Résumé de la décision
En 2015, le maire de la commune de Changé a délivré un permis d’aménager un lotissement, suite à quoi M. et Mme A... ont acquis une parcelle pour construire leur maison. Après de fortes précipitations, leur parcelle a été inondée, entraînant des coûts supplémentaires pour la construction. Ils ont alors saisi le tribunal administratif de Nantes pour demander réparation contre la commune et la société responsable des travaux. Le tribunal a renvoyé la question de compétence au Tribunal des conflits, qui a conclu que le juge administratif était compétent pour les réclamations contre la société Gaëtan Caruel infrastructures, tandis que les demandes contre la commune relèvent de la compétence du juge judiciaire.
Arguments pertinents
1. Nature des actions en responsabilité : La décision souligne que les actions en responsabilité envers un maître de l'ouvrage public relèvent d'un cadre juridique distinct selon que l'action est fondée sur un contrat de droit privé ou sur des responsabilités liées aux travaux publics. La compétence dépend de la nature des obligations invoquées par la victime.
> "les conclusions de M. et Mme A..., [...] tendent à la réparation d'un dommage consécutif à l'inexécution d'une obligation résultant d'un contrat de droit privé... elles sont de la nature de celles qui relèvent de la compétence du juge judiciaire."
2. Distinction entre les responsabilités : La décision clarifie que, lorsqu’un dommage résulte d’une inexécution contractuelle dans un cadre privé, il ne peut en découler qu’une action fondée sur ce contrat.
> "lorsqu'une personne privée est liée à une personne publique par un contrat,... elle ne peut... exercer d'autre action en responsabilité contre cette personne publique au titre de l'inexécution ou la mauvaise exécution des obligations contractuelles que celle procédant de ce contrat."
3. Compétence des juridictions : Le tribunal a dû trancher sur les compétences respectives des juridictions administrative et judiciaire dans le cadre des demandes de M. et Mme A....
> "la juridiction administrative est compétente pour connaître des conclusions de M. et Mme A... en ce qu'elles sont dirigées contre la société Gaëtan Caruel infrastructures."
Interprétations et citations légales
La décision s'appuie sur le principe de la séparation des compétences entre les juridictions administratives et judiciaires, qui est régie par le Code de justice administrative et le Code civil. En particulier, l'article 35 du décret du 27 février 2015 détaille les procédures de renvoi entre les juridictions.
1. Code de justice administrative - Article 35 : Cet article prévoit le renvoi des affaires au Tribunal des Conflits lorsqu’une question de compétence sérieuse est posée, comme c'est le cas ici.
2. Application de la loi de 1872 : La loi du 24 mai 1872 statue également sur les compétences touchant à la responsabilité administrative, qui est recherchée contre un maître d'ouvrage public lorsque l'inexécution du contrat en est la cause, permettant une répartition claire des responsabilités selon le type de contrat.
> "s'il appartient à la juridiction administrative de statuer sur les actions en responsabilité..., il en va différemment lorsque le fondement de l'action[...] réside dans un contrat de droit privé."
La décision réaffirme que la nature de l’obligation qui lie les parties détermine la juridiction compétente. En l'occurrence, la faute imputée à la commune, en tant que lotisseur, est appréciée sous le prisme d'un contrat civil, tandis que la responsabilité de la société de travaux publics est soumise aux règles des travaux publics. Le cadre légal de la responsabilité contractuelle et délictuelle se précise ainsi dans le contexte administratif et judiciaire.