Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 29 avril 2015, Mme A...épouseB..., représentée par Me Baronet, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1422132/2-1 du 24 mars 2015 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet de police du 7 avril 2014 ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 300 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'avis du médecin, chef du service médical de la préfecture de police, qui lui a été communiqué avec le mémoire en défense du préfet de police, ne peut être regardé comme ayant été établi dans le cadre de sa demande de réexamen tel qu'ordonné par le jugement du 12 novembre 2013 du Tribunal administratif de Paris ;
- le préfet a méconnu l'autorité de la chose jugée attachée au jugement du Tribunal administratif de Paris en date du 12 novembre 2013 qui a annulé l'arrêté du 20 février 2013 dès lors qu'il n'a pas procédé au réexamen de sa situation sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile à défaut de l'avoir convoquée et invitée à produire toutes pièces de nature médicale ;
- la décision portant refus de titre de séjour méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors qu'elle souffre non seulement d'une pathologie gynécologique mais aussi d'un syndrome anxio-dépressif majeur lié à un traumatisme vécu en Angola, où il n'existe pas de traitement approprié à son état de santé ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire a été signée par une autorité incompétente dès lors qu'il n'est pas établi que le préfet était alors absent ou empêché ;
- cette décision a été prise sans tenir compte de l'autorité de la chose jugée attachée au jugement du 12 novembre 2013 du Tribunal administratif de Paris ;
- la décision méconnaît les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le préfet de police n'a pas recherché si des circonstances humanitaires exceptionnelles interdisaient, compte tenu de son état de santé et des traitements inhumains et dégradants qu'elle a subis, qu'elle fasse l'objet d'une obligation de quitter le territoire ;
- la décision méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant dès lors qu'elle porte atteinte à l'intérêt supérieur de ses deux filles qui résident et sont scolarisées en France, et en particulier de celle âgée de douze ans ;
- la décision fixant le pays de destination est entachée d'une insuffisance de motivation ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
La requête a été communiquée au préfet de police, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Bonneau-Mathelot,
- et les observations de Me Baronet, avocat de Mme A...épouseB....
Considérant ce qui suit :
1. Mme A...épouseB..., ressortissante angolaise, a sollicité une carte de séjour temporaire sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 7 avril 2014, le préfet de police a refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai d'un mois et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite d'office à l'issue de ce délai. Mme A...épouse B...fait appel du jugement du 24 mars 2015 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur les conclusions tendant à l'annulation du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / [...] ; 11°: A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis [...], à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. [...] ".
3. Mme A...épouse B...souffre de troubles dépressifs sévères caractérisés par des idées noires, des moments d'angoisse majeure, une perte de l'estime de soi et des insomnies persistantes qui trouvent leur origine dans des événements traumatisants vécus en Angola ainsi que cela ressort des pièces versées au dossier. Pour refuser de délivrer un titre de séjour à l'intéressée à raison de son état de santé, le préfet de police s'est, notamment, fondé sur l'avis du 27 septembre 2013 par lequel le médecin, chef du service médical de la préfecture de police a estimé que si son état de santé nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, le traitement et le suivi appropriés à son état étaient disponibles en Angola. Toutefois, Mme A...épouse B...produit des certificats médicaux établis par le même praticien hospitalier qui la suit en France lesquels font mention, d'une part, des antidépresseur, anxiolytique et hypnotique qui lui sont prodigués et, d'autre part, de la circonstance que " le traitement approprié ne peut être dispensé dans le pays dont elle est originaire " et qui sont, contrairement à ce que soutient le préfet de police qui ne verse aucun élément justifiant de la disponibilité desdits médicaments en Angola et se borne à faire état de l'existence de structures hospitalières en Angola, de nature à infirmer les mentions de l'avis du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. Par suite et, dans les circonstances de l'espèce, Mme A... épouse B...est fondée à soutenir que le préfet de police a méconnu les dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
4. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que Mme A...épouse B...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :
5. Eu égard au motif d'annulation retenu au point 3 et alors qu'il ne résulte pas de l'instruction que des éléments de fait ou de droit nouveaux justifieraient que l'autorité administrative oppose une nouvelle décision de refus, le présent arrêt implique nécessairement que cette autorité délivre à Mme A...épouse B...le titre de séjour sollicité. Il y a lieu, par suite, d'enjoindre au préfet de police de délivrer ce titre dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte.
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mme A...épouse B...et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1422132/2-1 du 24 mars 2015 du Tribunal administratif de Paris et l'arrêté du préfet de police du 7 avril 2014 sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de délivrer à Mme A...épouse B...une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à Mme A...épouse B...une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... épouseB..., au préfet de police et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 15 février 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Lapouzade, président de chambre,
- M. Luben, président assesseur,
- Mme Bonneau-Mathelot, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 7 mars 2016.
Le rapporteur,
S. BONNEAU-MATHELOTLe président,
J. LAPOUZADE
Le greffier,
A. CLEMENTLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15PA01753