Procédure devant la cour :
Par une requête et deux mémoires, enregistrés le 4 janvier 2016, le 22 février 2017 et le 9 mars 2018, M. A...E..., représenté par MeC..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 5 novembre 2015 ;
2°) d'annuler la délibération en date du 23 décembre 2013 approuvant le plan local d'urbanisme de la commune de Tauriac ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Tauriac la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- contrairement à ce qu'a estimé le tribunal administratif, la commune ne justifie pas du respect des articles L.2121-10 et L.2121-13 du code général des collectivités territoriales, les attestations produites ne satisfaisant pas aux prescriptions de l'article 202 du code de procédure civile et étant trop générales. La lettre de convocation, dépourvue de toute clarté, n'a été adressée qu'au maire ;
- le vote arrêtant le projet de plan local d'urbanisme n'est pas régulier, M. B...étant intéressé au vote et la délibération ne mentionnant pas qu'il n'aurait pas participé au vote. En sa qualité de premier adjoint et de membre de la commission urbanisme, sa participation au vote a nécessairement exercé une influence sur le sens de la délibération ;
- l'enquête publique est irrégulière, le public n'a pas été informé, par la seule publication dans le bulletin municipal, de la tenue de la réunion publique de présentation du projet du plan local d'urbanisme qui s'est déroulée le 10 septembre 2013. Les informations relatives aux dates et horaires de la réunion du 25 septembre 2013 sont erronées et les formalités de publication de l'avis d'enquête publique prévues aux articles L.123-10 et R.123-11 du code de l'urbanisme et du code de l'environnement n'ont pas été respectées, notamment en ce qui concerne le délai et la publicité par voie d'affichage ;
- la procédure de concertation est insuffisante au regard des dispositions de l'article L.300-2 du code de l'urbanisme, aucune démonstration de l'enregistrement et de la conservation des observations n'est apportée, aucun débat n'est intervenu sur le projet de rapport de présentation qui n'a pas été transmis préalablement au public et les modalités de concertation n'ont pas été déterminées ;
- la commune de Tauriac a commis une erreur manifeste d'appréciation en classant les parcelles appartenant à M. E...en zone Aa, considérée comme un site à dominante agricole, alors que ces parcelles ne sont pas à usage agricole mais à usage de jardin de son habitation, qu'elles étaient auparavant classées en zone constructible AU, qu'elles font partie d'une unité foncière homogène située dans la continuité urbaine du bourg et que le rapport de présentation préconise la densification de l'habitat dans les pôles urbains ;
- la commune a commis un détournement de pouvoir en classant en zone urbaine des parcelles appartenant au premier adjoint alors que ces parcelles ont une vocation agricole et étaient auparavant classées en zone non constructible, et que ce classement n'est pas conforme au projet d'aménagement et de développement durable, qui entend préserver les terres agricoles, ni aux articles R. 123-5 et R. 123-7 du code de l'urbanisme.
Par un mémoire en défense et un bordereau de production de pièces, enregistrés le 10 mai 2016 et le 7 février 2018, la commune de Tauriac prise en la personne de son maire, représentée par MeD..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. E...la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- il ressort des pièces produites que la procédure de convocation du conseil municipal prévue par l'article L. 2121-10 du code général des collectivités territoriales a été respectée pour la séance du 23 décembre 2013 ;
- la participation de M. B...à la délibération au cours de laquelle le conseil municipal modifie le classement de ses parcelles n'entraîne pas l'illégalité de la délibération, ce conseiller municipal n'ayant pas été en mesure d'exercer une influence effective sur la délibération litigieuse ; dès lors, le moyen tiré du non respect de l'article L.2131-11 du code général des collectivités territoriales doit être écarté ;
- le rapport d'enquête publique atteste du respect de l'article L.123-10 du code de l'urbanisme s'agissant des formalités requises afin d'assurer l'information du public ;
- le requérant ne peut utilement contester les modalités de concertation prévues, la concertation a été régulière et les administrés n'ont été d'aucune manière privés d'une garantie à laquelle ils avaient droit, dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L.300-2 du code de l'urbanisme doit être écarté ;
- le rapport de présentation explique les choix retenus par la commune, de telle sorte que ces choix ont été rendus accessibles au public ;
- le plan local d'urbanisme a tenu compte du caractère agricole de la commune, du contexte législatif et des objectifs du projet d'aménagement et de développement durable tendant à limiter l'étalement urbain et la consommation des espaces agricoles et naturels, les parcelles de M. E...sont situées dans un secteur à dominante viticole et éloigné du bourg, et sont bordées sur trois côtés par des terrains agricoles ; dès lors, la commune n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation ;
- il n'est pas établi que la délibération litigieuse serait entachée d'un détournement de pouvoir.
Par ordonnance du 8 février 2018, la clôture de l'instruction a été fixée en dernier lieu au 9 mars 2018 à 12h00.
Un mémoire présenté pour la commune de Tauriac a été enregistré le 21 mars 2018, postérieurement à la clôture de l'instruction.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de l'environnement ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique du 29 mars 2018 :
- le rapport de Mme Catherine Girault ;
- les conclusions de M. Nicolas Normand, rapporteur public ;
- et les observations de MeC..., représentant M.E....
Considérant ce qui suit :
1. Par délibération du 11 décembre 2012, le conseil municipal de Tauriac a arrêté son projet de plan local d'urbanisme, et ce projet a été soumis pour avis aux personnes publiques associées. L'enquête publique s'est déroulée du 26 août au 25 septembre 2013. Puis, par délibération du 23 décembre 2013, le conseil municipal a approuvé le plan local d'urbanisme. Ce plan modifiant le classement des parcelles n° 120, 121 et 122, auparavant classées en zone U et désormais classées en zone Aa, leur propriétaire, M. E...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la délibération du 23 décembre 2013 du conseil municipal de Tauriac. M. E...relève appel du jugement du 5 novembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.
Sur la légalité de la délibération du 23 décembre 2013 :
En ce qui concerne la légalité externe :
S'agissant de la concertation :
2. Aux termes du I de l'article L. 300-2 du code de l'urbanisme dans sa rédaction en vigueur à la date de la délibération prescrivant l'élaboration du plan local d'urbanisme : " I - Le conseil municipal ou l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale délibère sur les objectifs poursuivis et sur les modalités d'une concertation associant, pendant toute la durée de l'élaboration du projet, les habitants, les associations locales et les autres personnes concernées dont les représentants de la profession agricole, avant : / a) Toute élaboration ou révision du schéma de cohérence territoriale ou du plan local d'urbanisme (...) ". Il est toutefois spécifié, au cinquième alinéa de cet article, que ces documents d'urbanisme " ne sont pas illégaux du seul fait des vices susceptibles d'entacher la concertation, dès lors que les modalités définies par la délibération prévue au premier alinéa ont été respectées ". Il résulte de ces dispositions que la légalité d'une délibération approuvant un plan local d'urbanisme ne saurait être contestée au regard des modalités de la procédure de concertation qui l'a précédée dès lors que celles-ci ont respecté les modalités définies par la délibération prescrivant l'élaboration de ce document d'urbanisme. Ainsi, le requérant ne saurait utilement soutenir, à l'encontre de la délibération approuvant le plan local d'urbanisme, que les modalités de la concertation qui a précédé cette délibération méconnaissaient les dispositions de l'article L. 300-2 du code de l'urbanisme.
3. Il ressort des pièces du dossier, et notamment de la délibération du conseil municipal de Tauriac du 11 décembre 2012, que par une délibération du 5 septembre 2001, ce conseil a prescrit l'élaboration du plan local d'urbanisme et a fixé les modalités de la concertation, prévoyant l'organisation d'une réunion publique, l'information du public par voie de presse et par le bulletin municipal, la tenue d'un registre et enfin, l'organisation de permanences assurées par les élus. Si ce projet a été abandonné le 6 mai 2009 au terme de l'enquête publique, le conseil municipal a décidé de reprendre le projet par une délibération du 29 juin 2009. Si M. E... soutient que ces modalités n'auraient pas été respectées, il ressort de la délibération du 11 décembre 2012 dressant notamment le bilan de la concertation en énonçant les mesures entreprises, que l'ensemble de ces modalités ont été respectées. Or ces mentions font foi jusqu'à preuve du contraire, qui n'est pas apportée en l'espèce par M.E.... Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 300-2 du code de l'urbanisme doit être écarté.
En ce qui concerne la procédure d'enquête publique :
4. Aux termes de l'article L. 123-10 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction alors en vigueur : " Le projet de plan local d'urbanisme est soumis à enquête publique réalisée conformément au chapitre III du titre II du livre Ier du code de l'environnement par le président de l'établissement public de coopération intercommunale ou, dans le cas prévu par le deuxième alinéa de l'article L. 123-6, le maire (...) ". Aux termes de l'article R. 123-11 du code de l'environnement dans sa rédaction alors en vigueur : " I. - Un avis portant les indications mentionnées à l'article R. 123-9 à la connaissance du public est publié en caractères apparents quinze jours au moins avant le début de l'enquête et rappelé dans les huit premiers jours de celle-ci dans deux journaux régionaux ou locaux diffusés dans le ou les départements concernés (...) / II.-L'autorité compétente pour ouvrir et organiser l'enquête désigne les lieux où cet avis doit être publié par voie d'affiches (...) / III. - En outre, dans les mêmes conditions de délai et de durée, et sauf impossibilité matérielle justifiée, le responsable du projet procède à l'affichage du même avis sur les lieux prévus pour la réalisation du projet. Ces affiches doivent être visibles et lisibles de la ou, s'il y a lieu, des voies publiques. (...) ". Aux termes de l'article R. 123-9 du même code dans sa rédaction alors en vigueur : " L'autorité compétente pour ouvrir et organiser l'enquête précise par arrêté, quinze jours au moins avant l'ouverture de l'enquête et après concertation avec le commissaire enquêteur ou le président de la commission d'enquête : / 1° L'objet de l'enquête, notamment les caractéristiques principales du projet, plan ou programme, la date à laquelle celle-ci sera ouverte et sa durée ; / 2° La ou les décisions pouvant être adoptée (s) au terme de l'enquête et les autorités compétentes pour prendre la décision d'autorisation ou d'approbation ; / 3° Le nom et les qualités du commissaire enquêteur ou des membres de la commission d'enquête, et de leurs suppléants ; / 4° Les lieux, ainsi que les jours et heures où le public pourra consulter le dossier d'enquête et présenter ses observations sur le registre ouvert à cet effet ; en cas de pluralité de lieux d'enquête, l'arrêté désigne parmi eux le siège de l'enquête, où toute correspondance relative à l'enquête peut être adressée au commissaire enquêteur ou à la commission d'enquête ; / 5° Les lieux, jours et heures où le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête, représentée par un ou plusieurs de ses membres, se tiendra à la disposition du public pour recevoir ses observations ; / 6° Le cas échéant, la date et le lieu des réunions d'information et d'échange envisagées ; / 7° La durée et les lieux où, à l'issue de l'enquête, le public pourra consulter le rapport et les conclusions du commissaire enquêteur ou de la commission d'enquête (...) ". S'il appartient à l'autorité administrative de procéder à la publicité de l'ouverture de l'enquête publique dans les conditions fixées par les dispositions citées ci-dessus, la méconnaissance de ces dispositions n'est de nature à vicier la procédure et donc à entraîner l'illégalité de la décision prise à l'issue de l'enquête publique que si elle n'a pas permis une bonne information de l'ensemble des personnes intéressées par l'opération ou si elle a été de nature à exercer une influence sur les résultats de l'enquête et, par suite, sur la décision de l'autorité administrative.
5. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que, si, conformément aux dispositions citées au point précédent, l'avis annonçant l'ouverture de l'enquête publique pour le 26 août 2013 a été publié dans deux journaux régionaux " Haute Gironde " et " Sud Ouest ", la seconde publication prévue par ces dispositions, afférente au rappel de cette enquête, n'est intervenue que le 4 septembre 2013 dans " Sud Ouest " et le 6 septembre 2013 dans " Haute Gironde ", soit postérieurement à l'expiration du délai de huit jours après l'ouverture de l'enquête prévu par l'article R. 123-11 du code de l'urbanisme. Toutefois, une telle irrégularité n'a, dans les circonstances de l'espèce, dans une commune qui comptait près de mille trois cents habitants, ni fait obstacle à la bonne information de l'ensemble des personnes intéressées, ni été de nature à exercer une influence sur les résultats de l'enquête. Par ailleurs, il ressort du rapport du commissaire enquêteur que l'affichage de l'avis d'enquête publique a bien été réalisé sur les panneaux d'affichage de la mairie, de la salle des fêtes et de l'agence postale de la Lustre, trois semaines avant le début de l'enquête. Dans ces conditions, et alors que le requérant n'apporte aucun élément permettant de remettre en cause ces constats déjà relevés par les premiers juges, le moyen tiré de ce que l'avis d'enquête publique n'aurait pas fait l'objet d'une publicité suffisante doit être écarté.
6. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que la réunion du 10 septembre 2013 organisée par la commune avec le bureau d'étude et le commissaire enquêteur n'a pas fait l'objet d'une publicité dans les journaux locaux, mais seulement dans le bulletin municipal. Toutefois, le nombre de personnes ayant assisté à ladite réunion a été comparable aux autres réunions. Dès lors, cette irrégularité n'a pas été de nature à faire obstacle à la bonne information de l'ensemble des personnes intéressées ou à exercer une influence sur les résultats de l'enquête.
7. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier que dans un arrêté du 19 juillet 2013, le maire de la commune de Tauriac a fixé les permanences du commissaire enquêteur en mairie les 26 août, 14 septembre et 19 septembre 2013 de 9 heures à 12 heures et les 3 septembre et 25 septembre de 14 heures à 17 heures. La circonstance que la mairie ferme habituellement à 16h30 ne démontre pas que ces horaires n'auraient pas été respectés.
8. Enfin, il ressort des pièces du dossier que la rature concernant la date du dernier jour de permanence effectuée par le commissaire enquêteur constitue une erreur de plume sans incidence sur la régularité de la procédure d'enquête publique.
En ce qui concerne la convocation du conseil municipal :
9. Aux termes de l'article L.2121-10 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction alors en vigueur : " Toute convocation est faite par le maire. Elle indique les questions portées à l'ordre du jour. Elle est mentionnée au registre des délibérations, affichée ou publiée. Elle est adressée par écrit, sous quelque forme que ce soit, au domicile des conseillers municipaux, sauf s'ils font le choix d'une autre adresse ". Aux termes du premier alinéa de l'article L. 2121-11 du même code : "Dans les communes de moins de 3 500 habitants, la convocation est adressée trois jours francs au moins avant celui de la réunion ". Aux termes de l'article L. 2121-13 du même code : " Tout membre du conseil municipal a le droit, dans le cadre de sa fonction, d'être informé des affaires de la commune qui font l'objet d'une délibération ".
10. D'une part, il ressort des mentions de la délibération du 23 décembre 2013, qui fait foi jusqu'à preuve contraire, que les conseillers municipaux ont été dûment convoqués le 17 décembre 2013. Cette mention est au demeurant confirmée par des attestations signées par 13 des 14 conseillers municipaux en exercice, sans que le requérant puisse utilement soutenir que le maire n'a pas ajouté sa propre attestation, selon lesquelles ils ont reçu, durant l'ensemble de leur mandat, par écrit et à leur domicile, trois jours francs au moins avant la réunion du conseil municipal, une convocation mentionnant les questions portées à l'ordre du jour. En l'absence de tout élément contredisant la délibération sur ce point, les moyens tirés de la méconnaissance des articles L. 2121-10 et L. 2121-11 du code général des collectivités territoriales doivent être écartés.
11. D'autre part, la convocation à la délibération du 23 décembre 2013 précise en deuxième point que le conseil municipal sera amené à délibérer sur " l'arrêt du plan local d'urbanisme ". Cette mention doit être regardée comme suffisante pour permettre aux conseillers municipaux de connaître l'objet de la délibération qu'il leur était proposé d'adopter, dès lors que cet ordre du jour s'inscrivait dans le cadre du processus d'élaboration du plan local d'urbanisme arrivant à son terme à la suite du dépôt du rapport du commissaire-enquêteur le 8 octobre 2013. Par suite, la maladresse de formulation n'a pu créer aucune ambigüité sur l'approbation envisagée du plan local d'urbanisme, ainsi que l'ont jugé à bon droit les premiers juges.
En ce qui concerne la légalité interne :
En ce qui concerne le vote de la délibération approuvant le plan local d'urbanisme :
12. D'une part, aux termes de l'article L. 2121-17 du code général des collectivités territoriales " Le conseil municipal ne délibère valablement que lorsque la majorité de ses membres en exercice est présente. Si, après une première convocation régulièrement faite selon les dispositions des articles L. 2121-10 à L. 2121-12, ce quorum n'est pas atteint, le conseil municipal est à nouveau convoqué à trois jours au moins d'intervalle. Il délibère alors valablement sans condition de quorum. "
13. D'autre part, aux termes L. 2131-11 du code général des collectivités territoriales : " Sont illégales les délibérations auxquelles ont pris part un ou plusieurs membres du conseil intéressés à l'affaire qui en fait l'objet, soit en leur nom personnel, soit comme mandataires ". Il résulte de ces dispositions que la participation au vote permettant l'adoption d'une délibération d'un conseiller municipal intéressé à l'affaire qui fait l'objet de cette délibération, c'est-à-dire y ayant un intérêt qui ne se confond pas avec ceux de la généralité des habitants de la commune, est de nature à en entraîner l'illégalité. De même, sa participation aux travaux préparatoires et aux débats précédant l'adoption d'une telle délibération est susceptible de vicier sa légalité, alors même que cette participation préalable ne serait pas suivie d'une participation à son vote, si le conseiller municipal intéressé a été en mesure d'exercer une influence sur la délibération. Cependant, s'agissant d'une délibération déterminant des prévisions et règles d'urbanisme applicables dans l'ensemble d'une commune, la circonstance qu'un conseiller municipal intéressé au classement d'une parcelle ait participé aux travaux préparatoires et aux débats précédant son adoption ou à son vote n'est de nature à entraîner son illégalité que s'il ressort des pièces du dossier que, du fait de l'influence que ce conseiller a exercée, la délibération prend en compte son intérêt personnel.
14. M. E...soutient que M.B..., adjoint au maire chargé de l'urbanisme qui a assisté à la séance du conseil municipal du 23 décembre 2013 et participé au vote de la délibération du même jour, était intéressé à l'approbation du document d'urbanisme, dès lors que les quatre parcelles lui appartenant ont été classées en zone constructible du plan local d'urbanisme, ce qui a eu pour effet de valoriser l'ensemble de son patrimoine. Il ressort des pièces du dossier que la délibération du 23 décembre 2013 a été adoptée par l'ensemble des 8 conseillers municipaux présents sur les 14 conseillers municipaux en exercice. Ainsi, la participation de M. B...a eu une incidence puisque sa présence a permis d'atteindre le quorum requis par l'article L. 2121-17 précité pour que le conseil municipal puisse délibérer valablement. Cependant, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'adjoint au maire ait influencé le conseil municipal. En effet, si les parcelles de M.B..., préalablement classées en zone NC, ont été classées en zone U, elles sont pour l'essentiel regroupées au lieu-dit Meine-Bernard, lequel constitue avec le centre bourg l'un des pôles urbains existants. Or il ressort des pièces du dossier que ce classement a été réalisé de la même façon que celui des autres parcelles situées dans le même secteur de la commune, dans le cadre d'un parti d'urbanisme destiné à promouvoir un projet d'ensemble pour le bourg et les centres urbains secondaires incluant, en particulier, le développement maîtrisé du secteur de Meine-Bernard. Ainsi, la qualité de propriétaire sur le territoire communal n'a pas conféré à l'adjoint au maire chargé de l'urbanisme un intérêt personnel distinct de celui des autres habitants de la commune et de nature à le faire regarder comme personnellement intéressé à la délibération litigieuse portant approbation du plan local d'urbanisme. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'adjoint au maire ait influencé le conseil municipal dans un sens défavorable au classement de la propriété du requérant, alors au demeurant que le plan local d'urbanisme a été adopté à l'unanimité. Par suite, le moyen tiré de ce que la délibération contestée serait intervenue à l'issue d'une procédure irrégulière, au motif d'une méconnaissance de l'article L.2131-11 du code général des collectivités territoriales, peut être écarté.
En ce qui concerne le détournement de pouvoir :
15. Revêt le caractère d'un détournement de pouvoir ou de procédure le fait pour une autorité administrative de prendre un acte, même dans un intérêt public, mais qui n'est pas celui pour lequel les pouvoirs en cause ont été conférés à cette autorité. Le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi.
En ce qui concerne le classement des parcelles de M. E...:
16. Aux termes de l'article R. 123-7 du code de l'urbanisme alors en vigueur : " Les zones agricoles sont dites "zones A". Peuvent être classés en zone agricole les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles." Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. S'ils ne sont pas liés, pour déterminer l'affectation future des différents secteurs, par les modalités existantes d'utilisation des sols, dont ils peuvent prévoir la modification dans l'intérêt de l'urbanisme, leur appréciation peut cependant être censurée par le juge administratif au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.
17. Il ressort des pièces du dossier que M. E...est propriétaire des parcelles n° 119 à 123. Le plan local d'urbanisme contesté classe les parcelles n° 119 à 122 en zone Aa et la parcelle n° 123 en zone AU. M. E...soutient que le classement des parcelles n° 119 à 122 est entaché d'erreur manifeste d'appréciation. Il ressort des pièces du dossier que ces parcelles ne font pas l'objet d'une exploitation agricole. En outre, si les parcelles en cause sont bordées au nord, à l'est et à l'ouest par une vaste zone agricole plantée de vignes, elles jouxtent sur le côté sud la parcelle n° 123 et ne sont éloignées que d'une distance de 100 mètres du centre du hameau de Meine-Bernard. En outre, la seule circonstance que ces parcelles soient situées dans des périmètres d'appellations d'origine contrôlées ne permet nullement d'établir leur potentiel agronomique, biologique ou économique. Dès lors, eu égard à leur emplacement à proximité d'une maison d'habitation, à l'absence de potentiel particulier au sens de l'article R. 123-7 du code de l'urbanisme, et alors que les parcelles appartenant à M. B...de l'autre côté du même hameau, autour du siège d'une exploitation agricole, sont classées en zone U, le classement des parcelles n° 119 à 122 est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.
18. Il résulte de tout ce qui précède que M. E...est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande d'annulation de la délibération du 23 décembre 2013 approuvant le plan local d'urbanisme de Tauriac en tant que les parcelles n° 119 à 122 ont été classées en zone Aa.
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
19. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M.E..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par la commune de Tauriac au titre de leur application. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées à ce titre par M.E....
DECIDE :
Article 1er : La délibération du 23 décembre 2013 du conseil municipal de Tauriac approuvant le plan local d'urbanisme est annulée en tant que les parcelles n° 119 à 122 sont classées en zone Aa.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Bordeaux en date du 5 novembre 2015 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Tauriac et à M. A...E....
Délibéré après l'audience du 29 mars 2018 à laquelle siégeaient :
Mme Catherine Girault, président,
M. Jean-Claude Pauziès, président-assesseur,
M. Paul-André Braud, premier-conseiller.
Lu en audience publique, le 15 mai 2018.
Le rapporteur,
Paul-André BRAUD
Le président,
Catherine GIRAULT
Le greffier,
Virginie MARTY
La République mande et ordonne au préfet de la Gironde en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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No 16BX00008