Dans la même instance, la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de la Gironde
a demandé au tribunal de condamner le CHU de Bordeaux à lui verser la somme
de 19 670,87 euros au titre de ses débours échus, et à lui rembourser ses frais futurs à mesure qu'ils seront exposés ou par le versement d'un capital de 62 797,82 euros.
Par un jugement n° 1704961 du 4 juin 2019, le tribunal a rejeté ces demandes.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 30 juillet 2019 et un mémoire enregistré le 23 juin 2020, Mme C..., représentée par la SELARL Cabinet ARCC, demande à la cour :
1°) de demander à l'expert de confirmer que l'algodystrophie est bien une conséquence de l'intervention et que l'absence de lien anatomique ne concerne que la perte de sensibilité décrite au lendemain de l'opération ;
2°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Bordeaux ;
3°) de condamner à titre principal le CHU de Bordeaux, ou à titre subsidiaire l'ONIAM, à lui verser une indemnité d'un montant total de 215 466,56 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 9 août 2017 et capitalisation ;
4°) de mettre à la charge du CHU de Bordeaux ou de l'ONIAM les frais d'expertise de 1 200 euros ainsi qu'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la réalisation d'une expertise avant dire droit n'est pas nécessaire, une simple demande de précision à l'expert étant suffisante ;
En ce qui concerne la responsabilité pour faute du CHU :
- le CHU, qui se borne à invoquer l'entretien pré-opératoire, n'a pas apporté la preuve de la délivrance d'une information sur le risque d'algodystrophie, et il ne pouvait être déduit de l'expertise, selon laquelle la perte de sensibilité et les fourmillements sont sans lien avec l'intervention, que cette absence de lien concernerait aussi l'algodystrophie, syndrome douloureux qui se déclenche sur le siège du traumatisme ; l'expert a d'ailleurs précisé que l'algodystrophie est une complication classique de ce type d'intervention ; ainsi, le défaut d'information est fautif et engage la responsabilité du CHU de Bordeaux ;
- il ressort du document d'information du CHU sur les pathologies du 5ème orteil que la prise de vitamine C permet de prévenir le risque d'algodystrophie et d'en diminuer l'incidence de 50 % ; la circonstance que ce document est postérieur à l'intervention est sans incidence sur le caractère fautif de l'absence de ce traitement, dont les effets étaient connus et avaient déjà fait l'objet d'une publication en février 2009 ; ainsi, l'absence de prescription de vitamine C engage la responsabilité pour faute du CHU de Bordeaux ;
En ce qui concerne le droit à une indemnisation au titre de la solidarité nationale :
- elle s'est plainte immédiatement après l'intervention d'une perte de sensibilité dans la jambe droite, et le médecin lui a enjoint de ne pas prendre appui sur son pied en raison des douleurs, de sorte que le lien de causalité n'est pas contestable ; l'algodystrophie, complication de l'opération du quintus varus dans 3 % des cas, a eu des conséquences anormales dès lors qu'elle ne peut plus se déplacer qu'en fauteuil roulant et qu'elle a été licenciée pour inaptitude à ses fonctions d'auxiliaire de vie ; en estimant que le préjudice ne résultait pas d'un acte médical, le tribunal a négligé l'absence de prescription de vitamine C ; ainsi, elle a droit à une indemnisation au titre de la solidarité nationale ;
En ce qui concerne les préjudices :
- le droit à indemnisation n'est pas lié au montant sollicité dans la demande préalable, mais à la période indemnisable ;
- elle sollicite les sommes de 4 972,50 euros au titre des périodes de déficit fonctionnel temporaire retenues par l'expert, de 3 144 euros au titre du préjudice esthétique permanent
de 2,5 sur 7, de 21 000 euros au titre du déficit fonctionnel permanent de 15 % et de 1 500 euros au titre du préjudice moral caractérisé par les souffrances psychiques et les troubles qui leur sont associés ;
- elle perçoit depuis le 23 juin 2017 une pension d'invalidité de 5 744,27 euros brut par an alors que son salaire annuel de base était de 11 488,54 euros ; elle est ainsi fondée à demander la somme de 177 383,06 euros au titre de l'incidence professionnelle ;
- comme l'a relevé l'expert, elle pouvait se déplacer et exercer son activité professionnelle avant l'intervention ; dès lors que sa pathologie n'imposait pas de recourir à la chirurgie, le défaut d'information imputable au CHU de Bordeaux lui a fait perdre une chance de se soustraire à l'intervention, pouvant être évaluée à 99 % ; elle sollicite en outre une somme de 5 000 euros au titre de son préjudice d'impréparation;
En ce qui concerne les frais exposés à l'occasion du litige :
- c'est à tort que les premiers juges ont mis à sa charge les frais d'expertise
de 1 200 euros, ainsi qu'une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un mémoire en défense enregistré le 7 novembre 2019, l'ONIAM, représenté par la SELARL Birot, Ravaut et Associés, conclut à titre principal au rejet de la requête et à titre subsidiaire à l'organisation d'une nouvelle expertise avant dire droit.
Il fait valoir que :
- l'expert exclut tout lien anatomique entre les séquelles présentées par Mme C... et les actes chirurgicaux, explique les raisons pour lesquelles aucune atteinte neurologique n'a eu lieu lors de la prise en charge au CHU de Bordeaux, et conclut à l'absence de lien de causalité direct, certain et exclusif entre cette prise en charge et le dommage ; le traumatisme initial lors d'un accident domestique en 2009 et son évolution associée à un état dépressif sont à l'origine du dommage ; l'expert souligne d'ailleurs qu'en l'absence d'intervention, l'intéressée aurait certainement présenté un syndrome algodystrophique ; ainsi, les conditions d'une indemnisation au titre de la solidarité nationale ne sont pas réunies ;
- à titre subsidiaire, si la cour ne s'estimait pas suffisamment éclairée, il conviendrait d'ordonner une nouvelle expertise au contradictoire de l'ensemble des parties.
Par un mémoire enregistré le 31 mars 2020, la CPAM de la Gironde, représentée
par la SELARL Bardet et Associés, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Bordeaux ;
2°) de condamner le CHU de Bordeaux à lui verser la somme de 19 670,87 euros
au titre de ses débours échus et à rembourser ses frais futurs à mesure qu'ils seront exposés ou par le versement immédiat du capital représentatif de 62 797,82 euros ;
3°) de mettre à la charge du CHU de Bordeaux les dépens ainsi que les sommes
de 1 091 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion, de 1 000 euros au titre de
l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de 13 euros au titre des droits de plaidoirie.
Elle soutient que :
- la responsabilité du CHU de Bordeaux est engagée pour manquement à son devoir d'information et pour faute médicale en l'absence de mise en place du traitement préventif permettant de prévenir et de limiter le risque de développer une algodystrophie ;
- elle est fondée à demander le remboursement par le CHU, tiers responsable
de l'accident médical, de la somme de 19 670,87 euros au titre de ses débours échus,
avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir, ainsi que le remboursement de ses frais futurs à mesure qu'ils seront exposés ou par le versement immédiat du capital représentatif de 62 797,82 euros ; l'attestation d'imputabilité de son médecin conseil établit le lien
de causalité entre ses demandes et les conséquences de l'algodystrophie.
Par un mémoire en défense enregistré le 21 avril 2020 et un mémoire enregistré le 26 mai 2020, le CHU de Bordeaux, représenté par Me Le Prado, conclut au rejet de la requête et des demandes de la CPAM de la Gironde.
Il fait valoir que :
- ainsi que l'a relevé l'expert, Mme C... a été informée des risques
de l'intervention, et il a produit le formulaire de consentement éclairé, de sorte qu'aucun manquement à l'obligation d'information ne peut lui être reproché ;
- l'expert n'a retenu aucune faute dans la prise en charge de la patiente, et la circonstance qu'un traitement préventif à base de vitamine C aurait pu être proposé ne saurait suffire à caractériser une faute ; au demeurant, l'expert, qui n'a fait aucune distinction entre l'algodystrophie et les troubles de la sensibilité, mais a tenu compte de l'ensemble des séquelles, n'a pas constaté de lien anatomique entre celles-ci et les actes chirurgicaux ;
A titre subsidiaire :
- la demande indemnitaire est irrecevable en tant qu'elle excède la somme
de 35 000 euros demandée dans la réclamation préalable ;
- les sommes sollicitées au titre du déficit fonctionnel temporaire et permanent et du préjudice esthétique sont excessives, et le préjudice moral lié aux souffrances ne se distingue pas du déficit fonctionnel permanent ;
- la somme demandée au titre de l'incidence professionnelle correspond à une perte de revenus futurs, non indemnisable en l'absence de preuve d'une incapacité définitive d'exercer tout emploi ;
- Mme C... n'établit pas en quoi l'impossibilité de se préparer à l'éventualité d'être atteinte d'une algodystrophie lui aurait causé un préjudice ;
- la CPAM de la Gironde sollicite le remboursement de frais hospitaliers, de frais de transport et d'indemnités journalières dont elle ne justifie pas qu'ils seraient en lien avec le manquement reproché ;
- dès lors que Mme C... n'a souffert d'aucun préjudice professionnel, aucune somme ne peut être allouée à la caisse au titre de la rente d'invalidité ; au demeurant,
le médecin conseil relève que cette rente n'est imputable qu'à 50 % aux complications
de la chirurgie.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code civil ;
- le code de la santé publique ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme A...,
- les conclusions de Kolia Gallier, rapporteure publique,
- et les observations de Me Rouget, représentant Mme C... et de Me Ravaut représentant l'ONIAM.
Considérant ce qui suit :
1. Mme C..., qui présentait une importante gêne au pied droit en raison
de métatarsalgies d'appui et d'un quintus varus, a subi le 14 avril 2015 au CHU de Bordeaux une intervention chirurgicale de réduction du quintus varus et d'ostéotomie des cols métatarsiens droits. Une algodystrophie a empêché la reprise de la marche avec appui sur le pied droit, ce qui a conduit le médecin du travail à constater, le 23 mars 2016, l'inaptitude définitive de l'intéressée à son emploi d'auxiliaire de vie. A la demande de Mme C..., le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux a ordonné une expertise, réalisée le 31 mars 2017, dont le rapport conclut à l'absence de faute du CHU de Bordeaux ainsi qu'à l'absence de lien entre les séquelles présentées et les soins reçus dans cet établissement, et émet l'hypothèse d'un éventuel trouble conversif. Après le rejet de sa réclamation préalable présentée devant le CHU de Bordeaux, Mme C... a saisi le tribunal administratif de Bordeaux d'une demande de condamnation du CHU de Bordeaux, ou à titre subsidiaire de l'ONIAM, à l'indemniser de ses préjudices. Elle relève appel du jugement du 4 juin 2019 par lequel le tribunal a rejeté sa demande et a mis à sa charge les frais d'expertise ainsi qu'une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
2. La conclusion de l'expert selon laquelle les séquelles présentées par Mme C... seraient sans lien avec les soins dispensés au CHU de Bordeaux est en contradiction avec les pièces du dossier médical citées dans le rapport d'expertise, faisant état d'une algodystrophie développée secondairement à l'intervention, ainsi qu'avec les observations
de l'expert lui-même, dont il ne tire aucune conséquence, selon lesquelles la symptomatologie algodystrophique a été confirmée par une scintigraphie et constitue une " complication
post-opératoire classique ". Le lien entre l'intervention du 14 avril 2015 et l'algodystrophie
est ainsi établi.
Sur les conclusions dirigées contre le CHU de Bordeaux :
En ce qui concerne le défaut d'information :
3. Aux termes de l'article L. 1111-2 du code de la santé publique : " Toute personne a le droit d'être informée sur son état de santé. Cette information porte sur les différentes investigations, traitements ou actions de prévention qui sont proposés, leur utilité, leur urgence éventuelle, leurs conséquences, les risques fréquents ou graves normalement prévisibles qu'ils comportent ainsi que sur les autres solutions possibles et sur les conséquences prévisibles en cas de refus (...) ". Il résulte de ces dispositions que doivent être portés à la connaissance du patient, préalablement au recueil de son consentement à l'accomplissement d'un acte médical, les risques connus de cet acte qui, soit présentent une fréquence statistique significative, quelle que soit leur gravité, soit revêtent le caractère de risques graves, quelle que soit leur fréquence.
4. En premier lieu, en cas de manquement à cette obligation d'information, si l'acte de diagnostic ou de soin entraîne pour le patient, y compris s'il a été réalisé conformément aux règles de l'art, un dommage en lien avec la réalisation du risque qui n'a pas été porté à sa connaissance, la faute commise en ne procédant pas à cette information engage la responsabilité de l'établissement de santé à son égard, pour sa perte de chance de se soustraire à ce risque en renonçant à l'opération. Il n'en va autrement que s'il résulte de l'instruction, compte tenu de ce qu'était l'état de santé du patient et son évolution prévisible en l'absence de réalisation de l'acte, des alternatives thérapeutiques qui pouvaient lui être proposées ainsi que de tous autres éléments de nature à révéler le choix qu'il aurait fait, qu'informé de la nature et de l'importance de ce risque, il aurait consenti à l'acte en question.
5. Selon le document d'information pour le patient sur les pathologies du 5ème orteil élaboré par le CHU de Bordeaux en octobre 2015, six mois après l'intervention subie par Mme C..., la chirurgie en cause comporte un risque d'algodystrophie inférieur à 3 %.
Un tel risque doit être regardé comme fréquent au sens de l'article L. 1111-2 du code de la santé publique. S'il est constant que lors d'une consultation du 19 janvier 2015, le chirurgien a expliqué l'intervention " sur un squelette " à la patiente, laquelle a signé le jour de l'intervention une fiche de consentement éclairé indiquant qu'elle avait reçu toute l'information souhaitée et disposé d'un temps suffisant pour réfléchir et demander conseil, ces éléments ne caractérisent pas un faisceau d'indices suffisant en faveur de l'existence d'une information sur le risque d'algodystrophie. Toutefois, Mme C... présentait une douleur continue au niveau de la face dorsale du cinquième orteil du pied droit, laquelle ne pouvait être soulagée par une orthèse et l'empêchait de porter d'autres chaussures que des tennis. Eu égard à l'importance de cette gêne, tant dans sa vie personnelle que dans l'exercice de sa profession d'auxiliaire de vie, et en l'absence d'alternative au geste chirurgical proposé, il résulte de l'instruction qu'elle n'aurait pas renoncé à l'intervention si elle avait été informée du risque d'algodystrophie.
6. En second lieu, indépendamment de la perte d'une chance de refuser l'intervention, le manquement des médecins à leur obligation d'informer le patient des risques courus ouvre pour l'intéressé, lorsque ces risques se réalisent, le droit d'obtenir réparation des troubles qu'il a subis du fait qu'il n'a pas pu se préparer à cette éventualité. S'il appartient au patient d'établir la réalité et l'ampleur des préjudices qui résultent du fait qu'il n'a pas pu prendre certaines dispositions personnelles dans l'éventualité d'un accident, la souffrance morale qu'il a endurée lorsqu'il a découvert, sans y avoir été préparé, les conséquences de l'intervention doit, quant à elle, être présumée. Il sera fait une juste appréciation du préjudice moral subi par Mme C... du fait du défaut d'information caractérisé au point précédent en fixant son indemnisation à la somme de 1 000 euros.
En ce qui concerne la faute médicale :
7. Si l'expert n'a retenu aucune " faute opératoire ", Mme C... se prévaut du document d'information du patient élaboré par le CHU de Bordeaux en octobre 2015, selon lequel la prise de vitamine C permettrait de prévenir le risque d'algodystrophie et d'en diminuer l'incidence de 50 %, et invoque une faute à raison de l'absence de prescription d'un tel traitement. Cette question n'a pas été abordée au cours de l'expertise, et nécessite un avis médical impartial.
Sur les conclusions dirigées contre l'ONIAM :
8. En se bornant à s'interroger sur l'existence d'un éventuel trouble conversif et à affirmer que " se soustraire à l'algodystrophie dans le contexte actuel était difficile ", l'expert n'a pas répondu utilement au point 5 de la mission d'expertise relatif aux conséquences d'un éventuel accident médical.
9. Il résulte de tout ce qui précède que l'état du dossier ne permet pas de statuer sur les demandes de Mme C... autres que celles relatives au défaut d'information. Par suite, il y a lieu d'ordonner une expertise aux fins et dans les conditions précisées dans le dispositif
du présent arrêt.
Sur les intérêts et leur capitalisation :
10. D'une part, lorsqu'ils sont demandés, les intérêts au taux légal sur le montant de l'indemnité allouée sont dus, quelle que soit la date de la demande préalable, à compter du jour où cette demande est parvenue à l'autorité compétente ou, en l'absence d'une telle demande préalablement à la saisine du juge, à compter du jour de cette saisine. D'autre part,
la capitalisation des intérêts peut être demandée à tout moment devant le juge du fond. Cette demande ne peut toutefois prendre effet que lorsque les intérêts sont dus au moins pour une année entière, sans qu'il soit besoin d'une nouvelle demande à l'expiration de ce délai. De même, la capitalisation s'accomplit à nouveau, le cas échéant, à chaque échéance annuelle ultérieure, sans qu'il soit besoin de formuler une nouvelle demande.
11. Mme C... a droit aux intérêts au taux légal sur la somme de 1 000 euros mentionnée au point 6 à compter à compter du 9 août 2017, date de réception de sa demande préalable par le CHU de Bordeaux. Elle a demandé la capitalisation des intérêts devant le tribunal le 17 novembre 2017, date à laquelle ils n'étaient pas dus pour une année entière. Par suite, la capitalisation doit prendre effet le 9 août 2018 et à chaque échéance annuelle à compter de cette date.
DÉCIDE :
Article 1er : Le CHU de Bordeaux est condamné à verser à Mme C... une indemnité de 1 000 euros au titre du préjudice moral d'impréparation, avec intérêts au taux légal à compter du 9 août 2017 et capitalisation au 9 août 2018 et à chaque échéance annuelle ultérieure.
Article 2 : Avant de statuer sur le surplus de la demande indemnitaire de Mme C...,
il sera procédé à une expertise médicale contradictoire par un spécialiste en chirurgie orthopédique, en présence de Mme C..., du CHU de Bordeaux, de l'ONIAM et de la CPAM de la Gironde.
Article 3 : L'expert aura pour mission :
1°) de prendre connaissance du dossier médical de Mme C... et d'examiner cette dernière ; de demander le cas échéant la réalisation des examens complémentaires
qui paraîtraient utiles à la réponse aux questions posées ;
2°) de donner son avis sur la pertinence de l'indication opératoire compte tenu de l'état antérieur du pied droit et de son évolution probable en l'absence d'intervention ;
3°) de présenter les complications temporaires et durables ayant empêché la reprise normale de la marche, en distinguant l'algodystrophie d'autres causes éventuelles dont l'origine sera explicitée, notamment un retard de consolidation, des orteils en griffe et une attitude vicieuse du pied ; de donner son avis sur la contribution de ces différents éléments aux séquelles dont Mme C... reste atteinte, en précisant s'ils sont imputables à une faute éventuelle, à un accident médical ou à l'état antérieur ;
4°) en s'appuyant sur la littérature médicale dont les références seront précisées, de présenter l'état des connaissances actuelles sur l'algodystrophie et sur les mécanismes conduisant à sa survenance dans les suites d'une intervention chirurgicale ; d'indiquer s'il existe des recommandations relatives à l'administration d'un traitement, en particulier à base de vitamine C, susceptible de prévenir l'algodystrophie ; le cas échéant, de donner son avis sur le caractère fautif de l'absence d'un tel traitement au moment des faits, dans le cas de Mme C..., ainsi que sur les conséquences d'une telle faute, et d'évaluer la perte de chance de se soustraire au dommage ;
5°) de décrire les troubles présentés par Mme C... et d'évaluer ses préjudices
en distinguant ce qui relève d'une faute éventuelle, d'un accident médical et en particulier
de l'algodystrophie, ou de l'état antérieur :
- de dire si l'état de santé de Mme C... a entraîné un déficit fonctionnel temporaire, et d'en préciser les dates de début et de fin, ainsi que le ou les taux, en distinguant la période de déficit fonctionnel imputable aux suites normales de l'intervention ;
- de dire si l'état de santé de Mme C... peut être considéré comme consolidé,
et à quelle date ; de préciser s'il subsiste un déficit fonctionnel permanent, et dans l'affirmative d'en fixer le taux ;
- de dire si l'état de santé de Mme C... a justifié ou justifie l'aide d'une tierce personne ; de fixer les modalités, la qualification et la durée de cette intervention ;
- de préciser les frais liés au handicap ;
- de donner son avis sur la répercussion de l'incapacité médicalement constatée sur la possibilité d'exercer une activité professionnelle ;
- de donner son avis sur l'existence de préjudices personnels en lien avec les séquelles (souffrances endurées, préjudice esthétique, préjudice d'agrément), et le cas échéant d'en évaluer l'importance ;
- d'apporter tous autres éléments estimés utiles à l'évaluation des préjudices
de Mme C....
Article 4 : Pour l'accomplissement de sa mission, l'expert pourra se faire remettre, en application de l'article R. 621-7-1 du code de justice administrative, tous documents utiles, et notamment tous ceux relatifs aux examens et soins pratiqués sur l'intéressée.
Article 5 : L'expert sera désigné par la présidente de la cour. Après avoir prêté serment,
il accomplira sa mission dans les conditions prévues par les articles R. 621-2 à R. 621-14 du code de justice administrative.
Article 6 : Conformément aux dispositions du premier alinéa de l'article R. 621-9 du code
de justice administrative, l'expert déposera son rapport sous forme dématérialisée dans le délai fixé par la présidente de la cour dans la décision le désignant. Il en notifiera une copie à chacune des parties intéressées. Avec l'accord de ces dernières, cette notification pourra s'opérer sous forme électronique.
Article 7 : Tous droits et moyens des parties sur lesquels il n'est pas expressément statué
par le présent arrêt sont réservés jusqu'en fin d'instance.
Article 8 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C..., au centre hospitalier universitaire de Bordeaux, à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales et à la caisse primaire d'assurance maladie de la Gironde. Copie en sera adressée à l'expert désigné en référé par le tribunal administratif de Bordeaux.
Délibéré après l'audience du 14 septembre 2021 à laquelle siégeaient :
Mme Catherine Girault, présidente,
Mme Anne Meyer, présidente-assesseure,
Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 octobre 2021.
La rapporteure,
Anne A...
La présidente,
Catherine GiraultLa greffière,
Virginie Guillout
La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 19BX03249