Résumé de la décision :
La société Mutuelle de Poitiers Assurances a interjeté appel d'un jugement du tribunal administratif de Poitiers qui avait rejeté sa demande d'indemnisation contre la société Electricité Réseau Distribution France (ERDF) suite à l'électrocution de M. B..., un agriculteur. Lors de l'accident, M. B... a heurté une ligne électrique de 20 000 volts qui surplombait son champ, ce qui a entraîné des séquelles graves pour lui. La cour a confirmé le jugement initial, estimant qu'ERDF n'était pas responsable du dommage, la faute étant attribuée à la maladresse de M. B..., qui connaissait parfaitement les lieux.
Arguments pertinents :
1. Exonération de la responsabilité d'ERDF : La cour a souligné que la société ERDF ne peut être tenue responsable des dommages causés par des ouvrages publics à moins qu'il ne soit prouvé qu'il y ait eu une faute de sa part ou une force majeure. Elle a stipulé : « La société ERDF doit être tenue pour responsable, même en l'absence de faute, des dommages causés aux tiers par le fait des ouvrages publics dont elle est concessionnaire ».
2. Imprudence de la victime : L'instance a constaté que M. B... avait commis une imprudence manifeste en grimpant sur sa moissonneuse, ce qui a conduit à l'accident. La cour a noté : « En grimpant sur l'engin agricole stationné à proximité immédiate de la ligne électrique, dont il ne pouvait donc ignorer la présence, il a commis une imprudence manifeste de nature à exonérer totalement la société ERDF de sa responsabilité ».
Interprétations et citations légales :
1. Responsabilité d'ERDF : Le cadre légal applicable à des situations similaires a été évoqué, notamment la responsabilité pour faute ou force majeure. La cour a confirmé que la responsabilité d'ERDF était limitée aux rares cas où la faute de la victime pourrait être prouvée, citant : « Elle ne peut être exonérée de la responsabilité qui lui incombe que si ces dommages sont imputables à une faute de la victime ou à une force majeure ».
2. Hauteur de la ligne électrique : Concernant la question de la violation des normes de hauteur, la cour a précisé que l'arrêté interministériel du 30 avril 1958 ne s'appliquait pas aux propriétés privées, en affirmant : « Il ne prescrivait en revanche aucune hauteur particulière pour les installations situées au-dessus des propriétés privées et, en particulier, au-dessus des terrains agricoles ». Cela souligne la distinctivité entre les prescriptions pour les routes publiques et les terrains privés.
3. Article L. 761-1 du Code de justice administrative : Finalement, la conclusion portant sur la demande d'indemnisation des frais d'instance stipule que seule la partie perdante peut être condamnée à payer. La cour a indiqué : « Les dispositions de cet article font obstacle à ce que la société ERDF, qui n'est pas la partie perdante à l'instance, soit condamnée à verser quelque somme que ce soit à la société Mutuelle de Poitiers Assurances au titre des frais d'instance non compris dans les dépens ».
En somme, la décision est étayée par une analyse précise de la responsabilité civile en lien avec les normes de sécurité, tout en insistant sur le devoir de prudence des victimes dans le cadre d'accidents impliquant des infrastructures publiques.