Par une requête, enregistrée le 26 décembre 2019, M. F..., représenté par Me I..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1902949 du tribunal administratif de Toulouse du 10 juillet 2019 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 6 mai 2019 par lequel le préfet de la Haute-Garonne lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne, à titre principal, de l'admettre au séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros à verser à son conseil au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 " ainsi que les entiers dépens ".
Il soutient que :
- le premier juge n'a pas suffisamment répondu au moyen tiré du défaut de motivation en fait de l'arrêté attaqué ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'un défaut de motivation ;
- elle est entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation, eu égard notamment à la poursuite de ses études sur le territoire français ;
- elle méconnaît l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que le préfet s'est estimé à tort lié par les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de la Cour nationale du droit d'asile ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle eu égard notamment aux risques qu'il encourt en cas de retour dans son pays d'origine ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation à cet égard ;
- la décision fixant le pays de renvoi est entachée d'un défaut de motivation en fait ;
- elle est dépourvue de base légale compte tenu de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
- elle est contraire à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et à l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile compte tenu des risques auxquels il serait exposé en cas de retour dans son pays d'origine, dès lors que son père a été victime de racket de la part du groupe lié à Al Qaida dénommé TTP Pakistan (les Talibans du Pakistan), qui aurait incendié son commerce.
Par un mémoire en défense, enregistré le 26 juin 2020, le préfet de la Haute-Garonne conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. F... ne sont pas fondés.
M. F... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 28 novembre 2019.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme D... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. F..., ressortissant pakistanais, est entré sur le territoire français le 4 février 2017 accompagné de ses parents, de ses frères et de sa soeur. Leurs demandes d'asile ont été rejetées par des décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 30 octobre 2017 confirmées par la Cour nationale du droit d'asile le 17 mai 2018. Par un arrêté du 6 mai 2019, le préfet de la Haute-Garonne lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé un pays de renvoi. M. F... relève appel du jugement du 10 juillet 2019 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la régularité du jugement :
2. Il ressort des termes du jugement attaqué que le premier juge a suffisamment répondu au moyen tiré du défaut de motivation en fait de la décision portant obligation de quitter le territoire français. A supposer que M. F... ait entendu soulever un moyen tiré de l'irrégularité du jugement attaqué à cet égard, il ne peut qu'être écarté.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
3. La décision attaquée vise notamment l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions applicables du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et mentionne que le requérant est célibataire, qu'il ne dispose pas de liens personnels et familiaux en France anciens, intenses et stables, qu'il n'est pas porté à sa situation personnelle et familiale une atteinte disproportionnée et qu'il n'existe pas d'obstacle à ce qu'il quitte le territoire français. Cette décision est, par suite, suffisamment motivée ainsi que l'a retenu à bon droit le magistrat désigné du tribunal administratif de Toulouse.
4. Cette motivation, quand bien même elle ne précise pas que l'intéressé poursuit des études sur le territoire français, révèle qu'il a été procédé à un examen particulier de la situation du requérant.
5. Le requérant reprend en appel le moyen qu'il avait invoqué en première instance tiré de ce que la décision d'éloignement dont il fait l'objet méconnaît l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que le préfet s'est estimé, à tort, lié par les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de la Cour nationale du droit d'asile ayant rejeté sa demande d'asile. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption du motif retenu par le magistrat désigné du tribunal administratif de Toulouse.
6. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
7. Il ressort des pièces du dossier que M. F... est entré en France au mois de février 2017 avec ses parents, ses frères et sa soeur et qu'il prépare un certificat d'aptitude professionnelle mention " électricité ". Ses parents font également l'objet d'une mesure d'éloignement et il ne se prévaut d'aucune autre attache familiale en France ni n'établit l'impossibilité de poursuivre ses études et de reconstituer sa cellule familiale ailleurs qu'en France. Compte tenu de la durée assez brève et des conditions de séjour en France du requérant, quand bien même il bénéficie de parrainages républicains, le préfet de la Haute-Garonne n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels il a pris l'arrêté attaqué. Il n'a, dès lors, pas méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni entaché la décision attaquée d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. F....
8. M. F... ne saurait utilement se prévaloir des risques qu'il encourt en cas de retour dans son pays d'origine au soutien des conclusions qu'il présente tendant à l'annulation de la décision l'obligeant à quitter le territoire français, qui n'a ni pour objet ni pour effet de le contraindre à retourner au Pakistan.
En ce qui concerne la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :
9. La décision attaquée mentionne que le requérant n'établit pas être exposé à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans le pays dont il est ressortissant. Elle est, dans ces conditions, suffisamment motivée contrairement à ce que soutient M. F....
10. Les moyens dirigés contre la décision portant obligation de quitter le territoire français ayant été précédemment écartés, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de renvoi serait dépourvue de base légale.
11. Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". Aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (...) ".
12. M. F... se borne à reprendre en appel, sans apporter d'élément nouveau ni critiquer utilement les motifs de rejet qui lui ont été opposés par le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus, à bon droit, par le premier juge.
13. Il résulte de tout ce qui précède que M. F... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Haute-Garonne du 6 mai 2019. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte ainsi que celles relatives aux dépens, au demeurant inexistants, et tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. F... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. G... F... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée pour information au préfet de la Haute-Garonne.
Délibéré après l'audience du 29 septembre 2020 à laquelle siégeaient :
Mme H... E..., présidente,
Mme A... C..., présidente-assesseure,
Mme B... D..., conseillère.
Lu en audience publique, le 3 novembre 2020.
La rapporteure,
Kolia D...
La présidente,
Catherine E...
Le greffier,
Virginie Guillout
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 19BX04899