Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 27 mai 2019, Mme A..., représentée par Me G... demande à la cour :
1°) d'annuler l'article 2 du jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 18 février 2019 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 24 septembre 2018 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a fixé son pays d'origine comme pays de renvoi en cas d'exécution d'office de la mesure d'éloignement ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Gironde de lui délivrer un titre de séjour ou à défaut de réexaminer sa demande, dans un délai d'un mois sous astreinte de 80 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des dispositions de l'article 37 alinéa 2 de la loi relative à l'aide juridictionnelle.
Elle soutient que :
- le refus de titre de séjour, la décision portant obligation de quitter le territoire et la décision fixant le pays de renvoi sont entachés d'une insuffisance de motivation en droit et en fait ;
- l'insuffisance de motivation révèle un défaut d'examen particulier de sa situation ;
- la motivation de l'arrêté l'a privé d'un recours effectif et de contester utilement le refus de titre de séjour qui lui a été opposé ;
- il méconnaît les articles 3-1 et 16-1 de la convention internationale sur les droits de l'enfant ;
- la décision fixant le pays de renvoi méconnaît l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour et du droit d'asile ;
- le préfet s'est estimé lié par l'avis de l'OFPRA et de la CNDA.
Par un mémoire, enregistré le 30 septembre 2019, le préfet de la Gironde demande à la cour de rejeter la requête de Mme A....
Il s'en remet à son mémoire déposé en première instance.
Par une décision du 2 mai 2019, Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale
Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
-la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;
- la convention de New-York du 26 janvier 1990 relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme E... C... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A..., ressortissante turque née le 1er août 1990, est entrée en France selon ses déclarations le 6 mars 2012 avec son époux, M. D..., également de nationalité turque. Elle a sollicité le bénéfice de l'asile. Sa demande a été rejetée par le directeur de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) le 19 novembre 2013, puis par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 28 avril 2014. Elle a alors fait l'objet, le 4 août 2014, d'une décision de refus de séjour assortie d'une obligation de quitter le territoire français, devenue définitive. Le 22 mars 2017, Mme A... a présenté une nouvelle demande de titre de séjour sur le fondement des articles L. 313-11 et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 24 septembre 2018, le préfet de la Gironde lui a opposé un refus, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a fixé son pays d'origine comme pays de renvoi en cas d'exécution d'office de la mesure d'éloignement et a interdit son retour sur le territoire pendant deux ans. Par un jugement du 18 février 2019, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé la décision du 24 septembre 2018 interdisant à Mme A... le retour sur le territoire français pour une durée de deux ans et a rejeté le surplus des conclusions de sa requête. Par la présente requête, Mme A... doit être regardée comme demandant l'annulation du jugement en tant qu'elle n'a pas eu entièrement gain de cause.
Sur les conclusions en annulation :
En ce qui concerne la légalité externe
2. En premier lieu, la décision par laquelle le préfet de la Gironde a refusé la demande de délivrance d'un titre de séjour présentée par Mme A... énonce l'ensemble des considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde, notamment, s'agissant de sa demande de titre de séjour présentée sur le fondement de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sur des éléments relatifs à sa vie privée et à sa situation familiale en France et à des liens qu'elle avait conservés dans son pays d'origine et s'agissant de sa demande de titre de séjour présentée sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA), sur l'absence de circonstances humanitaires et exceptionnelles qu'elle faisait valoir, examinées au regard de sa vie privée et de sa situation familiale en France. Par suite, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que la décision refusant de l'admettre au séjour en France n'est pas suffisamment motivée au regard des exigences posées par l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration. Cette motivation révèle également qu'il a été procédé à un examen réel et sérieux de sa situation.
3. En deuxième lieu, la motivation de la décision portant obligation de quitter le territoire français se confond avec celle de la décision de refus de délivrance d'un titre de séjour dont elle découle et n'implique pas, par conséquent, une motivation distincte comme l'indique l'article L. 511-1 du CESEDA. Par suite, le moyen tiré de son insuffisante motivation ne peut qu'être écarté.
4. En troisième lieu, la décision fixant le pays de renvoi énonce les circonstances de droit et de fait qui en constituent le fondement, à savoir l'absence de preuve d'un risque de traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de renvoi de Mme A... en Turquie. Ainsi, le moyen tiré du défaut de motivation de cette décision doit être écarté. Cette motivation révèle également qu'il a été procédé à un examen réel et sérieux de sa situation.
5. En quatrième lieu, il résulte de ce qu'il a été dit aux points 2, 3 et 4, que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que l'insuffisance de motivation de l'arrêté en litige l'aurait privée de son droit au recours effectif tel que garanti par l'article 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
En ce qui concerne la légalité interne
S'agissant du moyen propre au refus de titre de séjour ;
6. En cinquième lieu, aux termes de l'article 3-1 de la Convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Aux termes de l'article 16 de la même convention : " Nul enfant ne fera l'objet d'immixtions arbitraires ou illégales dans sa vie privée, sa famille, son domicile ou sa correspondance, ni d'atteintes illégales à son honneur et à sa réputation ".
7. Il ressort des pièces du dossier que le fils de Mme A..., âgé de cinq ans à la date de l'arrêté litigieux, est inscrit en grande section de maternelle et que son autre fils, âgé de deux ans, n'était pas scolarisé. Dans ces conditions, la scolarité de ses enfants ne s'oppose pas à ce qu'ils repartent avec leurs parents en Turquie et y poursuivent leur scolarité. Dès lors, le préfet de la Gironde a bien pris en considération de manière primordiale leur intérêt supérieur et n'a pas méconnu les stipulations précitées.
S'agissant des moyens propres à la décision fixant le pays de renvoi ;
8. En sixième lieu, il ne ressort pas des termes de cet arrêté que le préfet se serait estimé lié par les décisions de l'OFPRA et de la CNDA pour prendre cette décision. Par suite, le moyen ne peut qu'être écarté.
9. Enfin, il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme A..., dont la demande d'asile a été rejetée à deux reprises par l'OFPRA et la CNDA, serait exposée à des traitements inhumains et dégradants en cas de retour en Turquie. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté le surplus de sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 septembre 2018 du préfet de la Gironde. Par suite, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte et ses conclusions présentées au titre des frais d'instance doivent être rejetées.
DECIDE
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... épouse D... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Gironde.
Délibéré après l'audience du 29 octobre 2019 à laquelle siégeaient :
M. Dominique Naves, président,
Mme F... H..., présidente-assesseure,
Mme E... C..., premier conseiller,
Lu en audience publique, le 26 novembre 2019.
Le rapporteur,
Déborah C... Le président,
Dominique NAVES Le greffier,
Christophe PELLETIER
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 19BX02113