surplus de ses demandes ; que le médiateur interne de la police nationale, saisi par M. A... des mêmes demandes, a émis un avis défavorable le 18 novembre 2013 ; que M. A... fait appel du jugement du 4 mai 2016 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions des 16 juillet 2012 et 15 avril 2013 du ministre de l'intérieur et de l'avis du 18 novembre 2013 du médiateur interne de la police nationale, ainsi qu'à la condamnation de l'Etat à lui verser les sommes de 122 531 euros et 20 000 euros en réparation respectivement des préjudices financier et moral qu'il estime avoir subis du fait de l'illégalité de son éviction du service ;
Sur les conclusions à fin de non-lieu à statuer présentées par le ministre de l'intérieur :
2. Considérant que postérieurement à l'enregistrement de la requête, le ministre de l'intérieur a, par un arrêté en date du 16 mars 2017, affecté M.A..., à sa demande, sur le poste d'adjoint au chef de la brigade des chemins de fer à la direction centrale de la police aux frontières à compter du 22 février 2017 ; que M. A...ne soutient pas que ce poste ne correspondrait pas à son grade et à son ancienneté ; que, par suite, les conclusions présentées par M. A...tendant à ce qu'il soit enjoint au ministre de l'intérieur de lui attribuer une affectation correspondant à son grade et à son ancienneté sont devenues sans objet et qu'il n'y a plus lieu d'y statuer ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
3. Considérant, en premier lieu, que si le requérant soutient que le jugement attaqué a été rendu au terme d'une procédure non contradictoire, ce moyen n'est assorti d'aucune précision permettant d'en apprécier le bien-fondé ; qu'en tout état de cause, il ressort du dossier de première instance transmis à la Cour par le tribunal que celui-ci a communiqué aux parties l'ensemble des mémoires produits devant lui ; que, par suite, ce moyen ne peut qu'être écarté ;
4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article R. 711-3 du code de justice administrative : " Si le jugement de l'affaire doit intervenir après le prononcé de conclusions du rapporteur public, les parties ou leurs mandataires sont mis en mesure de connaître, avant la tenue de l'audience, le sens de ces conclusions sur l'affaire qui les concerne. Lorsque l'affaire est susceptible d'être dispensée de conclusions du rapporteur public, en application de l'article R. 732-1-1, les parties ou leurs mandataires sont mis en mesure de connaître, avant la tenue de l'audience, si le rapporteur public prononcera ou non des conclusions et, dans le cas où il n'en est pas dispensé, le sens de ces conclusions. " ;
5. Considérant que la communication aux parties du sens des conclusions, prévue par les dispositions de l'article R. 711-3 du code de justice administrative, a pour objet de mettre les parties en mesure d'apprécier l'opportunité d'assister à l'audience publique, de préparer, le cas échéant, les observations orales qu'elles peuvent y présenter, après les conclusions du rapporteur public, à l'appui de leur argumentation écrite et d'envisager, si elles l'estiment utile, la production, après la séance publique, d'une note en délibéré ; qu'en conséquence, les parties ou leurs mandataires doivent être mis en mesure de connaître, dans un délai raisonnable avant l'audience, l'ensemble des éléments du dispositif de la décision que le rapporteur public compte proposer à la formation de jugement d'adopter, à l'exception de la réponse aux conclusions qui revêtent un caractère accessoire ; que cette exigence s'impose à peine d'irrégularité de la décision rendue sur les conclusions du rapporteur public ; qu'en revanche, s'il appartient au rapporteur public de préciser, en fonction de l'appréciation qu'il porte sur les caractéristiques de chaque dossier, les raisons qui déterminent la solution qu'appelle, selon lui, le litige, la communication de ces informations n'est toutefois pas prescrite à peine d'irrégularité de la décision ;
6. Considérant qu'il ressort du relevé de l'application " Sagace " que le sens des conclusions du rapporteur public a été porté à la connaissance des parties le 7 avril 2016 à 17 h 00, pour une audience qui s'est tenue le 14 avril 2016 à 9 h 30, soit plus de six jours après la mise en ligne du sens des conclusions ; qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, le rapporteur public n'était pas tenu de communiquer aux parties, préalablement à l'audience, les raisons pour lesquelles il envisageait de conclure dans le sens qu'il indiquait ; qu'en tout état de cause, le rapporteur public concluait au rejet de la requête de M.A... ; que, par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le sens des conclusions aurait été porté à sa connaissance de manière tardive ou incomplète et que le jugement serait ainsi entaché d'irrégularité ;
7. Considérant, en troisième et dernier lieu, que si les premiers juges sont tenus de répondre à tous les moyens des parties, ils ne sont pas tenus de se prononcer sur l'ensemble des arguments soulevés devant eux ; qu'ainsi, ils n'étaient pas tenus de répondre aux arguments tirés de ce que le compte rendu d'entretien professionnel pour l'année 2016 attesterait de la reconnaissance des compétences de l'intéressé et que lors de sa réintégration, celui-ci a été classé au même échelon, le nouvel 9ème échelon correspondant à l'ancien 6ème échelon, énoncés à l'appui du moyen tiré de l'absence d'avancement depuis sa réintégration en 2010, moyen auquel le tribunal a répondu de manière suffisamment précise dans son jugement ;
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne l'absence d'avancement au grade de commissaire divisionnaire :
8. Considérant qu'aux termes de l'article 58 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée : " (...) l'avancement de grade a lieu, selon les proportions définies par les statuts particuliers, suivant l'une ou plusieurs des modalités ci-après : / 1° Soit au choix, par voie d'inscription à un tableau annuel d'avancement, établi après avis de la commission administrative paritaire, par appréciation de la valeur professionnelle et des acquis de l'expérience professionnelle des agents ; (...) " ; qu'aux termes de l'article 17 du décret du 9 mai 1995 susvisé : " Pour l'établissement du tableau d'avancement de grade qui est soumis à l'avis des commissions administratives paritaires, il est procédé à un examen approfondi de la valeur professionnelle des agents susceptibles d'être promus compte tenu des notes obtenues par les intéressés, des propositions motivées formulées par les chefs de service et de l'appréciation portée sur leur manière de servir. Cette appréciation prend en compte les difficultés des emplois occupés et les responsabilités particulières qui s'y attachent ainsi que, le cas échéant, les actions de formation continue suivies ou dispensées par le fonctionnaire et l'ancienneté " ; qu'aux termes de l'article 14 du décret du 2 août 2005 susvisé : " L'avancement de grade a lieu au choix par voie d'inscription à un tableau annuel d'avancement établi après avis de la commission administrative paritaire. / Peuvent être inscrits au tableau d'avancement pour l'accès au grade de commissaire divisionnaire de police, les commissaires de police qui, au 31 décembre de l'année pour laquelle le tableau est dressé, comptent au moins neuf ans de services effectifs en qualité de titulaire dans ce grade, ont suivi une période de formation professionnelle à l'Ecole nationale supérieure de la police et qui ont satisfait à l'obligation de mobilité. (...) " ;
9. Considérant, en premier lieu, que si, pour procéder à la consultation de la commission administrative paritaire sur son projet de tableau annuel d'avancement au grade supérieur d'un cadre d'emploi et sur son projet de liste d'aptitude au cadre d'emploi de la catégorie supérieure, l'autorité administrative compétente n'est pas tenue, en vertu des dispositions rappelées ci-dessus, de faire figurer l'ensemble des agents remplissant les conditions pour être promus sur les projets de tableau et de liste soumis à la commission administrative paritaire, en revanche, elle doit, d'une part, préalablement à la présentation des projets de tableau et de liste avoir procédé à un examen de la valeur professionnelle de chacun des agents remplissant les conditions pour être promus et, d'autre part, tenir à la disposition de la commission administrative paritaire les éléments sur lesquels elle s'est fondée pour établir ses projets de tableau et de liste après avoir comparé les mérites respectifs des agents ;
10. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le ministre de l'intérieur a soumis à la commission administrative paritaire nationale compétente à l'égard du corps de conception et de direction de la police nationale, réunie les 20 décembre 2007, 14 décembre 2010, 6 décembre 2011, 8 février 2013 et 10 décembre 2013, la liste des agents remplissant les conditions pour être promus au grade de commissaire divisionnaire de police, au titre des années concernées parmi lesquels figure le nom de M. A...; qu'il ressort des procès-verbaux de ces séances que la situation individuelle de M. A...a été examinée par la commission administrative paritaire avant qu'elle ne rende son avis ; que celle-ci n'est pas tenue de mentionner, dans le procès-verbal de séance, les noms des agents dont elle a examiné la situation mais dont elle a estimé qu'ils ne remplissaient les conditions pour être promus ; que le requérant ne peut utilement invoquer, à l'appui de sa demande tendant à la reconstitution de sa carrière à compter de son licenciement qui a été prononcé pour la première fois par un décret du 20 mars 2008, le défaut d'examen de sa situation par la commission administrative paritaire nationale compétente à l'égard du corps de conception et de direction de la police nationale, réunie les 16 janvier 2004, 14 décembre 2005, 19 décembre 2006 et, qui au demeurant ne ressort pas des procès-verbaux des séances en cause ; que, par suite, le moyen tiré du défaut d'examen de la situation de l'intéressé au regard de l'avancement au grade de commissaire de police divisionnaire par la commission administrative paritaire nationale compétente doit être écarté ;
11. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte des dispositions rappelées au point 8 que, d'une part, les fonctionnaires, même s'ils remplissent les conditions statutaires requises pour bénéficier d'une promotion au choix, ne détiennent aucun droit à être inscrits sur un tableau d'avancement et que, d'autre part, l'avancement des agents dépend du seul critère de leur valeur professionnelle, l'ancienneté ne pouvant être prise en compte que de manière subsidiaire, en vue de départager les candidats dont les mérites seraient identiques ; que le tableau d'avancement au grade de commissaire divisionnaire de police établi annuellement ne pouvant comporter qu'un nombre limité de fonctionnaires, la valeur professionnelle de M. A... ne pouvait être appréciée, aux fins d'inscription sur ce tableau d'avancement, que par comparaison avec celle des autres agents remplissant les conditions statutaires pour prétendre au même avancement ; qu'ainsi, la circonstance que le requérant ait rempli les conditions statutaires pour bénéficier d'une telle promotion depuis 2004 et puisse se prévaloir d'une attestation favorable établie par le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Bobigny le 8 janvier 2007 n'est pas de nature à lui permettre de prétendre à une inscription automatique au tableau d'avancement au grade de commissaire divisionnaire de police à compter de l'année 2010 date à laquelle il a été réintégré dans les cadres après que le premier décret prononçant son licenciement pour insuffisance professionnelle ait été annulé en raison de l'insuffisance de sa motivation ; que, contrairement à ce que soutient l'intéressé, l'absence de notation au titre des années 2008 et 2009 en raison de son éviction du service et l'annulation et le retrait respectivement des décrets des 20 mars 2008 et 31 janvier 2011 prononçant son licenciement pour insuffisance professionnelle n'impliquent pas que ses notes au titre des années 2010, 2011 et 2012 " soient ramenées à 2008 " et que la note obtenue au titre de 2012 soit ainsi automatiquement augmentée grâce à une progression constante ; qu'en outre, il ne ressort pas des pièces du dossier que les agents promus ayant la même ancienneté que M. A...ou une ancienneté inférieure à la sienne auraient des mérites inférieurs aux siens alors que celui-ci a obtenu la note de 5/7 en 1997, de 4/7 entre 1998 et 2003, 2/7 en 2004 et 2005, 1/7 en 2006 et 2007, 2/7 en 2010, 3/7 en 2011 et 2012 et 4/7 en 2013 ; que si à partir de 2010, la notation de l'intéressé est en légère progression, celle-ci reste faible ; qu'en outre, par un courrier du 4 août 2010, le sous-directeur des ressources de la direction centrale de la police des frontières lui a indiqué qu'il n'avait pas rempli les objectifs qui lui avaient été assignés depuis son affectation en qualité de chargé de mission le 7 janvier 2010 et que sa manière de servir n'était pas satisfaisante ; que la circonstance que le décret du Président de la République du 31 janvier 2011 qui avait prononcé sa radiation pour insuffisance professionnelle a été retiré postérieurement au recours qu'il a introduit devant le Conseil d'Etat n'est pas, à elle seule, de nature à remettre en cause ces appréciations ; que le requérant ne peut utilement se prévaloir de sa note de 6/7 au titre des années 2016 et 2017 qui est postérieure à la période en cause ; que, par suite, c'est à juste titre que les premiers juges ont estimé que le ministre de l'intérieur n'avait pas commis une erreur manifeste d'appréciation en ne promouvant pas M. A...au grade de commissaire divisionnaire ;
12. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 16 du décret du 9 mai 1995 susvisé : " La notation des fonctionnaires actifs des services de la police nationale fait l'objet d'un ou plusieurs entretiens d'évaluation. Elle est établie annuellement sur une notice qui comporte : / 1. Une liste d'éléments d'appréciation non chiffrée permettant d'évaluer les qualités personnelles, professionnelles et les aptitudes manifestées dans l'exercice des fonctions ; / 2. Une grille de notation par niveau de 1 à 7 qui rend compte de la situation du fonctionnaire ; / 3. Une appréciation non chiffrée qui rend compte de l'évolution de la valeur du fonctionnaire " ;
13. Considérant que, s'il résulte des dispositions précitées que doit être attribuée chaque année à tout fonctionnaire des services de la police nationale en activité une note chiffrée accompagnée d'une appréciation écrite exprimant sa valeur professionnelle, l'application de ces dispositions est subordonnée à la présence effective du fonctionnaire au cours de l'année en cause pendant une durée suffisante, eu égard notamment à la nature des fonctions exercées, pour permettre à son chef de service d'apprécier sa valeur professionnelle ; que, comme il a déjà été dit, M. A... a été licencié des cadres de la police nationale pour insuffisance professionnelle, par un décret du Président de la République du 20 mars 2008, avant d'être réintégré et affecté, à compter du 7 janvier 2010, à la direction centrale de la police aux frontières, en qualité de chargé de mission responsable du suivi des fonds européens ; que l'intéressé a donc été absent du service pendant neuf mois en 2008 et durant l'ensemble de l'année 2009 ; que, dans ces conditions, il n'a pas été effectivement présent pendant une durée suffisante pour que son chef de service puisse apprécier sa valeur professionnelle au cours des années 2008 et 2009 ; qu'en outre, aucune disposition législative ou réglementaire, ni aucun principe n'impose à l'administration de prendre en compte, pour la notation des agents, la période d'éviction de ceux ayant fait l'objet d'une réintégration dans le service ; que, par suite, les premiers juges ont pu à juste titre estimer que l'administration n'avait commis aucune illégalité en ne procédant pas à la notation de M.A... ; qu'il s'ensuit que le requérant n'est pas fondé à soutenir qu'il a perdu une chance d'obtenir une meilleure notation au titre des années 2008 et 2009 ;
14. Considérant, enfin, qu'il résulte de ce qui a été dit que la reconstitution de carrière de M. A...n'impliquait aucunement pour le ministre de l'intérieur de le promouvoir au grade de commissaire de police divisionnaire ; que, par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le tribunal, en rejetant ses conclusions à fin de reconstitution de sa carrière, a méconnu l'autorité de la chose jugée attachée à la décision du Conseil d'Etat du 23 novembre 2009 et, en tout état de cause, à l'ordonnance du 27 mai 2011 ;
En ce qui concerne l'absence d'affection sur un poste correspondant au grade de commissaire de police :
15. Considérant qu'aux termes de l'article 2 du décret n°2005-939 du 2 août 2005 portant statut particulier du corps de conception et de direction de la police nationale : " Les commissaires de police de la police nationale constituent ce corps qui est un corps technique supérieur à vocation interministérielle relevant du ministre de l'intérieur. Ils sont chargés de l'élaboration et de la mise en oeuvre des doctrines d'emploi et de la direction des services dont ils assument la responsabilité opérationnelle et organique. Ils ont autorité sur les personnels affectés dans ces services. Ils peuvent être appelés à exercer leurs fonctions dans les établissements publics administratifs placés sous la tutelle du ministre de l'intérieur. Ils participent à la conception, à la réalisation et à l'évaluation des programmes et des projets relatifs à la prévention de l'insécurité et à la lutte contre la délinquance. Ils exercent les attributions de magistrat qui leur sont conférées par la loi. Ils portent l'écharpe tricolore en signe distinctif de leur autorité toutes les fois que l'exercice de leurs fonctions le requiert. Ils sont dotés d'une tenue d'uniforme. " ;
16. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le requérant a été affecté, le 7 janvier 2010, sur un poste de chargé de mission à la direction centrale de la police aux frontières ; qu'en se bornant à soutenir que ce poste n'est pas " référencé " au sein du corps de conception et de direction de la police nationale, M. A...n'établit pas que ce poste ne correspondrait pas à son grade et aux missions dévolues au commissaire de police alors qu'il est constant que les postes nouvellement créés et les postes créés à titre temporaire ne sont pas l'objet d'un référencement dans la nomenclature des postes ; que, par ailleurs, il est constant que M. A...s'est vu proposer, en juillet 2013, les postes de coordinateur du traitement du contentieux contraventionnel à Lille et d'adjoint au chef de la brigade des chemins de fer au service national de la police ferroviaire à Paris ; que la circonstance invoquée par le requérant qu'il a refusé l'un des postes en raison du coût financier occasionné par un déménagement et l'autre poste, au motif que celui-ci était destiné à des commissaires débutants à l'issue de leur scolarité, ne justifie pas que ces postes ne correspondaient pas à son grade ; que, par suite, c'est à juste titre que les premiers juges ont estimé que M. A... avait été affecté dès le 7 janvier 2010 sur un poste correspondant à son grade ;
En ce qui concerne la demande indemnitaire :
17. Considérant que, si l'intervention d'une décision illégale peut constituer une faute susceptible d'engager la responsabilité de l'Etat, elle ne saurait donner lieu à réparation si, dans le cas d'une procédure régulière, la même décision aurait pu légalement être prise ;
18. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, d'une part, le décret du 20 mars 2008 du Président de la République prononçant le licenciement de M. A...des cadres de la police nationale pour insuffisance professionnelle a été annulé, comme il a déjà été dit, par une décision du Conseil d'Etat du 23 novembre 2009 au motif que ce décret était insuffisamment motivé au regard des exigences des dispositions de l'article 19 de la loi du 13 juillet 1983 ; que M. A..., qui exerçait alors les fonctions de chef de la division de la sécurité générale à la direction des aéroports Roissy-Charles de Gaulle-Le Bourget, a obtenu des notes en constante diminution correspondant à 4/7 en 2003, 3/7 en 2004, puis 2/7 en 2005 et enfin 1/7 en 2006 et 2007 ; que ces notes s'accompagnaient d'appréciation très négatives, ses supérieurs hiérarchiques déplorant son manque d'implication réitéré dans l'exercice de ses fonctions en dépit des mises en garde énoncées à plusieurs reprises à son encontre et son refus d'appliquer les mesures de la réforme organisationnelle consécutive à l'audit de modernisation de la police aux frontières de Roissy témoignant ainsi d'un comportement " inadapté à un service opérationnel " ; que, dans ces conditions, M. A...n'établit pas que le motif tiré de son insuffisance professionnelle repose sur des faits matériellement inexacts ou qu'il est entaché d'erreur d'appréciation ; que le licenciement de M. A...étant ainsi justifié au fond, ses conclusions indemnitaires doivent être rejetées ;
19. Considérant, d'autre part, que l'exécution du décret du 31 janvier 2011 par lequel le Président de la République a, à nouveau, prononcé le licenciement de M. A...pour insuffisance professionnelle a été suspendue par l'ordonnance du Conseil d'Etat du 27 mai 2011 au motif que l'absence de prise en compte des caractéristiques de l'activité professionnelle de l'intéressé depuis sa réintégration en janvier 2010, paraissait, en l'état de l'instruction, faire naître un doute sérieux sur sa légalité dès lors qu'il s'agissait d'un nouveau licenciement pour insuffisance professionnelle et non de la reprise d'une révocation disciplinaire ; que ce décret a finalement été retiré par un décret du Président de la République du 15 septembre 2011 ; que depuis sa réintégration le 7 janvier 2010 à la direction centrale de la police aux frontières en qualité de chargé de mission responsable du suivi des fonds européens, l'intéressé a obtenu les notes de 2/7 en 2010 et 3/7 en 2011 et 2012 ; que si le requérant soutient qu'il a obtenu de bons résultats et en particulier, a permis à l'Etat d'obtenir le remboursement de la somme de 1 440 000 euros au titre des fonds européens dont il assurait le suivi, il a néanmoins été destinataire, le 29 mars 2010 et le 4 août 2010, de courriers du sous-directeur des ressources de la direction centrale de la police aux frontières, déplorant son absence de résultats professionnels et lui enjoignant d'accomplir les missions qui lui avaient été confiées ; qu'ainsi, le licenciement de M. A...prononcé le 31 janvier 2012 était justifié par l'insuffisance de ses capacités professionnelles ; que, par suite, sa demande indemnitaire, y compris celle portant sur le préjudice résultant de l'exécution de ce décret pendant quatre mois, doit être rejetée ;
20. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité des conclusions à fin d'annulation de l'avis du médiateur interne de la police nationale du 18 novembre 2013, que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au ministre de l'intérieur de procéder à la reconstitution de sa carrière ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. A...tendant à ce qu'il soit enjoint au ministre de l'intérieur de lui attribuer une affectation correspondant à son grade et à son ancienneté.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A...est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...A...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 5 avril 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Formery, président de chambre,
- Mme Poupineau, président assesseur,
- Mme Larsonnier, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 3 mai 2018.
Le rapporteur,
V. LARSONNIERLe président,
S.-L. FORMERY
Le greffier,
N. ADOUANE
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 16PA02117