Par une requête, enregistrée le 13 janvier 2016, M.A..., représenté par Me Falah, avocat, demande à la Cour :
1° d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Versailles du 21 décembre 2015 en tant qu'il rejette sa demande d'annulation de la décision de reconduite à la frontière et de la décision fixant le pays de renvoi du préfet de l'Essonne du 16 décembre 2015 ;
2° d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet de l'Essonne du 16 décembre 2015 ;
3° d'enjoindre au préfet de l'Essonne de lui délivrer une carte de séjour temporaire, dans un délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans les mêmes délais et sous la même astreinte et de lui délivrer durant cet examen une autorisation provisoire de séjour ;
4° de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
M. A...soutient que :
- l'arrêté est insuffisamment motivé ;
- le préfet a méconnu les dispositions de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il a commis une erreur manifeste d'appréciation et a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 12 de la déclaration universelle des droits de l'homme ;
- l'arrêté est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation du requérant.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la Constitution ;
- la déclaration universelle des droits de l'homme ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Boret a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que M.A..., ressortissant bangladais, déclare être entré en France le 29 décembre 2003, à l'âge de dix-neuf ans ; que, malgré l'arrêté du 7 octobre 2014 du préfet de l'Essonne l'enjoignant de quitter le territoire français, il s'est maintenu en France ; que le 16 décembre 2015 il est interpellé sur réquisition du procureur de la République en position de travail dissimulé ; qu'il n'a pu présenter aucun papier d'identité ni document l'autorisant à circuler sur le territoire français ; que le même jour lui sont notifiés deux arrêtés, en date du 16 décembre 2015, par lesquels le préfet de l'Essonne décide sa reconduite à la frontière, fixe le pays de renvoi et le place en rétention administrative ; que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Versailles a annulé l'arrêté portant décision de placement de M. A... en rétention administrative et a rejeté le surplus des conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté portant reconduite à la frontière et fixation du pays de renvoi ; que M. A...demande l'annulation de ce jugement, en tant qu'il a rejeté sa demande d'annulation de la mesure de reconduite à la frontière ;
2. Considérant, en premier lieu, que si M. A...soutient que l'arrêté préfectoral attaqué est insuffisamment motivé, il ressort de l'ensemble des énonciations dudit arrêté que M. A...a été interpellé alors qu'il exerçait une activité professionnelle sans détention de l'autorisation de travail légalement requise, que cet arrêté se fonde sur les articles L. 5221-5 du code du travail et L. 533-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qu'il comporte les éléments de fait et de droit exigés par les dispositions législatives applicables ; qu'ainsi, le moyen manque en fait et doit être écarté ;
3. Considérant, en deuxième lieu, que M. A...soutient que le préfet a méconnu les dispositions de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en décidant à son encontre d'une reconduite à la frontière alors qu'il réside en France depuis 2003, soit plus de dix ans ; qu'aux termes de l'article L. 511-4 précité, " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : [...] 4° L'étranger qui réside régulièrement en France depuis plus de dix ans, sauf s'il a été, pendant toute cette période, titulaire d'une carte de séjour temporaire portant la mention " étudiant " " ; que l'article L. 533-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile renvoie bien aux dispositions de l'article L. 511-4 ; qu'il n'est toutefois pas contesté que M.A..., n'ayant jamais obtenu de titre de séjour, se trouve en situation irrégulière en France ; qu'au demeurant, il ne ressort pas des pièces du dossier que le requérant aurait résidé de manière continue en France pendant dix ans ; qu'ainsi M.A..., qui n'entre pas dans le champ d'application des dispositions précitées de l'article L. 511-4, n'est pas fondé à soutenir que le préfet de l'Essonne a méconnu les dispositions dudit article ;
4. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
5. Considérant que M. A...déclare être entré en France le 29 décembre 2003 et soutient qu'il justifie de sa présence habituelle en France depuis cette date ; que, toutefois, il ne produit aucune pièce pour les années 2003, 2008, 2010 et 2011 ; qu'en outre les pièces antérieures à l'année 2012 sont toutes liées à ses demandes d'asile et n'attestent pas d'une quelconque insertion sociale ou professionnelle pour cette période ; que, de plus, les avis d'imposition produits ne mentionnent aucun revenu déclaré ; qu'il ne prend à bail un appartement que depuis 2012 et n'a exercé un emploi déclaré qu'entre août 2013 et septembre 2014 ; qu'enfin, les autres pièces, composées d'une attestation de carte vitale, d'une facture EDF et d'avis d'imposition sur la taxe d'habitation, ne démontrent pas une intégration particulière ;
6. Considérant que la production de deux attestations, rédigées par un ami et un cousin de M.A..., ne démontre pas que l'intéressé aurait noué, en France, des liens personnels et familiaux d'une intensité telle, que le préfet de l'Essonne aurait porté une atteinte disproportionnée au respect de sa vie privée et familiale en décidant de le reconduire à la frontière ; que, dans ces conditions, et nonobstant la circonstance que M. A...a occupé un emploi au cours de son séjour en France, il n'est pas fondé à soutenir que le préfet aurait commis une erreur manifeste d'appréciation et aurait porté une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale contraire aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
7. Considérant, en quatrième lieu, que M. A...ne saurait invoquer utilement les stipulations de l'article 12 de la déclaration universelle des droits de l'homme, qui ne figure pas au nombre des textes diplomatiques ayant été ratifiés ou approuvés dans les conditions fixées par l'article 55 de la Constitution ;
8. Considérant, en cinquième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de l'Essonne aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de l'arrêté litigieux sur la situation personnelle de M. A... ;
9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande d'annulation de la mesure portant reconduite à la frontière ; que, par voie de conséquence, ses conclusions en injonction sous astreinte et celles présentées en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.
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N° 16VE00091