Procédure devant la Cour :
I° Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés le 28 mai 2015 et le
1er avril 2016 sous le n° 15PA02152, l'EPAURIF, représenté par MeA..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il lui est défavorable ;
2°) de rejeter la demande de la société Totalia ;
3°) de mettre à la charge de la société Totalia la somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
L'EPAURIF soutient que :
- les premiers juges, en omettant de statuer sur le moyen tiré de ce que la société Totalia avait commis une faute de nature à l'exonérer de 50% de sa responsabilité, ont méconnu
l'article R. 741-2 du code de justice administrative et ont ainsi entaché le jugement attaqué d'irrégularité ;
- les premiers juges, en ne précisant pas les raisons pour lesquelles ils accordaient à la société Totalia une somme de 40 000 euros HT, ont entaché le jugement attaqué d'une insuffisance de motivation ;
- les premiers juges ont entaché le jugement attaqué d'une contradiction entre les motifs et le dispositif en mentionnant, à l'article 2, un montant hors taxes et non un montant net ;
- les premiers juges ont méconnu l'application de l'article 256 du code général des impôts en n'assujettissant pas la somme de 40 000 euros à la taxe sur la valeur ajoutée ;
- les indemnités réclamées par la société Totalia sont surévaluées dès lors que les justifications produites sont insuffisantes et que les charges supportées par cette société doivent être majorées ;
- les factures émises par cette société au titre de la période allant du 2 janvier au
8 février 2013 ne sont pas dues.
Par un mémoire en défense, enregistré le 13 août 2015, la société Totalia conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de l'EPAURIF le versement d'une somme de
4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La société Totalia soutient que les moyens soulevés par l'EPAURIF ne sont pas fondés.
II° Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés le 22 juin 2015 et le
1er avril 2016, sous le n° 15PA02511, l'EPAURIF, représenté par MeA..., demande à la Cour, sur le fondement des articles R. 811-16 et R. 811-17-1 du code de justice administrative, de surseoir à l'exécution du jugement n°1310465 du tribunal administratif de Paris en date du
27 mars 2015 et de mettre à la charge de la société Totalia la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
L'EPAURIF soutient que :
- l'exécution du jugement risque de l'exposer à la perte définitive de la somme à laquelle elle a été condamnée dès lors que la société Totalia, qui ne compte que dix salariés et un résultat de 412 610 euros, n'a pas publié ses données comptables pour l'année fiscale 2014 ;
- les premiers juges ont entaché le jugement attaqué d'une contradiction entre les motifs et le dispositif en mentionnant, à l'article 2, un montant hors taxes et non un montant net ;
- les premiers juges ont méconnu l'application de l'article 256 du code général des impôts en n'assujettissant pas la somme de 40 000 euros à la taxe sur la valeur ajoutée ;
- les indemnités réclamées par la société Totalia sont surévaluées dès lors que les justifications produites sont insuffisantes et que les charges supportées par cette société doivent être majorées ;
- les factures émises par cette société au titre de la période allant du 2 janvier au
8 février 2013 ne sont pas dues.
Par un mémoire en défense, enregistré le 13 août 2015, la société Totalia conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de l'EPAURIF le versement d'une somme de
2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La société Totalia soutient que les moyens soulevés par l'EPAURIF ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des marchés publics ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Boissy, rapporteur,
- les conclusions de M. Rousset, rapporteur public,
- et les observations de MeB..., pour l'EPAURIF.
1. Considérant que les conclusions d'appel et de sursis à exécution ont été formées par le même établissement public contre un même jugement, présentent à juger des mêmes questions et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a dès lors lieu de les joindre pour que les deux requêtes fassent l'objet d'un seul arrêt ;
2. Considérant que, le 7 avril 2011, l'établissement public d'aménagement universitaire de la région Ile-de-France (EPAURIF) a conclu avec la société Totalia onze contrats portant sur l'entretien et la maintenance de divers modèles de copieurs et télécopieurs de marque Canon pour une durée de cinq ans ; que, le 4 février 2013, l'EPAURIF a résilié l'ensemble de ces contrats avec effet au 15 février 2013 ; que, le 15 avril 2013, la société Totalia a demandé à l'EPAURIF de lui régler les sommes correspondant à des factures non réglées et aux indemnités contractuelles de résiliation ; que l'EPAURIF a implicitement rejeté cette demande ; que, par un jugement du 27 mars 2015, le tribunal administratif de Paris, d'une part, a condamné l'EPAURIF à verser à la société Totalia, au titre des factures impayées, la somme de 5 310,06 euros assortie des intérêts moratoires à compter du 16 février 2013 et, au titre des indemnités de résiliation, la somme de 40 000 euros HT assortie des intérêts moratoires à compter du 17 mai 2013 et, d'autre part, a rejeté le surplus de la demande de la société ; que l'EPAURIF relève appel de ce jugement en tant qu'il lui est défavorable et demande par ailleurs à la Cour de surseoir à l'exécution de ce jugement sur le fondement de l'article R. 811-16 du code de justice administrative ;
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
En ce qui concerne la régularité du jugement attaqué :
3. Considérant, en premier lieu, que si l'EPAURIF soutient que les premiers juges ont omis de statuer sur le moyen tiré de ce que la société Totalia avait commis une faute de nature à entraîner un partage de responsabilité et une " minoration de 50 % du remboursement des dépenses utilement exposées pour la collectivité ", il ressort toutefois de ses écritures produites le 25 mars 2014 devant le tribunal administratif de Paris que l'EPAURIF n'a invoqué cet argument qu'au soutien de son moyen de défense tiré de ce que les contrats litigieux étaient entachés de nullité ; qu'il ressort des motifs du jugement attaqué, et en particulier du point 9, que les premiers juges n'ont pas accueilli ce moyen de défense et n'ont pas écarté l'application de l'intégralité des contrats pour régler le litige ; que s'ils ont en revanche écarté l'application de la seule clause de dédit, il ressort des points 16 et 17 du jugement attaqué que le tribunal a bien analysé puis écarté le moyen de défense, tiré de la faute de la victime, invoqué par l'EPAURIF ; que les premiers juges n'ont dès lors pas méconnu l'article R. 741-2 du code de justice administrative ;
4. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des motifs du jugement attaqué, et en particulier du point 18, que les premiers juges ont expliqué, avec une précision suffisante, les raisons pour lesquelles ils ont évalué à 40 000 euros HT le préjudice subi par la société Totalia résultant de la résiliation ; que l'EPAURIF n'est dès lors pas fondé à soutenir que le jugement attaqué serait entaché d'une insuffisance de motivation sur ce point ;
5. Considérant, en dernier lieu, qu'en estimant, au point 18, que l'indemnité de
40 000 euros HT n'entrait pas dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée et en condamnant l'EPAURIF, à l'article 2 du dispositif, à verser à la société Totalia une somme de 40 000 euros HT, les premiers juges n'ont pas entaché le jugement attaqué d'une contradiction entre ses motifs et son dispositif ; que, contrairement à ce qu'il soutient, le montant auquel l'EPAURIF a été condamné et qu'il doit verser en exécution de ce jugement ne doit nullement être majoré de la taxe sur la valeur ajoutée ;
En ce qui concerne le bien-fondé du jugement :
S'agissant des factures émises le 2 janvier 2013 :
6. Considérant, en premier lieu, que la société Totalia a émis, le 2 janvier 2013, six factures n° FA1301081, n° FA1301082, n° FA1301083, n° FA1301084, n° FA1301085 et n° FA1301086 au titre de la période allant du 1er janvier au 31 mars 2013, pour un montant total de 9 528,27 euros TTC ; qu'aucune stipulation des contrats d'entretien et de maintenance n'a prévu que le forfait de rémunération serait diminué dans l'hypothèse où les copieurs et télécopieurs ne seraient pas utilisés du fait de l'EPAURIF ; que, toutefois, compte tenu de la date d'effet de la résiliation de l'ensemble des contrats, le 15 février 2013, la société Totalia est seulement fondée à demander à l'EPAURIF le règlement de ces factures pour la période allant du 1er janvier au 15 février 2013, pour un montant de 4 827, 33 euros TTC ;
7. Considérant, en second lieu, qu'il est constant que l'EPAURIF n'a pas réglé cette somme de 4 827,33 euros TTC dans les délais prévus par ces contrats ; que, dès lors, en application de la clause pénale de 10% figurant dans les différents contrats, il doit payer une majoration de 482, 73 euros TTC au titre des factures en litige ;
8. Considérant, dès lors, que la somme due par l'EPAURIF au titre des six factures émises le 2 janvier 2013 s'élève à 5 310,06 euros TTC ;
S'agissant de l'indemnité de résiliation :
9. Considérant qu'en cas de résiliation d'un contrat pour un motif d'intérêt général, le cocontractant de la personne publique a droit à la réparation intégrale du préjudice résultant pour lui de cette résiliation ; qu'il n'en va différemment que dans le cas où soit le contrat en dispose autrement soit il est établi que le cocontractant a concouru par son attitude à la survenance du préjudice dont il demande réparation ;
10. Considérant que l'indemnisation du manque à gagner est calculée sur la base de la marge nette qu'aurait engendrée la complète exécution des prestations prévues par le marché résilié après déduction des frais commerciaux, généraux et financiers ;
11. Considérant, en premier lieu, que les onze contrats portant les nos AG070411/01, AG070411/02, AG070411/03, AG070411/04, AG070411/05, AG070411/06, AG070411/07, AG070411/08, AG070411/10, AG070411/11 et AG070411/12 produits au dossier ont été signés le 7 avril 2011 par l'EPAURIF et la société Totalia pour une durée de cinq ans à compter du " 1er juillet 2011 ", de sorte que la fin de l'exécution de ces contrats était prévue le 30 juin 2016 ; que, compte tenu de ce que la résiliation de ces contrats est intervenue le 4 février 2013 avec effet au 15 février 2013, il restait 40,5 mois avant l'expiration de ces contrats ;
12. Considérant, en deuxième lieu, que la société Totalia n'établit pas, par des éléments probants, que le chiffre d'affaires qu'elle était susceptible de réaliser au cours la période restant à courir serait de 66 500 euros HT, soit 79 901,29 euros TTC ; que, dans ces conditions, compte tenu des mentions figurant dans les " conditions générales de maintenance " de ces contrats et des factures établies le 2 janvier 2013, il sera fait une juste appréciation du chiffre d'affaires de la société en l'évaluant au forfait minimum facturable qui représentait, pour l'ensemble de ces onze contrats, un total de 15 388 euros HT par an, soit 51 934 euros HT pour les 40,5 mois qui restaient à courir ;
13. Considérant, en dernier lieu, qu'il résulte de l'instruction, et en particulier du courrier de la société Totalia du 11 février 2015, de l'attestation de l'expert-comptable du 10 février 2015 et du détail des comptes de résultats produits, et qu'il n'est pas sérieusement contesté, que la marge nette de la société Totalia, au titre des contrats en litige, s'élève à 42,67 % ;
14. Considérant, dès lors, que l'indemnité à laquelle a droit la société Totalia au titre du manque à gagner résultant de la résiliation des contrats en litige s'élève à 22 160,24 euros HT (51 934 X 42,67 %) ;
15. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que l'EPAURIF est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a accordé à la société Totalia une indemnité de résiliation supérieure à
22 160,24 euros HT et à demander, dans cette mesure, la réformation de ce jugement ;
Sur les conclusions aux fins de sursis à exécution :
16. Considérant que le présent arrêt statue sur les conclusions de l'EPAURIF aux fins d'annulation du jugement attaqué ; que, dès lors, ses conclusions tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce même jugement, présentées dans la requête n°15PA02511, sont devenues sans objet ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
17. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'EPAURIF, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que demande la société Totalia au titre des frais exposés par ce dernier et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas davantage lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Totalia la somme que demande l'EPAURIF au titre de ces mêmes frais ;
D É C I D E :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions aux fins de sursis à exécution présentées par l'EPAURIF dans la requête n° 15PA02511.
Article 2 : La somme de 40 000 euros HT à laquelle l'EPAURIF a été condamné à l'article 2 du jugement n° 1310465 du tribunal administratif de Paris en date du 27 mars 2015 est ramenée à 22 160,24 euros HT.
Article 3 : Le jugement n° 1310465 du tribunal administratif de Paris en date du 27 mars 2015 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : Le surplus des conclusions présentées par les parties est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à l'établissement public d'aménagement universitaire de la région Ile-de-France et à la société Totalia.
Délibéré après l'audience du 8 avril 2016, à laquelle siégeaient :
- Mme Driencourt, président de chambre,
- Mme Mosser, président assesseur,
- M. Boissy, premier conseiller.
Lu en audience publique le 29 avril 2016.
Le rapporteur,
L. BOISSYLe président,
L. DRIENCOURTLe greffier,
A-L. PINTEAU
La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement et de la recherche en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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Nos 15PA02152 ; 15PA02511 3