Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 6 juillet 2016, M.B..., représenté par la SCP Breillat - Dieumegard - Masson, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers du 15 juin 2016 ;
2°) d'annuler l'arrêté contesté ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Vienne de lui délivrer, à titre principal, une carte de séjour temporaire d'une durée d'un an dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard, à titre subsidiaire, une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travail dans un délai de quinze jours suivant la notification de la décision à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard jusqu'à ce que l'autorité administrative ait statué sur sa situation administrative et de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son conseil au titre des articles 35 et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
5°) subsidiairement, dans l'hypothèse où M. B...n'obtiendrait pas l'aide juridictionnelle, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Laurent Pouget, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M.B..., de nationalité congolaise, est entrée irrégulièrement en France le 14 avril 2013, selon ses déclarations. Le 11 juin 2013, il a sollicité le bénéfice de l'asile, qui lui a été refusé par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 23 mars 2015, confirmée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 16 octobre 2015. Par un arrêté du 27 janvier 2016, le préfet de la Vienne a refusé de délivrer un titre de séjour à l'intéressé, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. B...relève appel du jugement du 15 juin 2016 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté son recours dirigé contre cet arrêté.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Ainsi que le soutient M.B..., les premiers juges ont omis de répondre au moyen, qui n'était pas inopérant, tiré de l'insuffisante motivation de la décision fixant le pays de renvoi. Par suite, le jugement attaqué est irrégulier en tant qu'il statue sur les conclusions dirigées contre cette décision. Il y a lieu d'annuler dans cette mesure le jugement contesté et de statuer, par la voie de l'évocation, sur les conclusions de la demande de première instance dirigées contre la décision fixant le pays de renvoi, et, par l'effet dévolutif de l'appel, sur les autres conclusions du requérant.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne la légalité de l'arrêté pris dans son ensemble :
3. M. Serge Bideau, secrétaire général de la préfecture de la Vienne, qui a signé l'arrêté attaqué, bénéficiait d'une délégation de signature du préfet de la Vienne par arrêté en date du 1er janvier 2016, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture n° 1 du même jour. Cet arrêté de délégation prévoit que, s'agissant du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, délégation de signature est consentie à M. Serge Bideau " pour l'ensemble de ses dispositions ", ce qui comprend notamment les décisions portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de renvoi. Une telle délégation n'est nullement imprécise et il y a lieu, par suite, d'écarter le moyen tiré de l'incompétence de M. Serge Bideau pour signer l'arrêté contesté.
En ce qui concerne le refus de séjour :
4. Aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent (...) ". Selon l'article 3 de cette même loi : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ". La décision en litige vise les textes sur lesquels elle se fonde, en particulier l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. La même décision rappelle les conditions d'entrée et de séjour en France de M. B...et précise que sa demande d'admission au séjour au titre de l'asile a été rejetée par des décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de la Cour nationale du droit d'asile, qu'un retour en République démocratique du Congo ne serait pas de nature à porter à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée dès lors qu'il a un enfant qui réside dans son pays d'origine, que son épouse ne bénéficie pas d'un droit au séjour en France et qu'il peut reconstituer une vie familiale normale soit dans ce pays, soit dans tout autre pays pour lequel il justifierait être légalement admissible. Cette motivation en fait est suffisante pour permettre au requérant de connaître les motifs du refus opposé à sa demande. Par suite, le préfet, qui n'a pas édicté une décision stéréotypée et qui n'était pas tenu d'y faire figurer de façon exhaustive tous les éléments de la situation du requérant, a suffisamment motivé sa décision en droit comme en fait au regard des exigences de la loi du 11 juillet 1979. Il ne ressort ni des termes de l'arrêté contesté ni d'aucune autre pièce du dossier que le préfet n'aurait pas procédé à un examen circonstancié de la situation personnelle de M. B...avant de rejeter sa demande de titre de séjour.
5. Il ne ressort pas des pièces du dossier que M. B...aurait, ainsi qu'il le soutient, sollicité au mois de novembre 2015 un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il n'est par suite pas fondé à soutenir que le préfet, en rejetant sa demande au titre de l'asile, aurait méconnu ces dispositions.
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
6. L'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule que : " 1 - Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance - 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, où à la protection des droits et libertés d'autrui ".
7. M. B...soutient que l'ensemble de ses centres d'intérêts se trouve désormais en France, où il réside depuis près de trois ans et où il a épousé une compatriote le 7 mars 2015. Toutefois, il ne justifie pas d'une entrée régulière sur le territoire national et n'a été admis à y séjourner que le temps nécessaire à l'instruction de sa demande d'asile, qui a été définitivement rejetée par les autorités compétentes en 2015. Le mariage de l'intéressé est récent et il ne justifie pas d'une communauté de vie avec son épouse, titulaire d'une carte de séjour belge et dont il ressort des pièces du dossier qu'elle réside en Belgique. Il n'établit pas, par ailleurs, avoir tissé des liens sociaux et amicaux d'une intensité particulière sur le sol national et ne justifie pas d'une insertion manifeste dans la société française. Il ne démontre pas, par la production d'attestations peu circonstanciées, entretenir des relations étroites avec les membres de sa fratrie dont il invoque la présence en France et il n'est pas dépourvu d'attaches familiales en République démocratique du Congo, où il a vécu jusqu'à l'âge de trente-et-un ans et où résident à tout le moins sa fille, née en 2006, et ses parents. Dans ces conditions, et dès lors qu'aucune circonstance particulière avérée ne s'oppose à ce que la cellule familiale se reconstitue dans son pays d'origine ou à ce qu'il sollicite une admission au séjour en Belgique, la mesure d'éloignement contestée n'a pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale de M. B...une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :
8. La décision fixant le pays de renvoi de M. B...vise l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, mentionne que le requérant est de nationalité congolaise, qu'il n'établit pas être exposé à des peines ou traitements contraires à la convention précitée en cas de retour dans son pays d'origine et qu'il pourra être reconduit d'office à destination du pays dont il a la nationalité ou de tout pays pour lequel il établirait être légalement admissible. Dans ces conditions, l'intéressé n'est pas fondé à soutenir que cette décision n'est pas motivée en droit et en fait.
9. Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".
10. M. B...n'a fourni aucun élément de nature à établir qu'il encourrait, actuellement et à titre personnel, des risques de traitements contraires aux stipulations précitées en cas de retour en République démocratique du Congo, alors qu'au demeurant sa demande d'asile a été rejetée tant par l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides que par la Cour nationale du droit d'asile. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut dès lors qu'être écarté.
11. Il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté ses conclusions à fin d'annulation du refus de titre de séjour et de la décision portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours contenus dans l'arrêté contesté et, d'autre part, n'est pas fondé à demander l'annulation de cet arrêté en tant qu'il fixe le pays de renvoi.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
12. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par le requérant, n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte ne peuvent être accueillies.
Sur les conclusions présentées au titre du 2ème alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
13. L'Etat n'étant pas la partie perdante dans la présente instance, les conclusions présentées au titre du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1600495 du 15 juin 2016 du tribunal administratif de Poitiers est annulé en tant qu'il a statué sur les conclusions de M. B...tendant à l'annulation de la décision du préfet de la Vienne du 27 janvier 2016 fixant le pays de renvoi.
Article 2 : Les conclusions de la demande présentée par M. B...devant le tribunal administratif de Poitiers tendant à l'annulation de la décision du préfet de la Vienne du 27 janvier 2016 fixant le pays de renvoi et le surplus des conclusions de sa requête d'appel sont rejetés.
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N° 16BX02201