Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 18 décembre 2020, le préfet de la Vienne demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers du 17 novembre 2020 ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. A... E... devant le tribunal administratif de Poitiers.
Il soutient que :
- il a procédé à un examen particulier et sérieux de la situation de M. A... E... ;
- le motif tiré du défaut de visa de long séjour justifiait à lui seul le refus de titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors que l'intéressé n'entre pas dans les catégories d'étrangers dispensés de l'obtention d'un tel visa en vertu de l'article L. 313-7 et du 2° bis de l'article L. 313-11 du même code.
Par un mémoire en défense, enregistré le 2 février 2021, M. G... A... E..., représenté par Me D..., demande à la cour de rejeter la requête du préfet et, en outre de mettre à la charge de l'État le paiement de la somme de 2 000 euros à verser à son conseil en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que les moyens soulevés par le préfet ne sont pas fondés.
M. A... E... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 18 février 2021.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020, et notamment son article 5 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. C... B... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... E..., ressortissant guinéen né le 25 février 2001, est entré en France, selon ses déclarations, au cours du mois de mai 2017. Il a bénéficié d'une prise en charge par les services de l'aide sociale à l'enfance qui a pris fin par une décision du 25 août 2017. Le 13 mai 2019, M. A... E... a saisi le préfet de la Vienne d'une demande de titre de séjour, en produisant de nouveaux documents destinés à justifier de son état civil. Par un arrêté du 20 mai 2020, le préfet de la Vienne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il serait reconduit à l'issue de ce délai. Le préfet relève appel du jugement du 17 novembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a annulé cet arrêté, lui a enjoint de réexaminer la situation de M. A... E... et a mis à la charge de l'État la somme de 800 euros à verser à son conseil.
2. Il ressort des pièces du dossier que le jeune A... E... a, depuis son entrée en France, été scolarisé et a, dans ce cadre, effectué des stages en milieu professionnel à l'issue desquels il a pu être inscrit au centre départemental de formation d'apprentis agricoles de Niort et signer avec une entreprise spécialisée en horticulture un contrat d'apprentissage d'une durée de deux ans pour la période allant du 16 juillet 2018 au 15 juillet 2020 en vue de l'obtention du brevet d'études professionnelles agricoles. L'excellente appréciation portée sur son travail au sein de l'entreprise a conduit son employeur à préciser qu'il poursuivrait l'accompagnement de ce jeune dans le cadre d'une poursuite d'études et, à défaut, le recruterait en qualité d'ouvrier agricole dans un métier reconnu par les services chargés du travail et de l'emploi comme présentant des difficultés de recrutement. Dans ces conditions, et alors que M. A... E... a également démontré sa volonté d'intégration par sa participation à des actions bénévoles, le préfet a, en refusant de lui délivrer un titre de séjour lui permettant notamment de poursuivre son apprentissage professionnel, entaché sa décision d'une erreur manifeste dans son appréciation de ses conséquences sur la vie personnelle de M. A... E... alors même que ce dernier est entré irrégulièrement en France et qu'il n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine.
3. Il résulte de ce qui précède que le préfet de la Vienne n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a annulé son arrêté du 20 mai 2020, portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixation du pays de renvoi.
4. M. A... E... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par suite, son avocate peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me D..., avocate de M. A... E... renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de l'État le versement à Me D... de la somme de 1 000 euros.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête est rejetée.
Article 2 : L'État versera à Me D... une somme de 1 000 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette dernière renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État au titre de l'aide juridictionnelle.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, à M. G... A... E... et à Me D....
Copie en sera transmise, pour information, au préfet de la Vienne.
Délibéré après l'audience du 4 mars 2021 à laquelle siégeaient :
Mme Marianne Hardy, présidente,
M. C... B..., président-assesseur,
Mme F..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er avril 2021.
La présidente,
Marianne Hardy
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 20BX04116