Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 9 mai 2018, M.B..., représenté par MeC..., demande à la cour :
1°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;
2°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 23 mars 2018 ;
3°) d'annuler l'arrêté du 30 janvier 2018 ;
4°) d'enjoindre au préfet de l'Ariège de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa demande et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision portant refus d'admission au séjour et la mesure d'éloignement sont insuffisamment motivées et entachées d'un défaut d'examen particulier de sa situation ;
- la décision fixant le pays de renvoi est entachée d'un défaut de motivation en fait en raison notamment de l'absence totale d'indication des risques encourus en cas de retour dans son pays d'origine ;
- la décision portant refus d'admission au séjour méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- cette décision est également entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- il justifie de circonstances humanitaires exceptionnelles constituées par l'impossibilité pour lui et sa famille de mener une vie familiale normale en Albanie en raison des discriminations incessantes dont ils ont fait l'objet ;
- cette décision méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
- la mesure d'éloignement est privée de base légale en raison de l'illégalité de la décision portant refus d'admission au séjour ;
- la décision fixant le pays de renvoi méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'il éprouve de réelles craintes et menaces en cas de retour en Albanie ;
- le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation et des risques qu'il invoque.
Par un mémoire en défense, enregistré le 3 juillet 2018, le préfet de l'Ariège conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. B...ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 14 juin 2018, la clôture d'instruction a été fixée au 13 août 2018 à 12h00.
M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 28 juin 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale des droits de l'enfant ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Par décision du 1er septembre 2018, le président de la cour a désigné Mme Déborah de Paz pour exercer temporairement les fonctions de rapporteur public en application des articles R. 222-24 et R. 222-32 du code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Le rapport de Mme Marianne Pouget a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M.B..., de nationalité albanaise, déclare être entré en France le 24 juillet 2015 avec son épouse et leurs enfants. Le 1er septembre 2015, il a sollicité son admission au séjour au titre de l'asile. Le directeur de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides a rejeté sa demande le 31 mars 2016. La Cour nationale du droit d'asile a confirmé ce rejet le 23 septembre 2016. Par un arrêté du 30 janvier 2018, le préfet de l'Ariège a refusé son admission au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M.B... relève appel du jugement du 23 mars 2018 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la demande d'aide juridictionnelle provisoire :
2. Par une décision du 28 juin 2018, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Bordeaux a admis M. B...au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par suite, sa demande d'admission provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle est devenue sans objet.
Sur les conclusions en annulation :
3. Au soutien des moyens tirés du défaut de motivation du refus de séjour et de l'absence d'examen complet de sa situation, l'appelant ne se prévaut devant la cour d'aucun motif de droit ou de fait nouveau par rapport à l'argumentation développée devant le tribunal. Par suite, il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs pertinemment retenus par le premier juge.
4. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". L'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale, garanti par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.
5. Si l'appelant se prévaut de la présence en France de son épouse et de leurs enfants, il n'établit pas, nonobstant son bénévolat au profit des Restaurants du coeur, la scolarisation de son fils Fabio et le bénévolat de son fils aîné au sein du Secours populaire, avoir développé des liens d'une intensité particulière sur le territoire national hors de cette cellule familiale. L'intéressé n'a été admis au séjour que le temps nécessaire à l'examen de sa demande d'asile. Son épouse et leur fils aîné, dont les demandes d'asile ont été rejetées, font également l'objet de mesures d'éloignement et n'ont donc pas vocation à rester sur le territoire français. Le requérant n'établit ni même n'allègue être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, où la cellule familiale pourra se reconstituer. Enfin, si M. B...fait état des discriminations dont lui et sa famille sont susceptibles d'être victimes en Albanie en tant que membres de la communauté Rom, s'agissant notamment de la scolarisation des enfants mineurs, il n'établit pas davantage ne pouvoir y mener une vie privée et familiale normale. Dans ces conditions, la décision portant refus d'admission au séjour n'a pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale de l'intéressé une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et ne peut donc être regardée comme méconnaissant les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en ne régularisant pas la situation de l'intéressé.
6. Au soutien du moyen tiré de la méconnaissance du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, l'appelant ne se prévaut devant la cour d'aucun motif de droit ou de fait nouveau par rapport à l'argumentation développée devant le tribunal. Par suite, et compte tenu de ce qui a été exposé au point 4, il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinemment retenus par le premier juge.
7. Dès lors que les moyens de la requête dirigés contre le refus d'admission au séjour de M. B...sont écartés, le moyen tiré de ce que la mesure d'éloignement contestée est dépourvue de base légale ne peut que l'être également.
8. Au soutien du moyen tiré du défaut de motivation en fait de la décision fixant le pays de renvoi, M. B...ne se prévaut devant la cour d'aucun motif de droit ou de fait nouveau par rapport à l'argumentation développée devant le tribunal. Par suite, il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinemment retenus par les premiers juges.
9. Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. ". Aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui est obligé de quitter le territoire français ou qui doit être reconduit à la frontière est éloigné : 1º A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Commission des recours des réfugiés lui a reconnu le statut de réfugié ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; 2º Ou à destination du pays qui lui a délivré un document de voyage en cours de validité ; 3º Ou à destination d'un autre pays dans lequel il est légalement admissible. / Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ".
10. Si M. B...soutient qu'il risque de subir des traitements inhumains et dégradants en Albanie, il ne l'établit pas en se bornant à faire référence à des rapports d'ordre général relatant les discriminations dont sont victimes les Roms en Albanie et à invoquer, sans en justifier, un différent qui l'opposerait à un voisin violent. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut être accueilli. Pour les mêmes motifs, cette décision ne peut être regardée comme entachée à cet égard d'une erreur d'appréciation de sa situation personnelle.
11. Contrairement à ce que soutient le requérant, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de l'Ariège n'aurait pas procédé à un examen complet des risques allégués.
12. Il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 janvier 2018. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction sous astreinte ainsi que celles tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la demande d'admission provisoire à l'aide juridictionnelle présentée par M.B....
Article 2 : Le surplus de la requête de M. B...est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B..., au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Ariège.
Délibéré après l'audience du 26 octobre 2018 à laquelle siégeaient :
Mme Marianne Pouget, président-rapporteur,
M. Paul-André Braud, premier-conseiller,
MmeSabrina Ladoire, premier-conseiller.
Lu en audience publique, le 22 novembre 2018.
Le premier-conseiller,
Paul-André BraudLe président-rapporteur,
Marianne Pouget
Le greffier,
Florence Faure
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N°18BX01846