Résumé de la décision
Dans cette affaire, des actionnaires de la société anonyme "l'Union commerciale" ont contesté la validité d'une modification des statuts adoptée lors d'une assemblée générale extraordinaire. Cette modification stipulait que toutes les actions seraient nominatives et que toute cession d'actions nécessiterait l'agrément du Conseil d'administration. La Cour d'appel de Paris a déclaré cette modification nulle, estimant qu'elle portait atteinte au droit de vote égal des actionnaires. Cependant, la Cour de cassation a annulé cette décision, considérant que la clause ne limitait pas le droit de vote des actionnaires et ne violait pas les dispositions légales.
Arguments pertinents
1. Droit de vote des actionnaires : La Cour de cassation a souligné que l'article 31, alinéa 2, de la loi du 24 juillet 1867, confère à chaque actionnaire un droit de vote proportionnel au nombre d'actions détenues, sans limitation statutaire. La Cour a noté que la modification des statuts ne portait pas atteinte à ce droit, car elle ne limitait pas le nombre de voix attachées aux actions.
> "l'article 31, alinéa 2, de la loi du 24 juillet 1867 [...] ne lui reconnaît pas par là même un droit propre et intangible à l'acquisition de nouvelles actions."
2. Absence de limitation des droits de vote : La Cour de cassation a contesté l'interprétation de la Cour d'appel selon laquelle la clause d'agrément aurait pu créer une inégalité entre actionnaires agréés et non agréés. Elle a affirmé qu'aucune atteinte n'était portée au libre exercice du droit de vote des actionnaires.
> "l'arrêt attaqué a faussement appliqué, donc violé le texte susvisé."
3. Affection sociétale et stabilité des décisions : La Cour a également rejeté l'argument selon lequel le droit d'agrément serait incompatible avec l'affectio societatis, soulignant que cette mesure visait à protéger l'intérêt collectif des actionnaires.
> "l'intention nécessaire des associés de collaborer n'entache pas de nullité une mesure qui tend précisément à empêcher que l'intérêt de certains d'entre eux l'emporte sur celui de tous."
Interprétations et citations légales
1. Article 31, alinéa 2, de la loi du 24 juillet 1867 : Cet article établit le principe fondamental du droit de vote proportionnel des actionnaires. La Cour de cassation a interprété cet article comme garantissant que chaque actionnaire a un droit de vote égal, qui ne peut être limité que par des dispositions uniformes pour tous les actionnaires.
> "l'actionnaire possède dans les assemblées un droit propre de vote égal pour tous les actionnaires porteurs de titres de la même entreprise, proportionnel au nombre des actions et qui ne peut être limité que si la limitation est uniforme pour tous."
2. Article 22 de la loi du 24 juillet 1867 : Cet article stipule que les administrateurs d'une société anonyme sont révocables par l'assemblée générale. La Cour a utilisé cet article pour soutenir que le droit d'agrément ne compromet pas la structure démocratique de la société, car les administrateurs restent sous le contrôle des actionnaires.
> "les administrateurs demeurent révocables par décision de l'assemblée générale, conformément aux dispositions de l'article 22 de la loi du 24 juillet 1867."
En conclusion, la Cour de cassation a réaffirmé le principe de l'égalité des droits de vote des actionnaires tout en reconnaissant la légitimité des clauses d'agrément dans les statuts des sociétés, tant qu'elles ne portent pas atteinte à ce principe fondamental.