Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 24 août 2020, Mme B..., représentée par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 8 octobre 2019 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 30 août 2018 du préfet de la Gironde ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Gironde, à titre principal, de lui accorder le bénéfice du regroupement familial au bénéfice de son époux et de délivrer à ce dernier un titre de séjour ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son avocat d'une somme de 1 800 euros sur le fondement des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'arrêté attaqué est insuffisamment motivé en fait ;
- cette insuffisance de motivation révèle un défaut d'examen particulier de sa situation personnelle ;
- le préfet s'est cru à tort lié par le fait que son époux résidait en France en situation irrégulière pour lui refuser le bénéfice du regroupement familial et n'a dès lors pas exercé son pouvoir d'appréciation ;
- le préfet a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense enregistré le 14 décembre 2020, le préfet de la Gironde conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par Mme B... ne sont pas fondés.
Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 20 février 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020, et notamment son article 5 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme D... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme C... épouse B..., ressortissante algérienne, est entrée en France le 27 mars 2016. Elle est titulaire d'une carte de résidence temporaire en raison de son état de santé, régulièrement renouvelée, dont la dernière est valable jusqu'au 18 août 2021. Le 23 juillet 2018, elle a déposé une demande de regroupement familial en faveur de son époux. Par un arrêté du 30 août 2018, le préfet de la Gironde a rejeté sa demande. Mme B... relève appel du jugement du 8 octobre 2019 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. L'arrêté attaqué vise les conventions internationales et les dispositions légales dont il est fait application, notamment l'article 4 de l'accord-franco algérien relatif aux demandes de regroupement familial, comporte les éléments de faits relatifs à la situation de M. B... et expose les raisons pour lesquelles le préfet lui a refusé le bénéfice du regroupement familial. Ces indications, qui ont permis à Mme B... de comprendre et de contester la mesure prise à son encontre, étaient suffisantes, alors même que l'arrêté ne mentionne pas les éléments relatifs à sa situation médicale. Le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit, dès lors, être écarté.
3. Ni la motivation de la décision attaquée ni aucune autre pièce du dossier ne permettent de considérer que le préfet n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de Mme B.... Par suite, le moyen doit être écarté.
4. Aux termes de l'article 4 de l'accord franco-algérien : " (...) Peut être exclu de regroupement familial : (...) 2 - Un membre de la famille séjournant à un autre titre ou irrégulièrement sur le territoire français ". Lorsqu'il se prononce sur une demande de regroupement familial, le préfet est en droit de rejeter la demande dans le cas où l'intéressé ne justifierait pas remplir l'une ou l'autre des conditions légalement requises notamment, comme en l'espèce, en cas de présence anticipée sur le territoire français du membre de la famille bénéficiaire de la demande. Il dispose toutefois d'un pouvoir d'appréciation et n'est pas tenu par les dispositions précitées, notamment dans le cas où il est porté une atteinte excessive au droit de mener une vie familiale normale tel qu'il est protégé par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
5. Contrairement à ce que soutient Mme B..., il ne ressort pas des termes de la décision en litige que le préfet se serait cru lié par la présence anticipée sur le territoire français de son époux pour rejeter sa demande de regroupement familial dès lors qu'il s'est notamment livré à un examen de la situation de son époux au regard des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en retenant notamment la durée du mariage et l'existence d'attaches familiales dans son pays d'origine. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit doit être écarté.
6. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
7. Il ressort des pièces du dossier que Mme B..., titulaire d'une carte de résident valable jusqu'au 18 août 2021, s'est mariée le 30 septembre 2017 avec un compatriote sur le territoire français. Si Mme B... soutient que la présence de son époux à ses côtés est nécessaire en raison de son état de santé, il ne ressort pas des pièces du dossier, notamment des certificats médicaux rédigés en des termes généraux sur ce point, que l'intéressée nécessite l'assistance d'une tierce personne, alors au demeurant qu'elle voyage régulièrement vers l'Algérie. En outre, ainsi que l'a relevé le préfet, le mariage entre les époux était très récent à la date de l'arrêté attaqué et M. B... n'est pas dépourvu d'attaches dans son pays d'origine où résident ses parents et une partie de sa fratrie. Par ailleurs, les seules circonstances que M. B... est titulaire d'une promesse d'embauche, en contrat à durée indéterminée, datée du 1er octobre 2019, donc postérieure à l'arrêté contesté, et qu'il participe à des cours de français ne sont pas de nature à caractériser l'existence de liens particuliers, anciens et durables en France. Enfin, la décision portant refus de regroupement familial n'implique qu'une séparation temporaire du couple pour la durée nécessaire à l'instruction d'une demande régulière de regroupement familial. Par suite, eu égard à la présence, de surcroît irrégulière, de M. B... sur le territoire français au moment de la demande de regroupement familial et en l'absence de circonstances particulières justifiant qu'il soit dérogé à la procédure de droit commun du regroupement familial, le préfet de la Gironde n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en rejetant la demande présentée par Mme B.... Pour les mêmes motifs, le préfet de la Gironde n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle et familiale de Mme B....
8. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité de la requête, que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... épouse B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera transmise au préfet de la Gironde.
Délibéré après l'audience du 29 avril 2021 à laquelle siégeaient :
Mme Marianne Hardy, présidente,
M. Didier Salvi, président-assesseur,
Mme D..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe de la juridiction le 31 mai 2021.
La présidente,
Marianne Hardy
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N° 20BX02830 2