Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 1er septembre 2015, Mme D...A..., représentée par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 7 juillet 2015 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 24 novembre 2014 du préfet de la Haute-Garonne ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne, à titre principal, de lui délivrer le titre de séjour sollicité dans le délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991.
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Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- l'arrêté du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus par les agences régionales de santé ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Sabrina Ladoire,
- les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. MmeA..., ressortissante ghanéenne, née en 1975, déclare être entrée en France le 30 décembre 2006. Elle a bénéficié, à compter du 25 juin 2013, d'un titre de séjour d'un an en qualité d'étranger malade dont elle a sollicité le renouvellement le 1er avril 2014. Par un arrêté du 24 novembre 2014, le préfet de la Haute-Garonne a refusé de renouveler son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Mme A...relève appel du jugement du 7 juillet 2015 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la décision portant refus de titre de séjour :
2. En premier lieu, la décision contestée vise les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile applicables à la situation de MmeA..., en particulier l'article L. 313-11 11°. Cette décision mentionne les termes de l'avis émis le 4 juin 2014 par le médecin de l'agence régionale de santé et précise que l'intéressée ne justifie pas être dans l'impossibilité d'accéder aux soins médicaux appropriés dans son pays d'origine. Elle rappelle ensuite qu'aucun élément du dossier n'est de nature à considérer que la situation de Mme A...revêtirait un caractère humanitaire exceptionnel et précise également qu'il n'est pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale dans la mesure où elle a vécu la majeure partie de sa vie au Ghana, où réside toujours son fils. Ainsi cette décision, alors même qu'elle ne vise pas les dispositions de l'article L. 511-4 10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, doit être regardée comme suffisamment motivée. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation ne peut qu'être écarté.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (....) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. (...) ". En vertu de l'article R. 313-22 du même code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général. (...). / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d' un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur l'existence d'un traitement dans le pays d'origine de l'intéressé. (...) ". L'arrêté du 9 novembre 2011 pris pour l'application de ces dispositions, en vigueur à la date à laquelle le médecin de l'agence régionale de santé s'est prononcé, prévoit que celui-ci émet un avis précisant si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale, si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement médical approprié dans le pays dont il est originaire, la durée prévisible du traitement, et indiquant en outre si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers son pays de renvoi.
4. Il ressort des pièces du dossier que le médecin de l'agence régionale de santé de Midi-Pyrénées, par un avis émis le 4 juin 2014, a indiqué que l'état de santé de Mme A...nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut n'entraînerait pas des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il existait un traitement approprié pour sa prise en charge médicale dans son pays d'origine. Pour contester les termes de cet avis, l'intéressée produit deux certificats médicaux établis par le Dr B...le 10 décembre 2014 et le 24 août 2015 dont il ressort qu'elle est atteinte d'une hépatite C diagnostiquée le 30 août 2011. Si ces deux certificats, au demeurant postérieurs à la décision attaquée, indiquent que la pathologie de Mme A..." nécessite une prise en charge régulière et au long cours " dont le défaut " pourrait avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité ", ils ne comportent aucune précision sur la pathologie de l'intéressée alors que le préfet soutient que Mme A...ne souffre pas d'une hépatite C létale, mais d'une hépatite C bénigne ou chronique qui n'appelle pas de traitement. Ainsi, ces attestations médicales ne sont pas de nature à contredire utilement l'appréciation émise par le médecin de l'agence régionale de santé sur ce point. Dès lors, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'état de santé de Mme A...nécessiterait un traitement médical dont l'absence entraînerait des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Par ailleurs, la requérante ne saurait utilement se prévaloir des termes de l'instruction ministérielle n° DGS/MC1/RI2/2011/417 du 10 novembre 2011, relative aux recommandations pour émettre les avis médicaux concernant les étrangers malades atteints de pathologies graves, laquelle est dépourvue de caractère réglementaire. Enfin, la circonstance que l'avis précité du médecin de l'agence régionale de santé est en contradiction avec un précédent avis ne permet pas d'établir que l'intéressée justifierait encore, à la date de l'acte attaqué, des conditions permettant la délivrance d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade. Dans ces conditions, et alors que Mme A...ne justifie d'aucune circonstance humanitaire exceptionnelle, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté. Pour les mêmes motifs, le préfet de la Haute-Garonne n'a pas davantage entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation.
5. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Pour l'application des stipulations précitées, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.
6. Mme A...soutient qu'elle réside en France depuis près de huit années à la date de la décision attaquée et a pu y nouer de nombreuses relations personnelles, qu'elle ne représente aucune menace pour l'ordre public, qu'elle est bien insérée dans la société française, et qu'elle souffre d'une pathologie au potentiel létal avéré dont la prise en charge ne pourra être assurée au Ghana. Il ressort toutefois des pièces du dossier que la requérante, entrée irrégulièrement en France, est célibataire et sans charge de famille et qu'elle n'est pas dépourvue de toute attache familiale dans son pays d'origine, où réside son fils. En outre, ainsi qu'il vient d'être dit au point 4, l'état de santé de la requérante ne justifie pas qu'un titre de séjour lui soit délivré pour ce motif. Dans ces conditions, la décision de refus de séjour n'a pas porté une atteinte excessive au droit de Mme A...au respect de sa vie privée et familiale et n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Cette décision n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressée.
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
7. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que la décision portant refus de titre de séjour n'est pas entachée d'illégalité. Par suite, le moyen tiré de ce que la mesure d'éloignement serait dépourvue de base légale doit être écarté.
8. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français: (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé ; (...).".
9. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 4.
10. En troisième lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 6, le moyen tiré de la méconnaissance par la mesure d'éloignement des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté.
Sur la décision fixant le pays de renvoi :
11. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à exciper de l'illégalité des décisions portant refus de titre de séjour et éloignement du territoire français à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision fixant le pays de renvoi.
12. En deuxième lieu, la décision fixant le pays de renvoi vise l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et indique que Mme A...n'établit pas être exposée à des peines ou traitements personnels réels et actuels contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine. Cette décision est ainsi suffisamment motivée.
13. Enfin, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".
14. Ainsi qu'il a été dit au point 4, Mme A...n'établit pas que le défaut de prise en charge médicale de sa pathologie entraînerait pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Dans ces conditions, l'intéressée, dont la demande d'asile a fait l'objet d'un rejet définitif par les autorités compétentes, n'établit pas qu'elle serait exposée à des risques actuels et personnels de traitement contraire aux stipulations précitées en cas de renvoi au Ghana. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées ne peut dès lors qu'être écarté.
15. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles tendant à l'application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.
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N°15BX02952