Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 3 décembre 2020, M. C..., représenté par la SELARL T et L Avocats, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'enjoindre au préfet du Tarn de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " étudiant " dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, ou à titre subsidiaire de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le même délai ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement au profit de son conseil d'une somme de 2 000 euros au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Il soutient que :
- c'est à bon droit que le tribunal a écarté la fin de non-recevoir tirée de l'inexistence de la décision implicite contestée ;
- eu égard aux justificatifs qu'il a produits, c'est à tort que les premiers juges ont estimé qu'il ne justifiait pas de moyens d'existence suffisants.
Par un mémoire en défense enregistré le 17 février 2021, la préfète du Tarn conclut au rejet de la requête.
Elle fait valoir que :
- la requête enregistrée le 3 décembre 2020 est tardive car l'aide juridictionnelle a été accordée le 1er octobre 2020 ;
- M. C... n'a pas justifié de ressources suffisantes.
M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 1er octobre 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention franco-béninoise du 21 décembre 1992 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;
- l'arrêté du 31 décembre 2002 ;
- le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020.
La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme B... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., ressortissant béninois, est entré en France le 17 août 2015 sous couvert d'un visa de long séjour " étudiant " valant titre de séjour. Il a obtenu une licence d'administration économique et sociale en 2018 et s'est inscrit en master " banque et expertise financière " au titre de l'année 2018-2019. Par un arrêté du 4 mars 2019, le préfet du Tarn a refusé de renouveler son titre de séjour au seul motif qu'il ne justifiait pas disposer de ressources suffisantes, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Par une lettre du 10 avril 2019 notifiée le 26 avril suivant, M. C... a sollicité le réexamen de sa situation en produisant de nouvelles pièces. Il relève appel du jugement du 24 décembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande d'annulation de la décision implicite de rejet du préfet du Tarn.
2. Il résulte des dispositions de l'article 39 du décret du 19 décembre 1991 que, dans le cas où a été formée une demande d'aide juridictionnelle qui a interrompu le délai de recours contentieux contre le jugement rendu en première instance, ce délai recommence à courir à compter du jour de la réception par l'intéressé de la notification de la décision du bureau d'aide juridictionnelle ou, si elle est plus tardive, de la date à laquelle un auxiliaire de justice a été désigné, et non de la date à laquelle le demandeur à l'aide juridictionnelle ne peut plus contester la décision d'admission ou de rejet de sa demande en application du premier alinéa de l'article 56 du même décret. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que la demande d'aide juridictionnelle présentée le 14 février 2020 par M. C... a interrompu le délai de recours contentieux. Ce délai, qui a recommencé à courir deux mois après la notification de la décision d'aide juridictionnelle du 1er octobre 2020, n'était pas expiré le 3 décembre 2020, date d'introduction de la requête en appel. Par suite, la fin de non-recevoir opposée par la préfète du Tarn doit être écartée.
3. Les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives aux différents titres de séjour qui peuvent être délivrés aux étrangers et aux conditions de leur délivrance, s'appliquent ainsi que le rappelle l'article L. 111-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " sous réserve des conventions internationales ". Aux termes de l'article 9 de la convention franco-béninoise 21 décembre 1992 relative à la circulation et au séjour des personnes : " Les ressortissants de chacun des Etats contractants désireux de poursuivre des études supérieures ou d'effectuer un stage de formation de niveau supérieur sur le territoire de l'autre Etat doivent, outre le visa de long séjour prévu à l'article 4, justifier d'une attestation d'inscription ou de préinscription dans l'établissement d'enseignement choisi, ou d'une attestation d'accueil de l'établissement où s'effectue le stage, ainsi que, dans tous les cas, de moyens d'existence suffisants. Les intéressés reçoivent un titre de séjour temporaire portant la mention " étudiant ". Ce titre de séjour est renouvelé annuellement sur justification de la poursuite effective des études ou du stage et de la possession de moyens d'existence suffisants (...) " L'article R. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose : " Pour l'application du I de l'article L. 313-7, l'étranger qui demande la carte de séjour portant la mention " étudiant " doit en outre présenter les pièces suivantes : / 1° La justification qu'il dispose de moyens d'existence, correspondant au moins au montant de l'allocation d'entretien mensuelle de base versée, au titre de l'année universitaire écoulée, aux boursiers du Gouvernement français (...) ". En vertu de l'article 1er de l'arrêté du 31 décembre 2002 modifiant et complétant l'arrêté du 27 décembre 1983 fixant le régime des bourses accordées aux étrangers boursiers du Gouvernement français : " Le montant de l'allocation d'entretien prévue à l'article 3 de l'arrêté du 27 décembre 1983 susvisé est fixé à 615 euros par mois ". Pour l'application de ces dispositions et stipulations, il appartient à l'administration saisie d'une demande de renouvellement d'une carte de séjour présentée par un étranger en qualité d'étudiant de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, à partir de l'ensemble du dossier, si les études poursuivies par l'intéressé revêtent un caractère réel et sérieux et s'il dispose des moyens d'existence suffisants lui permettant de vivre et d'étudier en France compte tenu de tous les avantages dont l'étudiant peut bénéficier par ailleurs.
4. Il ressort des pièces du dossier qu'au titre de l'année universitaire écoulée à la date de la demande de renouvellement de son titre de séjour portant la mention " étudiant ", soit au titre de l'année universitaire 2017-2018, M. C... justifiait de virements représentant, pour la période allant du 1er septembre 2017 au 31 août 2018, un montant total de 8 378,02 euros. Il disposait ainsi de moyens d'existence atteignant une moyenne mensuelle de 698,16 euros, supérieure au seuil de 615 euros fixé à l'article 1er de l'arrêté du 31 décembre 2002 précité. Par suite, M. C..., qui avait droit au renouvellement de son titre de séjour, est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande d'annulation de la décision implicite de rejet de sa demande.
5. Il y a lieu pour la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'annuler la décision implicite de rejet de la demande de M. C... du 10 avril 2019.
6. M. C..., qui a quitté le territoire français le 22 juin 2019, n'apporte aucune précision sur la poursuite éventuelle de ses études. Par suite, il y a seulement lieu d'enjoindre à la préfète du Tarn de réexaminer sa situation dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.
7. M. C... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son conseil peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros, à verser à la SELARL T et L Avocats sous réserve de son renoncement à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Toulouse n° 1902853 du 24 décembre 2019 et la décision implicite par laquelle le préfet du Tarn a rejeté la demande de M. C... du 10 avril 2019 sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint à la préfète du Tarn de réexaminer la situation de M. C... dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à la SELARL T et L Avocats une somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de son renoncement à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... C..., à la préfète du Tarn et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 6 avril 2021 à laquelle siégeaient :
Mme Brigitte Phémolant, présidente,
Mme Anne B..., présidente-assesseure,
Mme A... D..., conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 mai 2021.
La présidente,
Brigitte Phémolant
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 20BX03957